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Billet de blog 11 janvier 2016

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Bowie

Ma rencontre avec Bowie n'a pas été un coup de foudre. Ce fut une relation construite par hasard et qui a pris le temps. Il faut dire que je n'ai pas connu la période faste du Thin White Duke, malédiction totale et éternelle d'une personne qui n'a pas eu 20 ans en 1970.

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Non, j'ai rencontré cet OVNI en 2002, ce Starman, cet artiste pour qui ce mot aurait très bien pu être inventé et définitivement rangé aux oubliettes de la langue française ce jour, dans le salon de mes parents. A l'époque, mon oncle, fan absolu de Bowie a reçu en prêt l'album "Heathen" et me demande de le copier sur cassette pour son auto-radio.

Pendant l'exécution de ce travail de faussaire, j'écoutais le CD, un peu interloqué et pas du tout conquis. Moi, à l'époque, j'écoutais Nirvana comme tout bon adolescent dépressif et puis Gainsbourg, pour ce qui est confessable.

Sacrilège ultime, la bande de la face A s'est coupée en plein milieu d'un morceau et j'ai même pris le temps de réenclencher la face B sans prendre le soin de mettre le CD sur pause. J'imagine que je serai puni pour ça.

En ce temps-là, je n'étais pas un grand utilisateur d'Internet, Amazon balbutiait et je n'avais de toute façon pas de carte de crédit pour commander des albums en ligne. Autre outrage, j'achetais la plupart des albums de merde que j'écoutais au GB de Wavre qui n'était pas encore devenu Carrefour. Une année s'était écoulée depuis l'histoire d'Heathen et j'avais 20€ en poches et l'envie d'acheter un CD pour me renouveler.

C'est alors que je commis le dernier crime de mon histoire avec Bowie: j'ai troqué ma thune contre un Best-of sorti chez EMI en 2002.

Mon oncle était pour moi, le summum du cool en matière de musique, voire le summum du cool tout court car il se foutait des convenances. Et moi qui étais si sage, he bien, mon oncle me fascinait. Et je trouvais inconcevable qu'un type pareil écoute un artiste moyen comme me semblait présenter Heathen. Ainsi, j'ai voulu redonner une chance à Bowie (rétrospectivement, quelle honte de parler de la sorte!).

Par la suite, l'idée d'écouter des best-of me paraîtrait saugrenue car les carrières d'artistes ne peuvent se résumer en des compilations des titres les plus rentables. Si c'est vrai pour la plupart des artistes, ça l'est encore plus pour Bowie.

Mon forfait accompli, je me souviens avoir placé la galette dans ma radio Akai et là... ma vie musicale a changé à jamais: le CD s'ouvrait avec Let's Dance, enchaînait sur Fame et Fashion et se terminait avec Slow Burn, justement extrait d'Heathen.

Quelques mois plus tard, je me procurais "The Rise and Fall of Ziggy Stardust and the Spiders from Mars" (sérieusement, a-t-on trouvé un titre aussi cool depuis? le trouvera-t-on à nouveau jamais?) uniquement parce que le titre "Ziggy Stardust" présent sur le Best-of m'interpellait. Le hasard.

Il s'agit probablement de l'album que j'ai le plus écouté dans ma vie. C'est très con de dire qu'on surkiffe cet album et je pourrais parler de la trilogie berlinoise ou de Scary Monsters pour faire genre que je m'y connais. Mais non. Moi, mon kif ça a toujours été Ziggy. Au point où, à 18 ans, quand j'écrivais des poèmes à la con, je signais Jay Stardust - comme un con que j'étais.

Et plus tard, quand je faisais un peu de théâtre, j'en avais rien à foutre de me maquiller ou de légèrement me travestir. Je le pouvais car Bowie le pouvait et ça ne posait aucun problème d'image ou d'identité sexuelle.

Et puis, j'ai un peu oublié Bowie parce que, grâce à lui, j'ai découvert Iggy Pop. Et durant mes études supérieures, je me voyais plus Iggy que Bowie. Puis j'ai aimé Tom Waits. Puis j'ai aimé les Stones. Puis j'ai aimé Dylan.

Puis vient l'année 2013, celle du retour, celle de "The Next Day". Et ce fut bon. Pas du tout comme Heathen. Vraiment, vraiment bon. Bowie parlait à nouveau de notre monde dégénéré, le mien, pas celui des années 70-80 que je n'avais pas connu. On était enfin en phase.

Et puis, il y a 2 jours, j'entends parler du nouvel album de Bowie. A ce jour, je ne l'ai pas encore écouté. Je ne sais pas si je le ferai. Peut-être pas tout de suite. Peut-être pas si vite... Je ne veux pas que ce soit le dernier. Je ne veux pas que ce soit la fin. Et pourtant. J'étais à Ottignies quand j'ai appris la nouvelle, à quelques kilomètres à peine du salon de mes parents où j'ai appris son existence la première fois.

Ce soir, écoutant une programmation radiophonique spécialement estampillée Bowie, je pensais à tout ce que je voulais écrire ici. A quel point Bowie m'a accompagné dans la vie (j'écoutais Ziggy Stardust quand j'ai abîmé ma voiture pour la première fois), à quel point il y a en moi, comme en tous ceux qui l'aimaient, un peu de Bowie.

Il est dans certains mots que j'écris. Il est dans la façon dont je visse mon chapeau sur mon crâne. Il est dans la façon dont j'arrive à me moquer de moi et du monde. Il est dans ma tolérance envers les personnes et les cultures différentes. Il est dans le monde et il est en dehors du monde. Il est l'essence même de la folie humaine.

Il me reste tant à dire et puis finalement si peu. Même si je ne peux pas, je fume une cigarette, parce que c'est si simple: "Tu tires sur un doigt, puis un autre doigt, puis sur ta cigarette".

Si je n'avais pas rencontré Bowie, je ne serais pas entièrement qui je suis. Merci Monsieur David Bowie.

Just turn on with me, and you're not alone
Let's turn on and be not alone
Gimme your hands, 'cause you're wonderful
Gimme your hands, 'cause you're wonderful
Oh, gimme your hands

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