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Billet de blog 30 décembre 2015

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Bonne année?

Dans quelques jours, nous nous souhaiterons timidement une bonne année. Simple tradition? Traduction d'un espoir? Auto-hypnose?

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Cette année, les écarts de notre société duale se sont encore agrandis: les riches sont encore plus riches, les pauvres toujours plus pauvres et puis, la classe moyenne... et bien, cette classe moyenne glisse vers le bas de l'échelle plutôt que vers le haut. Mais il parait qu'il faut défendre ce modèle de société.

Dans certains classements, la Belgique occupe le 3e rang des pays les plus prospères. Et pourtant, je n'ai jamais vu autant de personnes démunies que cette année. Je n'avais jamais entendu autant de récits de jeunes et de familles dans la galère, luttant pour se chauffer, manger et rester dignes.

Parce qu'il ne s'agit pas d'aller bien, de concrétiser des rêves ou même d'en conceptualiser, non, le combat est celui de la dignité.

Et ces personnes doivent dire "merci". De quoi se plaignent-elles? Puisqu'on vous dit que tout va bien. Si elles le voulaient vraiment, elles pourraient "s'insérer", avoir un "projet", si seulement elles étaient "flexibles".

Peut-être se plaignent-elles que proportionnellement, cette année, elles ont encore payé plus d'impôts que des multinationales prospères, dont certaines se sont payées le luxe de licencier du personnel tout en offrant des dividendes aux actionnaires.

Peut-être se plaignent-elles que la classe politique ait encore une fois, quelque soit le parti et le niveau de pouvoir, œuvré à leurs propres intérêts et ceux de leurs amis du monde de la finance. Peut-être se plaignent-elles que des parlementaires grassement payés et déconnectés de toute réalité sociale aient encore une fois décidé de mesures faisant porter aux citoyens les plus pauvres les errements du modèle de société qu'il est de bon ton de défendre encore plus depuis le 13 novembre.

Parce que cette année, on a été Charlie, le Thalys et Paris mais très peu ont aussi été le Nigéria, le Mali et la Syrie.

Cette année, nos hommes et femmes politiques ont joué la carte de la continuité: enseignement, climat, mobilité, pouvoir d'achat, emploi ("jobs, jobs, jobs") et j'en passe, ils n'ont absolument rien réglé. Comme des jobards, jobards, jobards, ils ont fait comme d'hab': ils ont noyé le poisson, le bébé et les électeurs avec l'eau du bain. C'est de notre faute aussi, on s'obstine à choisir des élus politiques dans des listes dont on ne choisit pas la composition. Et quand le candidat qui nous plaît bien obtient un certain résultat, il s'allie avec le candidat qui est tout son opposé. Et on ferme nos gueules puisque la démocratie a parlé.

On devait sortir du nucléaire: on y replonge avec des centrales grabataires; on devait prendre des décisions majeures pour le climat: on remet ça aux générations futures. Car cette année, on a fait comme les précédentes, nous nous sommes jetés sur les réserves de pétroles comme de vieux junkies à la recherche de la dernière veine.

Mais de tous les problèmes que les hommes et femmes politiques n'ont pas réglés, le climat c'est celui qui compte le moins au fond, parce que quand la température moyenne aura augmenté à un niveau létal, en même temps que le niveau de la mer et que les catastrophes naturelles auront raison de l'humanité, la planète ne se sera sans doute jamais aussi bien portée.

Mais en attendant, on surconsomme. On se bat littéralement pour des vêtements vendus par la pire multinationale du monde dans ce secteur d'activité, on passe de smartphones en smartphones sans se soucier des petits africains qui se saignent pour récolter le coltan, pierre rare qui rentre dans la fabrication des merdes plastiques et métalliques que l'on trimballe comme une pâle extension de nos mains et on laisse la marque de soda rouge et blanc creuser toujours plus loin les nappes phréatiques pour inonder le monde de son précieux or noir saturé de sucre.

Tout va bien. Les gamins ne savent plus réciter un poème mais ils connaissent par cœur toutes les pubs de la télé. Ne réfléchissez pas. Allumez la télé. Allumez votre tablette en même temps. Regardez les médias officiels et subventionnés et répétez après moi: tout va bien. Ce n'est pas grave qu'on ait des images filmées et des pistes audio de nos dirigeants en train de faire le contraire de ce qu'ils disent. Chut. Consommez. C'est Noël, merde, soyez heureux, demain c'est la St-Sylvestre, vous n'allez quand même pas penser.

Penser aux syndicats par exemple, avec le beau concert qu'ils nous ont concocté après la manifestation de 7 octobre. Vous vous souvenez, celle qui devait changer les choses, celle où on allait dire qu'on n'était vraiment vraiment pas content. Oulala, qu'on était fâchés du côté des syndicats. Le Gouvernement a tremblé de rire puis les syndicats ont entamé des grèves tournantes dans les Provinces du beau Royaume de Belgique. En fait de tournantes, ce sont nos élus qui les ont faites apparemment parce que nous, on s'est bien fait baiser le droit de faire des piquets de grèves, le droit de payer notre électricité à une TVA acceptable, le droit de prendre notre pension à un âge qui nous permettra de profiter encore de la vie. Mais les syndicats sont fâchés. Et ils nous défendent même jusqu'au Cercle de Lorraine. La classe à Dallas.

Mais dans quelques jours, moi aussi je souhaiterai la bonne année autour de moi. Pour faire plaisir à la grand-mère, pour faire bien en société. Mais surtout, je la souhaiterai bonne à une poignée d'hommes et de femmes qui font partie de mon quotidien et qui sont porteurs de deux choses.

La première est le sentiment de rébellion intense contre ce système profondément injuste et anti-humain dans lequel nous vivons. Cet écœurement pour ce théâtre quotidien qui pousse ces personnes à qui je souhaiterai une excellente année au refus de la mascarade politique, médiatique et économique qui ose parler de crise financière alors que nous n'avons jamais autant produit de richesses. Cet écœurement qui les pousse à agir, au quotidien, simplement en expliquant cela à ceux qui ne le voient pas ou en refusant de croire les mensonges qu'on cherche à nous faire avaler.

A tous ces résistants ordinaires, ces héros sans costume, sans épée et sans médaille, je souhaite une magnifique année 2016.

La deuxième est l'amitié qui permet de sortir de l'individualisme qui caractérise notre époque. A ceux qui m'ont offert ou qui ont continué d'avoir la gentillesse et la patience de m'offrir leur amitié, je souhaite une année 2016 au-delà de vos espérances.

Et enfin, à ceux qui ne sont pas d'accord avec moi, et bien, je vous souhaite également une excellente année 2016 parce que nous vivons tous ensemble sur cette planète qui a bien du mal à nous supporter et si on doit s'en sortir, ce sera tous ensemble, au-delà des opinions politiques, des religions et de nos milieux socio-économiques.

Mais par contre, je souhaite une année dégueulasse mais vraiment dégueulasse à tous les hommes politiques, les dirigeants syndicaux, les racistes, les fascistes, les nationalistes, les magnats de la presse, les boursicoteurs, les banksters, les grands patrons de multinationales, les lobbyistes de tout bord, les marchands d'armes et les militaires.  

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