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Billet de blog 9 novembre 2011

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Chine: un chantage au réchauffement climatique?

Depuis Copenhague, la Chine s'est engagée avec zèle dans la lutte contre les gaz à effet de serre. Une lutte juteuse, jusqu'à l'absurde. Démonstration par l'exemple.

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Depuis Copenhague, la Chine s'est engagée avec zèle dans la lutte contre les gaz à effet de serre. Une lutte juteuse, jusqu'à l'absurde. Démonstration par l'exemple.

Autrement plus nocif que le CO2 du charbon ou de nos pots d'échappement, il existe un gaz participant activement au réchauffement climatique: le HFC 23, capable de rester deux siècles dans les airs.

D'où vient-il? C'est un rejet issu de la fabrication d'un gaz réfrigérant fort utile: le HFC 22, utilisé dans l'air conditionné.

Pour que le dangereux HFC 23 soit absolument neutralisé, ces usines (à gaz) peuvent bénéficier de subventions internationales alléchantes. Deux fois plus d'argent que n'offre la vente d'HFC 22 !

Il n'en fallait pas plus pour que la Chine développe ces entreprises "vertes" d'HFC 22 en deux temps trois mouvements. D'où vient cet argent? C'est un pot commun, issu des fameux crédits carbone. Quand une très grosse entreprise pollue, elle achète un permis de polluer, le crédit ou quota carbone. A qui? A celles qui en bénéficient, soit celles qui ne polluent pas. Détruire le HFC 23 est le meilleur aspirateur à crédit carbone qui soit. Cela rapporte 70 fois plus que l'argent réellement dépensé en Chine pour neutraliser ce gaz (par incinération).

Ce business vert a trois avantages:

- il est lucratif ;

- il contribue à atteindre les objectifs nationaux de réductions des gaz à effet de serre inscrits dans le marbre de l'actuel plan quinquennal ;

- il permet enfin de recevoir des éloges de ministres occidentaux. En visite récente à Shanghai, la ministre française de l'écologie a déclaré: "je suis très frappée de voir la conscience forte des responsables chinois face aux enjeux liés au réchauffement climatique".

Différentes ONG n'ont cessé d'alerter les instances dirigeantes internationales. Après une enquête tardive de l'ONU, ce système de subventions anti-HFC 23 via les crédits carbone devrait être supprimé. Cela concerne 7 entreprises chinoises, 2 sud-coréennes et une indienne. La Chine avait déjà récupéré 5 milliards de dollars en 5 ans, rien que sur ce gaz.

Mais Pékin ne l'entend pas de cette oreille. Surtout que la Chine compte lancer plusieurs "plateformes" d'achat et de reventes de crédits-carbone. Une bourse du CO2 en quelque sorte, pour un marché mondial qui représente tout de même 126 milliards de dollars !

Comment la Chine compte-t-elle réagir? Peut-être par le chantage. Xie Fei, qui gère en Chine le "Fonds de Développement Propre" interceptant les fameux crédits carbone, a déjà promis que les entrepreneurs chinois pénalisés laisseraient l'HFC 23 s'échapper.