Le Front de gauche à la croisée des chemins : A gauche toute ! Toutes et tous ensemble !
Une fois de plus, les médias se déchaînent contre le Front de gauche. Les conservateurs rêvent d’un Front de gauche miné par les divisions internes. Bien rôdés à défendre le système dominant, ils se pourlèchent les babines : « Crise ouverte et règlement de compte » déclare Le Monde, « Les frères ennemis aux estivales du Parti de gauche » titre Libération, « ambiance détestable au Front de gauche » pour le Figaro….
Certes l’heure est grave pour nous. Car nous sommes à la veille des municipales, première échéance électorale de caractère national après une année calamiteuse du pouvoir socialiste. Et le Parti socialiste, parti de « gauche » institutionnel dans le système bipolaire et totalement anti démocratique de la Cinquième République, entend bien profiter de cette situation pour imposer sa loi à toutes les forces de gauche : satellisation des autres partis autour du PS ou marginalisation. Impasse dramatique pour les couches populaires, laissées ainsi en pâture au « social libéralisme » c'est-à-dire à la version que le PS donne actuellement de la dictature des multinationales et des banques (signature du Pacte européen budgétaire, fermeture de Florange/Arcelor mittal, vote de l’ANI, poursuite des attaques contre nos retraites, contre les syndicalistes et les militants pacifistes BDS, etc).
Mais le Front de gauche a bel et bien commencé à enrayer sérieusement cette machine infernale de la fausse gauche au pouvoir. Pas question de reculer maintenant !
Il faut le dire clairement, l’union de la gauche autour du Parti socialiste est totalement dépassée. Car elle n’est plus l’expression du rassemblement des grandes familles politiques du monde du travail. La voix des travailleurs ne peut plus se faire entendre depuis longtemps dans les instances de ce parti. Il existe bien une petite gauche socialiste au sein de l’appareil du PS, mais elle n’est qu’une caution morale impuissante, un frêle esquif toujours prêt à chavirer au gré des promotions ministérielles, dans un océan de notables. Le Parti socialiste s’est définitivement moulé dans les institutions de la Cinquième République. Une base de notables godillots et une direction aux ordres du capitalisme financier, voila ce qu’est le Parti socialiste aujourd’hui. Si la Cinquième République tombait, il s’effondrerait avec elle car il est l’un des deux piliers institutionnels de ce régime. Sa « rente de situation » lui permet de capter les voix des couches populaires qui, ne nous y trompons pas, l’ont déserté depuis longtemps.
Cela ne veut pas dire pour autant qu’il n’y ait plus de « socialistes » dans ce pays. Ils sont au contraire très nombreux à voter socialiste sans être membres du PS. Ils croient « voter utile ». Ils sont des réformistes sincères, partisans modérés d’une illusoire transition graduelle vers le socialisme. Mais Jaurès reste encore pour beaucoup d’entre eux l’image de ce que devrait être le socialisme en France. Beaucoup de ces électeurs de gauche sont à présent très déçus par la politique du gouvernement socialiste. Ils ont voté dès le premier tour pour le Parti socialiste au nom du vote utile mais sont presque aussi indignés que nous le sommes par la politique que mène la direction du PS au gouvernement. Avec ces socialistes-là, l’unité est possible sur des bases claires, c'est-à-dire contre la politique du gouvernement qui est une politique de droite. L’unité oui, mais pas avec les notables de l’appareil socialiste qui nous trahit comme il trahit aussi sa base électorale socialiste qui a voté Hollande en espérant le changement. Au Front de gauche, par respect pour nous-mêmes (déterminés que nous sommes à défendre les intérêts des couches populaires), tout autant que par respect pour ces électeurs socialistes-là, nous devons nous saisir des élections municipales pour demander des comptes à ceux qui nous trahissent au gouvernement et au Parlement. « Pas en notre nom », messieurs Hollande, Valls et Ayrault ! Vous n’avez pas le droit de poursuivre l’ignoble politique de la droite. Ce n’est pas le mandat que nous vous avons donné aux présidentielles ! Ce sont des salariés (es), des précaires, des travailleurs immigrés, des jeunes aux chômages, des retraités, qui vont voter aux municipales.
C’est dans une démarche combative et unitaire, tournée vers la base, que nous pourrons déjouer ce piège de la Cinquième république aux municipales : la satellisation de la gauche de la gauche autour du PS. C’est un piège terriblement dangereux car l’extrême-droite est déjà prête à en tirer tout le profit. Elle sait parfaitement qu’elle aurait beau jeu de se présenter comme le seul parti hors du système.
Nous devons être lucides. La période des municipales sera un défi audacieux et difficile pour nos candidats du Front de gauche. Mais bien moins difficile à vivre que ce que nous subissons avec le pouvoir actuel : rafles policières contre les immigrés, criminalisation des syndicalistes, poursuites judiciaires contre les militants associatifs et du droit des peuples, licenciements de masse, casse des services publics, flexibilité et précarisation accrue, nouvelle attaque contre les retraites. Et nous ne devons pas oublier un seul instant que cette année, un jeune sidérurgiste d’Arcelor Mittal a perdu un œil en défendant son emploi, face aux flashballs de la police du président Hollande. Pas en notre nom messieurs Valls et Hollande !
Ce débat sur les alliances électorales doit être mené sereinement et dans un climat de franche camaraderie dans tout le Front de gauche. Mais aussi au-delà car ce front doit encore s’élargir pour rassembler l’ensemble des forces anticapitalistes et écologistes. Pourquoi devrions-nous craindre ce débat ? Les discussions que nous aurons à mener demain dans les assemblées citoyennes pour une nouvelle constitution anticapitaliste seront sans doute encore bien plus agitées, passionnées et passionnantes. A gauche, il n’y a pas de chant des sirènes dont il faudrait se protéger, comme Ulysse qui s’était fait attacher sur son bateau, pour ne pas céder à la tentation.
Nous avons tout à gagner à nous poser les bonnes questions dans un contexte politique on ne peut plus clair pour le Front de gauche :
- Les municipales sont le premier grand rendez-vous électoral avant les européennes et surtout les présidentielles. Faut-il faire l’unité avec la direction du PS qui a piétiné les espérances du mouvement social, ou l’unité avec la base, les travailleurs, les chômeurs, socialistes ou non, qui veulent un vrai changement ?
- Le meilleur moyen de contrer la vague de reflux de tous les déçus du Hollandisme n’est-il pas de présenter des listes unitaires du Front de gauche clairement anticapitalistes et anti Cinquième république ?
- Nous sommes à la veille d’une nouvelle lutte pour la défense des retraites. Ce mouvement, nous devons tout faire pour qu’il soit encore plus puissant que celui de l’automne 2010, car s’il a finalement permis de faire tomber Sarkozy aux élections, il n’en a pas fini avec sa politique. Le Front de gauche aura à y jouer un rôle de tout premier plan car ce combat aura inévitablement un caractère à la fois social et citoyen. Est-ce en nous plaçant à la remorque de la direction du PS que nous nous mettrons en mesure de préparer ce combat, à la fois décisif pour la défense de nos acquis sociaux et pour ébranler les fondements de cette fausse démocratie qu’est la Cinquième république ?
Au-delà des échéances de cette rentrée, le résultat des futures présidentielles dépendra de la façon dont nous répondrons dès à présent à ces questions. C’est ainsi que nous ferons la démonstration, face à tous nos détracteurs, du dynamisme fraternel et de la bonne santé du Front de gauche.
J P,