Monsieur Le Président de la République française,
Je dirige un petit centre de formation continue en travail social (PSYCHASOC à Montpellier) qui soutient les travailleurs sociaux depuis 21 ans. En novembre 2020, pour que les salariés puissent faire valoir le CPF à nos formations, nous avons déposé deux dossiers (« Supervision d’équipes » ; « Clinique du travail social »), auprès du Registre national spécifique des certifications professionnels (RNSPS) à France Compétences organisme. Réponse de l’organisme au bout de 11 mois : Refusé ! Motifs : 1) Les besoins du Marché ne correspondent pas. Alors que nous avons formé des milliers de professionnels à l’approche clinique qui ont tous faire valoir cette formation dans leur engagement sur le terrain. Alors que depuis un an une centaine de professionnels sont en attente du RNCPS pour bénéficier de nos formations. 2) Les référentiels ne correspondent pas. Et pour cause notre approche est une approche clinique où la relation aux usagers est centrale. Nous refusons d’entrer dans des pratiques de protocoles et autre ingénierie sociale qui déshumanisent le lien social. Nos formations ont aussi vocation à former les professionnels à l’esprit critique. 3) Les procédures de contrôle et d’évaluation ne sont pas suffisamment attestées. Ce que nous évaluons en formation c’est un parcours de formation et les capacités à le transposer sur le terrain. Et non des acquisitions scolaires sanctionnées par des notes. Et nous nous refusons à faire des formations en visio. On nous reproche donc de ne pas participer à l’innovation (qui engraisse évidemment les GAFAM). La formation est pour nous avant tout affaire de rencontre humaine. Il nous est de fait impossible de rentrer dans les critères kafkaïens de France Compétences sans tordre complétement la nature des formations que nous animons.
Depuis une quinzaine d’année nous avons formé à l’approche clinique plus de 6000 professionnels de l’action sociale (éducateurs, moniteurs-éducateurs, éducateurs techniques spécialisés, moniteurs d’atelier, assistants de service social, conseillers en économie social et familiale, chefs de service éducatif, psychologues, directeurs, médecins psychiatres…) Depuis la Réforme de mars 2014, chaque année nous recevons de nombreuses demandes de formation que nous ne pouvons honorer faute de certification. Cependant certains Pôle-Emploi ou certaines OPCO ont accepté une dérogation en attendant la certification. Pourtant nous avons œuvré sans compter : nous avons organisé à Montpellier colloques et journées réunissant jusqu’à 700 praticiens de l’action sociale (2004, 2007, 2013 : Psychanalyse et travail social ; 2009 : La supervision d’équipes en travail d’équipes en question). Un séminaire clinique mensuel fréquenté par des travailleurs sociaux, psychologues et psychanalystes de la région fonctionne chaque année à Montpellier depuis 15 ans. Nous avons été sollicités en 2015 au Cameroun et 2019 en Algérie pour la formation à cette approche clinique de professionnels : travailleurs sociaux et psychologues, actions pour lesquelles nous avons reçu des subventions au titre de « Défense de la Francophonie ». Nos formateurs (éducateurs spécialisés, assistants de service social, infirmiers psychiatriques, psychologues, pédopsychiatres, psychanalystes, enseignants-chercheurs…) ont tous exercé, pendant plusieurs années, en établissements sociaux et médico sociaux. De plus ils ont tous suivi un cursus universitaire en sciences humaines.
Que penseriez-vous Monsieur Le Président de la République si l’on exigeait de vous votre référentiel de compétences en matière de gouvernance, si l’on vous soumettait à des procédures d’évaluation dignes de Kafka, si l’on vous demandait de vous plier aux lois du Marché ? La formation, comme le travail social, comme la politique, ne sauraient être ravalés au rang de marchandises !
En conséquence nous vous demandons instamment de nous accorder une dérogation afin de continuer à remplir notre mission de formation et de soutien de travailleurs sociaux de plus en plus fragilisés auprès de populations elles-mêmes plongées dans les plus grandes difficultés de vie.
Dans l’attente de votre réponse, veuillez agréer, Monsieur Le Président de la République française, mes respectueuses salutations.
Joseph ROUZEL, responsable de l’Institut européen travail social et psychanalyse (PSYCHASOC)
3, rue Urbain V
340000 MONTPELLIER
Tel : 06 73 09 05 60
rouzel@psychasoc.com