Voici le bureau de vote des paysans de Wukan.Il ne manque pas de charme avec ses parasols multicolores, ses urnes lustrées recouvrant toute la cour de l'école, ses calicots appelant à écouter la voix du peuple et cette voix féminine nappée de musique d'ascenseur rappelant aux journalistes étrangers amis "à respecter les lois nationales".
La liste des assesseurs est même publiée sur les murs. Dactylographiée et dûment tamponnée, elle recouvre des affiches plus anciennes. Celles, écrites à la main, et qui détaillaient la liste des donateurs. Car pendant des semaines de barricades, de nombreuses familles se sont côtisées afin de soutenir les hommes ayant renoncé à la pêche pour tenir tête aux 1000 policiers armés. Le calme est revenu depuis, et le Parti a proposé la tenue d'élections pour désigner de nouveaux représentants. Depuis septembre 2011, les paysans de Wukan enragent contre la perte de leurs terres, que des officiels corrompus ont cédé à des promoteurs peu scrupuleux. Relire mon papier publié dans le journal de Mediapart le 24 décembre dernier.
Désormais, Wukan n'est plus un mot censuré sur la toile chinoise. C'est sans doute pour cela que les journalistes des médias officiels déambulent dans les ruelles du village (même s'ils ont tendance à visiter les mêmes maisons). Et pendant ce temps, des officiels de la province paradent, serrent les paluches, s'entretiennent à huis-clos avec quelques uns des 21 candidats... puis repartent dans leurs berlines avec chauffeur, aux plaques camouflées. Peut-être les verrons-nous demain, dès 9h, début du scrutin. Dans la cour, une zone "média" est déjà prévue. Elle est délimitée par un ruban de police comme celui qui entoure une scène de crime.
Dehors, madame Wu Fang, femme de pêcheur, nous propose gracieusement le gîte, et le couvert. Nous la suivons. A bientôt !