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Billet de blog 16 septembre 2012

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Un samedi anti-japonais, à Pékin

Ils étaient là, à chanter l'hymne national, appeler au boycott des produits japonais ou brandir le portrait de Mao, comme au bon vieux temps. Régulièrement, une voix sortait pour réclamer la mort des Japonais, au milieu des rires gênés d'un public jeune, majoritairement masculin.

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Ils étaient là, à chanter l'hymne national, appeler au boycott des produits japonais ou brandir le portrait de Mao, comme au bon vieux temps. Régulièrement, une voix sortait pour réclamer la mort des Japonais, au milieu des rires gênés d'un public jeune, majoritairement masculin.

Nous étions sur Liangmaqiao Dongjie, devant l'ambassade du Japon, elle-même voisine de l'ambassade de France. Une manifestation se tenait samedi pour revendiquer l'appartenance des Iles Diaoyu/Senkaku à la Chine.

(Lu sur une voiture "payer une dette de sang par le sang")

D'innombrables volontaires à brassard rouge, policiers en civil ou en uniforme, militaires armés ou simplement munis de mégaphones: tous observaient, impassibles, avec un hélicoptère patrouillant au dessus de leurs têtes. On se dit alors que si le gouvernement l'avait souhaité, cette manifestation anti-japonaise aurait été matée en une minute chrono.

Au milieu de cette cohue festive, les journalistes étaient très vite repérés. Quelques minutes après avoir sorti mon appareil photo, je fus contrôlé puis emmené, poliment, jusqu'à l'espace réservé aux médias. C'était un bout de trottoir cerné de barricades policières, juste à l'entrée de l'ambassade japonaise, elle-même protégée de 4 rangées de petits soldats, appareillés comme des CRS. A cet endroit, nous avions plus de chances de recevoir des oeufs pourris ou des bouteilles d'eau à la figure que de pouvoir parler au manifestants. J'y ai fait la connaissance d'un journaliste sud coréen. Il a été tapé et sa chemise est recouverte de tâches non identifiables. "Ces jeunes m'ont pris pour un Japonais, les cons" regrette-t-il. Autant dire que le journaliste japonais faisant un "plateau" derrière nous n'était pas pressé de rejoindre la foule.

En quittant les lieux, toujours sous escorte policière, je croise une jeune maman assise sur le trottoir. Elle venait d'enrouler un bandeau rouge sur la tête de son petit garçon, sur lequel était écrit "à bas les japonais". J'avais garé mon scooter dans une ruelle adjacente, où s'alignent les restaurants exotiques. "Ici, les patrons sont chinois", "Les iles appartiennent à la Chine" lisait-on sur des banderoles suspendues comme des talismans protecteurs, sur les façades des marchands de sushis, fermés pour l'occasion.

La manifestation se poursuit ce dimanche, à Pékin comme dans une vingtaine de villes chinoises.
(Photos: J.P.  Site: www.jordanpouille.com)