Des documents inédits, rendus publics le 4 février 2025, dévoilent l'ampleur des pressions exercées par le groupe industriel Nestlé Waters auprès de l’Élysée, de Matignon et de plusieurs ministères pour continuer à commercialiser ses eaux filtrées de manière illégale, malgré des risques avérés pour la santé publique. Cette situation soulève une question cruciale : notre cadre réglementaire est-il suffisant pour encadrer le lobbying en France ?
Depuis la loi Sapin II de 2016, le lobbying fait l'objet d'un encadrement progressif. Le registre des représentants d'intérêts, l’obligation d’y déclarer son activité et son récent élargissement, sont certes, des avancées significatives.
Cependant, l'affaire Nestlé Waters expose certaines failles de ce système. Si la multinationale a bien déclaré certaines de ses activités, tous les rendez-vous rendus publics dans la presse n’ont pas été déclarés auprès de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Au-delà du potentiel délit pénal, cette affaire révèle les limites des dispositifs existants : informations incomplètes, absence de contrôle efficace, et périmètre restreint des institutions concernées.
En France, les rencontres entre décideurs publics et représentants d'intérêts ne sont pas systématiquement rendues publiques. Le registre de lobbying, bien qu'utile, reste lacunaire : il ne couvre pas tous les acteurs publics, notamment le Conseil constitutionnel et le Conseil d'État, dont les avis influencent pourtant fortement le processus législatif.
Pourtant, la transparence est un pilier fondamental de la démocratie. Elle garantit que les décisions publiques se prennent à la lumière des faits, et non dans l'ombre des intérêts privés. Des solutions existent pourtant. Il devient urgent d'étendre les obligations de transparence à tous les responsables publics, y compris ceux des hautes institutions. Les délais de publication des informations pourraient également être raccourcis, et les données fournies par les représentants d'intérêts devraient, dans tous les cas, être plus détaillées et vérifiables.
Au-delà de la transparence, c'est la question de la distorsion de concurrence entre les différents intérêts représentés qui doit nous alarmer. Les grands groupes industriels comme Nestlé Waters disposent de ressources considérables pour influencer les décisions publiques. Face à elles, les petites entreprises, les ONG et les associations de défense de l'environnement peinent à se faire entendre. Cette asymétrie fausse le débat démocratique et nuit à la qualité du débat démocratique.
Au fond, c’est un peu David contre Goliath. Mais à la différence du texte biblique : c’est toujours le géant qui l’emporte.