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Billet de blog 1 août 2017

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Réponse au Président Macron et à ses portes paroles quant à la démographie africaine

Le 18 juillet dernier le Monde Afrique a édité un article intitulé: « La question démographique, épée de Damoclès du développement africain ». Cet article de Jean-Paul Moatti, éminent Professeur, Président Directeur Général de l’IRD et de Jean-Marc Châtaignier, ancien Ambassadeur de France à Madagascar, Directeur général délégué de l’IRD pose de nombreuses questions sur la forme comme sur le fond.

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D’après les auteurs de l’article, le Président Macron (reprenant une thèse déjà défendue par Nicolas Sarkozy) aurait donc dit « la Vérité » sur la démographie en Afrique, que des « néomarxistes nostalgiques de Samir Amin » auraient caricaturée… Voilà une manière bien étrange et peu scientifique de défendre son point de vue que de caricaturer celui qui vous contredit !

Plus inquiétant, cet article témoigne d’un discours néomalthusien qui se développe dans le monde occidental, allant même jusqu’à reprendre la thèse de « la bombe démographique » que l’on pensait avoir enterrée dans les années 1960. Dans un contexte marqué par le drame insupportable des migrants, qui fuient avant tout la guerre ou la pauvreté, un discours simpliste et catastrophiste est évidemment porteur. Alors, on s’appuie sur toujours les mêmes « spécialistes » (Michaïlof, Garenne, Guingant…) qui depuis si longtemps assènent toujours la même thèse, dont le Monde se fait tristement l’écho régulièrement : la croissance démographique est le principal problème du développement du continent africain, et attention le pire est à venir !

Pourtant, contrairement à ce que disent ces experts, tous les travaux scientifiques ne convergent pas de façon indiscutable pour estimer que l’Afrique n’a connu pour l’heure « qu’une transition démographique tardive et limitée » et tous les démographes, sociologues ou autres économistes, y compris à l’IRD, qui s’intéressent à la question démographique ne tiennent pas le même discours et développent des analyses à la fois moins simplistes et moins orientées politiquement.

Lier le choix des femmes africaines à avoir un nombre déterminé d’enfants uniquement à l’accès au planning familial laisse songeur de la part de personnalités qui, a priori, connaissent bien les pays en développement et en particulier les pays africains. Pourtant, l’histoire a montré, en Europe, au Maghreb, en Asie…. que le nombre d’enfants décline avant tout avec le niveau de développement. Un meilleur accès au planning familial, tout comme à un système de santé efficace, accompagne ce processus mais ne le précède pas ou très rarement, sauf dans quelques dictatures ! Dans les pays d’Afrique subsaharienne, le nombre élevé d’enfants répond avant tout à une utilité sociale dans un contexte souvent de grande pauvreté. Refuser de tenir compte de cette utilité sociale se traduit généralement par des politiques de population dogmatiques inefficaces et brutales qui ne tiennent que rarement compte des femmes.

Aujourd’hui, la jeunesse africaine est un atout pour le continent mais elle a besoin d’investissements massifs dans l’éducation, dans les services publics, dans le développement d’activités économiques favorisant la croissance et l’accès à l’emploi. Dans ces conditions les femmes africaines auront la possibilité de choisir leur nombre d’enfants et l’accès au planning familial sera alors très utile.

En engageant l’Institut de Recherche et Développement pour qui « le continent (africain) ne sortira de la pauvreté qu’en donnant aux familles africaines le choix du nombre d’enfants qu’elles désirent » cet article présage-t-il de la future politique de développement du Président Macron ?

Si la France veut être un réel leader sur les ODD elle doit avant tout augmenter massivement l’aide publique au développement afin d’accompagner le développement du continent africain qui contribuera à la diminution du nombre d’enfants par femme. Malheureusement, le Président Macron vient de décider, contrairement à ses promesses, de diminuer de 140 millions d’euros en 2017 et ce n’est pas une caricature !

JP Rolland

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