Elle étaient.
Parce qu’à la minute où chaque adulte abandonna ses rêves d’enfant, une étoile disparu. Dorénavant, l’humain ne rêvait plus. La technologie était à ce point développée que les capacités humaines avaient muté.
Les GPS avaient causé la fin du sens de l’orientation. Les papilles gustatives s’étaient atrophiées car la nourriture industrielle était dorénavant fabriquée à base d’extraits de matières synthétiques, reproduites via imprimante. L’EZ56, c’était le goût de poulet. La lumière des écrans avaient réduit la vision : sans l’implant correcteur placé à la naissance, l’être humain était complètement aveugle.
L’intelligence d’un super-ordinateur, l’instinct d’une poule.
La poule, disait le Dr Schwartz, était le nom donné à la femelle de certaines espèces d’oiseaux. Au début du siècle, quand elle existait encore, cette espèce était principalement élevée pour les oeufs qu’elle pondait. D’après les livres d’histoire, les oeufs entraient dans la composition de nombreux plats. Leur goût était, parait-il, proche du composant EZ89.
L’amour était devenu un sentiment synthétique. Egalement implanté dès les premiers jours de vie du nourrisson, il était dorénavant concentré, non sur une autre personne mais sur la Cité.
L’éducation était minimale, les budgets étant plus volontiers consacrés à l’industrie, l’armement de la milice de répression des émotions et les régulateurs de température corporelle, l’environnement étant devenu hostile et ostensiblement trop chaud pour la fine peau humaine.
Tous les matins, nous devions prendre la pilule délivrée par les autorités. Officiellement de l’iode. Pour une raison que j’ignore, mon corps n’a jamais réussi à l’ingérer. Une fois dans l’oesophage, elle était irrémédiablement rejetée.
J’ai toujours su que c’était pour ça qu’il restait une seule et unique étoile dans le ciel. Elle était apparue quand j’étais enfant. Quand le Dr Schwartz nous avait parlé des poules. Parce qu’aussi loin que je m’en rappelle, j’ai toujours rêvé d’en toucher une.