Le 1er septembre 1939, sans déclaration de guerre formelle, l'armée du Reich envahissait la Pologne au le prétexte que les troupes polonaises se seraient rendues coupables de provocations le long de la frontière germano-polonaise… L’invasion Allemande d’aujourd’hui est bien différente et silencieuse. Le prétexte pourrait être le délit d’indiscipline Européenne.
Depuis quelques jours, le gouvernement « Droit et justice » (PiS) est accusé de vouloir « repoloniser et déconcentrer » les médias polonais. Qu’en est-il ?
Donald Tusk (Plate-forme civique - PO), Président du Conseil des ministres de Pologne de 2007 à 2014, avait autorisé, entre 2013 et 2014, la filiale polonaise (Polska Presse) de l’Allemand Verlagsgruppe Passau, à doubler son emprise sur la presse régionale entre 2013 et 2014.
En avril 2016 un enregistrement datant du 17 avril 2014 a refait surface. On y entend un secrétaire d’État à la chancellerie du premier ministre Donald Tusk obtenir du milliardaire polonais Jan Kulczyk qu’il intervienne auprès de Friede Springer, veuve d’Axel Springer, actionnaire majoritaire du groupe Axel Springer et amie d’Angela Merkel au sujet des critiques du journal Fakt,. Le mari d’A. Merkel est d’ailleurs membre du conseil d’administration de la Fondation Friede Springer...
Six semaines après cette conversation, le rédacteur en chef de Fakt, en poste depuis près de 11 ans, était remplacé et le tabloïd adoptait une ligne plus anti-PIS qu’il a conservée.
L’actuel rédacteur en chef de Newsweek Polska, Tomasz Lis, est de toutes les manifestations contre le gouvernement de Beata Szydło (Présidente du Conseil des ministres de Pologne – PiS) et se répand dans les médias allemands sur les terribles répressions dont seraient victimes les journalistes de son pays et sur la dictature que chercherait à instaurer le PiS. Entre 2007 et 2015, son soutien indéfectible au gouvernement des libéraux de la Plateforme civique (PO) lui avait valu de pouvoir produire une émission politique pour la télévision publique polonaise que la nouvelle direction arrivée début 2016 a arrêté.
Le rédacteur en chef de Forbes Polska, a publié sur Facebook, au moment du blocage de la Diète par une partie de l’opposition en décembre dernier, une liste d’instructions à suivre pour organiser le« Maïdan » qu’il souhaitait en Pologne.
Mark Dekan, PDG du groupe Ringier Axel Springer, a envoyé une lettre (datée du13 mars 2017), après le sommet de Bruxelles reconduisant Donald Tusk à la présidence du Conseil européen, dans laquelle il dévoile la philosophie et la politique de son groupe de presse en Pologne. Il s’agit de la lettre hebdomadaire du PDG aux journalistes polonais du groupe.
On peut y lire qu’avec Tusk, ce sont les Polonais qui ont gagné et que les perdants sont le leader du PiS Jarosław Kaczyński et la bonne réputation de la Pologne au sein de l’UE. Mark Dukan explique aux journalistes de ses médias polonais qu’à Bruxelles le 9 mars « l’idéologie et les manipulations primitives ont perdu contre les valeurs et la raison », et que « sur l’autoroute de l’intégration européenne apparaissent non seulement une voie rapide et une voie lente, mais aussi un parking ». Et, explique-t-il : « C’est justement le moment où entrent en jeu les médias libres comme nous. N’oublions jamais les valeurs fondamentales que nous représentons : nous sommes en faveur de la liberté, de l’État de droit et de l’EUROPE UNIE * Souvenons-nous que la majorité de nos lecteurs et utilisateurs appartiennent à cette écrasante majorité qui soutient la présence de la Pologne dans l’UE. Disons-leur ce qu’il faut faire pour rester sur la voie rapide et ne pas finir sur le parking. L’enjeu, c’est la liberté et la réussite des générations futures. ». Suivent des statistiques montrant l’attachement des Polonais à leur adhésion à l’UE et une tentative d’explication de la critique de l’UE plus importante chez les jeunes : « Pourquoi croient-ils moins à l’idée d’une Europe commune ? Les populistes qui ont traîné l’UE dans la boue et les médias qui ont créé l’image négative d’une UE enfoncée dans la crise y ont certainement contribué. »
Pour le PiS, qui ne remet pas en cause l’adhésion de la Pologne à l’UE, cette lettre vient à point nommé pour convaincre une majorité de Polonais de la nécessité de « repoloniser »
les médias. Car ce que demande le PDG de Ringier Axel Springer à ses journalistes polonais, c’est de promouvoir en Pologne, la vision allemande de l’Union européenne et de tout faire pour « rééduquer » les lecteurs des journaux du groupe et les dresser contre la « politique européenne » du PiS.
Beata Szydło a immédiatement assuré qu’il mènerait rapidement à bien son projet de repolonisation et de déconcentration des médias.
Le gouvernement polonais n’est pas exempt de critiques et de dérives extrême-droitières (droit à l’avortement etc.) mais peut-on lui reprocher de vouloir briser la concentration étrangère de sa presse, de vouloir avoir des médias nationaux ? Non, à condition que ces médias soient libres et indépendants du pouvoir et des puissances de l’argent !
Pour le Pardem, l’absence organisée et systématique de pluralisme dans l’information et le débat politique ainsi que la volonté d’imposer le néolibéralisme comme pensée unique ont une cause : la propriété privée des grands médias par des groupes capitalistes de plus en plus concentrés. Cette situation leur permet de recruter des journalistes triés sur le volet sur des bases idéologiques, ne laissant que peu de place à des journalistes « atypiques ». Il faut revenir aux mesures du Conseil National de la Résistance :« liberté de la presse, son honneur et son indépendance à l’égard de l’Etat, des puissances d’argent et des influences étrangères ».
Attendons-nous à de nouvelles attaques de l’Union Européenne contre la Pologne et tous les pays « indociles ».
*en lettres majuscules dans la lettre