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Billet de blog 20 janvier 2025

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Résister pour survivre

L'Europe est à l’heure du choix. Le monde est dominé par les extrêmes, avec Donald Trump au pouvoir et les BRICS en ascension, tandis que l’Europe se fragmente. Face à cette dérive, l’Europe doit choisir la résistance : unifier ses forces autour de la transition écologique, de l’autonomie énergétique et d’une diplomatie pragmatique pour retrouver sa place et son prestige sur la scène mondiale.

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Nous y sommes. Le spectre des extrêmes domine aujourd’hui la scène mondiale, reléguant le rêve démocratique à un écho lointain. Le 20 janvier 2025, Donald Trump reprend le pouvoir aux États-Unis, fort d’une stratégie aiguisée et d’une vision qui menace l’équilibre mondial. Pendant ce temps, l’Europe s’enlise, paralysée par ses divisions et son incapacité à construire un avenir à la hauteur des enjeux contemporains. Pourtant, face à ce bouleversement global, une question persiste : allons-nous nous résigner ou choisir de résister ?

La crise du COVID-19 avait diffusé un espoir : celui d’un « monde d’après » plus juste, solidaire et respectueux des limites planétaires. Mais cet espoir s’est évanoui. Les politiques publiques continuent de feindre une maitrise qu’elles n’ont jamais eue, perpétuant ainsi un modèle économique désastreux et destructeur. Le « monde d’après » ressemble furieusement au « monde d’avant » — en pire.

Dans cet univers déséquilibré, les populismes prospèrent. Soutenus par des puissances économiques et diplomatiques redoutablement efficaces, ils imposent des visions simplistes à des populations désillusionnées. La jeunesse, minée par le harcèlement en ligne et l’effondrement de la crédibilité médiatique, en paie un lourd tribut.

L’ascension de Trump et le renforcement des BRICS marquent un tournant. Ces acteurs, unis par une vision opportuniste et autoritaire, se posent en alternatives au modèle occidental en déclin. Ils poursuivent des politiques commerciales agressives et destructrices, accentuant les inégalités sociales et les ravages écologiques. L’Europe, pendant ce temps, se fragmente et perd son poids sur l’échiquier mondial.

Mais tout n’est pas perdu. L’Europe peut éviter de sombrer à condition d’agir vite et avec ambition. L’Europe doit s’unir, ou périr par nécessité vitale. Cette union doit reposer sur des piliers clairs. Autonomie énergétique et technologique : investir massivement dans des énergies propres et des solutions innovantes pour réduire sa dépendance aux puissances extérieures. Transition écologique : opter/soutenir une agriculture biologique, mettre en place des politiques à faible émission de carbone et faire de la sobriété un modèle de prospérité durable. Renforcer le modèle social : étendre et moderniser le modèle social européen pour assurer une éducation, une santé et des retraites de qualité, tout en valorisant l’immigration comme une force pour l’avenir. Notre société vieillit, il est donc temps de se pencher sérieusement sur un véritable projet d’immigration. Diplomatie pragmatique : adopter une approche lucide face à des adversaires stratèges, comme la Chine et la Russie, qui sont performants en géostratégie de ressources, tout en redéfinissant ses alliances.

L’Europe doit admettre une vérité douloureuse : elle n’a jamais été riche, mais elle a connu la prospérité en puisant dans les ressources extérieures, qui se tarissent. Cette prise de conscience est la clé pour bâtir un modèle structuré et désirable pour d’autres puissances mondiales, et créer un atout de compétitivité. La sobriété, loin d’être une régression, peut devenir un levier de puissance. La sobriété que nous devons adopter sera imposée au monde entier. En ce moment, l’Europe pourra retrouver sa place.

Face à la montée des extrêmes et à l’épuisement du modèle actuel, l’Europe doit choisir la résistance. Une résistance ambitieuse, ancrée dans ses valeurs fondatrices, mais résolument tournée vers l’avenir. C’est seulement de cette manière qu’elle pourra retrouver sa place sur la scène mondiale en tant que porteur d’un projet collectif capable de relever les défis du siècle.

L’Europe peut retrouver son prestige, mais pas en cédant au libéralisme consumériste et antidémocratique. Elle doit résister et mener un projet nouveau, adapté à un monde qui a déjà atteint ses limites.

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© Gaston Riou

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