Cet article s'inscrit dans le débat actuel portant sur la définition du corps électoral en Kanaky-Nouvelle-Calédonie (en abrégé KNC [1]). La KNC est un territoire français depuis 1853. L’archipel est considéré par l’ONU comme un territoire non autonome[2]. Dès la prise de possession par la France en 1853, des politiques de colonisation de peuplement ont été planifiées, façonnant une véritable « mosaïque pluriethnique »[3].
En 2019, la population autochtone kanak ne représentait plus que 41% de l’ensemble des habitants, le reste de la population se répartissant entre communautés européenne, vietnamienne, wallisienne et futunienne, métisse[4]… Au cœur du « processus de décolonisation négocié » qui se joue depuis des décennies, une question récurrente se pose : « qui vote ? » [5].
Qui peut voter lors des consultations d’autodétermination (oui ou non à l’indépendance), qui peut élire les représentants provinciaux ? Cette question fait apparaitre une tension entre le principe du suffrage universel, combiné avec l’égalité devant la loi, et le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. En effet, un élargissement du corps électoral accentuerait la marginalisation du peuple kanak, mettant en péril son droit à l’autodétermination.
Une réponse originale et temporaire avait été apportée à cette question dans le cadre des accords de Matignon (1988) et de Nouméa (1998). Trois listes électorales distinctes avaient été consacrées pour différentes élections : le corps électoral général (municipales, législatives nationales, présidentielles et européennes), le corps électoral provincial (Congrès et assemblées de Province) et le corps électoral pour les consultations d’autodétermination[6]. Les accords précités ont permis l’organisation de trois consultations portant sur l’autodétermination (2018, 2020, 2021) : le « non » à l’indépendance l’a emporté par trois fois[7].
A l’issue de ce processus, le débat sur les délimitations du corps électoral a resurgi. C’est dans ce contexte que le gouvernement français a introduit en 2024 un « projet de loi constitutionnelle portant modification du corps électoral pour les élections au Congrès et aux assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie » (c’est-à-dire une modification du corps électoral provincial).
Le projet de loi de 2024: analyse du discours du Ministre de la Justice
Le 13 mai 2024, M. Éric Dupond-Moretti défendait le projet de loi modifiant le corps électoral provincial en Nouvelle-Calédonie comme suit:
« Le projet de loi constitutionnelle […] garantit que les prochaines élections au Congrès et aux assemblées de province se tiendront avec un corps électoral conforme aux exigences juridiques et démocratiques de notre pays. […] le régime dérogatoire au droit électoral commun doit être repensé. Il y va de sa conformité avec les grands principes constitutionnels : l'égalité devant la loi, le caractère universel du suffrage et le droit de tous les citoyens à concourir personnellement, ou par l'intermédiaire de leurs représentants, à la formation de la loi. Il n'est pas du tout certain que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) juge, en 2024, que le gel du corps électoral restreint est conforme aux engagements conventionnels de notre pays ».
En conclusion du discours : « Il y va de la démocratie calédonienne et, au-delà, de la démocratie sur l'ensemble du territoire national »
L’interventions du Ministre concerne le droit de voter et d’être élu, sans discrimination (soit la traduction juridique du principe du suffrage universel). Ce droit est consacré par l’article 25 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et au niveau national par les articles 2 et 3 de la Constitution française.
Pour répondre à la question « qui vote ? », le Ministre semble se demander : « Qu’est-il légal de faire dans cette situation ? ».
Plusieurs critiques peuvent être formulées contre la prise de position du Ministre.
Critiques contre le discours du Ministre de la Justice
Le chemin d’argumentation que nous proposons peut se résumer comme suit : dévoiler la pyramide, entrer dans la pyramide, s’échapper de la pyramide, pour présenter un « au-delà » de la pyramide. Le premier point n’est pas une critique du discours ministériel, mais plutôt une explication de son fondement théorique.
Dévoiler la pyramide: le raisonnement du Ministre
Dupond-Moretti présente le débat en des termes juridiques : pour répondre à la question « qui vote ?», le Ministre s’est tourné vers le droit et présente le projet de loi comme « conforme aux exigences juridiques […] de notre pays» et revendique sa « conformité avec les grands principes constitutionnels » et les « engagements conventionnels de notre pays ».
Dans ce discours, le Ministre adopte une approche de dogmatique juridique, en se cantonnant dans le rôle de juriste positiviste, dont le rôle serait d’interpréter et d’appliquer objectivement des normes juridiques dans un cas particulier[9].
Au niveau théorique, M. Dupond-Moretti présente une vision du droit inspirée par le monisme juridique. Cette théorie, développée notamment par Hans Kelsen, insiste sur le rôle de l’Etat comme source exclusive du droit[10]. Selon cette conception, le droit est unique et son application uniforme[11]. L’image de la pyramide normative est souvent employée pour présenter schématiquement cette théorie : au sommet de la pyramide, les normes fondamentales (Constitution, traités internationaux…) et, aux échelons inférieurs, la loi, les décrets d’application, chaque norme tirant sa validité de la norme supérieure[12].
Juriste de formation, M. Dupond-Moretti offre dans l’extrait commenté une application parfaite (en apparence) de cette théorie pure du droit : le projet de loi est justifié et inspiré par les normes supérieures (Constitution, engagements internationaux) et rompt avec un « régime dérogatoire » local qui méconnaissait les étages supérieurs de la pyramide. Dans ce sens, le projet de loi viserait à abolir une anomalie contraire aux normes supérieures et rétablirait l’application uniforme du droit. Contre ce discours, une première critique consiste à « rentrer dans la pyramide », assumant de jouer selon les règles du Ministre, pour démontrer que la tension existe dans le droit.
Entrer dans la pyramide: identifier la tension au sommet du droit
Cette première critique accepte les fondements théoriques du monisme juridique présentés ci-dessus. Il s’agit à ce stade de montrer que la réponse juridique à la question « qui vote ? » en KNC devrait mobiliser d’autres droits et principes du même rang normatif. L’ouverture du corps électoral aurait pour effet de diminuer le poids du peuple kanak dans les organes provinciaux. Dans cette mesure, il est raisonnable de considérer qu’une telle ouverture entre en tension avec le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, reconnu par les instruments cités ci-dessous[13].
Comme indiqué ci-avant, le Ministre de la Justice présente le projet de loi comme étant fondé sur des normes supérieures. Les normes supérieures qu’il cite sont : l’égalité devant la loi (c’est-à-dire l’interdiction de la discrimination)[14] et le principe du suffrage universel[15].
Toutefois, les instruments juridiques auxquels se réfère le Ministre (Constitution française, CEDH et PIDCP) recèlent d’autres droits et principes, qui entrent en tension avec le suffrage universel et l’interdiction de la discrimination. La Constitution française reconnait dans son préambule le principe de la « libre détermination des peuples » tandis que le PIDCP consacre en son article 1er le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, en précisant que « les Etats […] qui ont la responsabilité d’administrer des territoires non autonomes […] sont tenus de faciliter la réalisation du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, et de respecter ce droit »[16].
Quant à l’invocation d’une éventuelle incompatibilité de la limitation du corps électoral provincial avec la CEDH, il faut rappeler ici que le gouvernement français a défendu, avec succès, sa légalité devant la Cour EDH[17].
Au vu de ce qui précède, la tentative du Ministre d’identifier des normes supérieures, à l’aune desquelles il faudrait mettre en conformité un particularisme local, se révèle incomplète. En restant dans le registre de la technique juridique, l’identification d’autres droits et principes jouissant du même rang juridique rappelle l’existence de la tension et permet de critiquer la validité juridique de l’énoncé de M. Dupond-Moretti.
La pyramide n’est donc pas le monolithe qu’elle semblait être au premier abord : vu de près, son sommet s’avère être fendu. L’approche positiviste du Ministre est donc sérieusement remise en question par cette critique : il semble impossible qu’un juriste-interprète lise rationnellement la pyramide pour y déceler une réponse univoque à la question « qui vote ? ».
Et si, au fond, la mise en évidence de cette tension ouvrait la voie à une autre manière de répondre à la question : ne plus chercher à « conformer » une anomalie locale au regard d’un droit supérieur et universel, mais plutôt « inventer », à partir d’une contradiction réelle ? Accepter que la réponse n’est pas à trouver, comme si elle était inscrite quelque part, mais qu’elle est à construire ? Et si, pour reprendre la théorie critique de Charles Chaumont, la contradiction était la source même du droit ? Il faut ici suivre la fissure, pour tenter de s’échapper de la pyramide.
Un chemin pour sortir de la pyramide : la contradiction comme source du droit
Comme nous le disions ci-dessus, le Ministre veut répondre à la question « qui vote ? », en cherchant à conformer « un régime dérogatoire au droit électoral commun » au regard d’un droit supérieur univoque. Ce faisant, la théorie présentée ci-dessous pourrait lui opposer la critique de vouloir « camoufler » unilatéralement la contradiction.
Charles Chaumont a développé une théorie dialectique des normes de droit international. Cette théorie place la contradiction au cœur du droit et indique que la norme juridique peut avoir plusieurs fonctions: « camoufler ces contradictions, soit de les mettre entre parenthèses, soit de les surmonter »[18]. Ces fonctions seraient chacune « l’expression momentanée de la solution de ces contradictions »[19].
La norme de droit apparait donc comme une formalisation de l’accord temporaire entre des volontés hétérogènes et des intérêts divergents. Selon cette pensée, la contradiction est précisément ce qui oblige les Etats à aboutir à la norme juridique : l’existence d’une contradiction est le fondement de la norme[20].
Quant à l’existence de principes juridiques universellement reconnus (jus cogens), tels que la souveraineté, l’égalité et le droit à l’autodétermination, le juriste explique qu’ils sont caractérisés par leur relativité (aucun des principes universels n’est supérieur à un autre) et leur généralité (il s’agit de « principes abstraits, détachés des conditions réelles, [qui] se heurtent, dès qu’ils sont appelés à servir concrètement, aux contradictions de la réalité »)[21].
Suivant cette théorie, la norme promue par le Ministre apparait comme une tentative de masquer la contradiction. Toutefois, d’autres attitudes sont possibles, comme celles de « mettre entre parenthèses » ou celle de « surmonter » la contradiction. Par le passé, l’action de la France a pu se rapprocher de ces deux dernières attitudes, allant jusqu’à faire preuve d’une créativité institutionnelle qui se rapproche du pluralisme juridique. Ces considérations nous emmènent « au-delà de la pyramide », à la recherche d’un nouveau modèle.
Au-delà de la pyramide: les pluralismes juridiques et le rhizome
L’approche moniste du Ministre rompt avec certaines pratiques observables en KNC que l’on pourrait rattacher au pluralisme juridique[22]. Ces théories insistent sur la diversité normative : pluralité des sources de droits, multiplicité des interprétations et applications, articulations mouvantes entre normes…[23].
Pour reprendre une image, le pluralisme pourrait avoir pour modèle le rhizome. La notion de rhizome a été conceptualisée par les philosophes Gilles Deleuze et Félix Guattari, comme un système connecté, acentré, hétérogène, non-hiérarchique, multiple[24]… Les auteurs donnent des exemples très divers de rhizomes : bulbes, terriers, meute de rats, cerveau, ou encore Amsterdam, « ville pas du tout enracinée, ville-rhizome avec ses canaux-tiges »[25]. Ce modèle rhizomatique est opposé de manière dialectique à « l’arbre-racine » ; le modèle arborescent qui fixe un point et un ordre[26]. La pyramide de Kelsen peut être vue comme une application juridique du modèle arborescent : verticale, hiérarchique, organisée, univoque…
Suivant ces modèles, l’arbre-racine serait caractérisé par la transcendance, tandis que le rhizome serait davantage un « processus immanent »[27]. Deleuze et Guattari voient l’omniprésence de l’arbre dans la pensée occidentale comme une « maladie proprement européenne »[28]. On pourrait rattacher l’idéologie universaliste à cette volonté de transcendance propre à « l’arbre », typiquement européenne[29].
Pour revenir à l’exemple qui nous occupe, nous pensons que le système juridique de la KNC se rapproche par certains aspects du modèle pluraliste rhizomatique[30]. Quel est l’intérêt d’une telle démonstration ? La mise en lumière d’autres pratiques existantes permet d’affiner encore notre critique de la position du Ministre ; il n’est pas si contraint qu’il ne voudrait le laisser croire. Un autre modèle existe et il n’est pas irréaliste ou utopique : on peut trouver des applications de celui-ci dans l’archipel.
En effet, l’originalité de l’archipel peut s’observer dans la Constitution française : le territoire dispose d’un statut sui generis[31], sa singularité s’imposant jusque dans la norme fondamentale. Ce statut a permis le développement d’institutions démocratiques inédites, à la croisée des traditions juridiques européennes et de la culture kanak : un Congrès, un Sénat coutumier, le conseil économique et social, les conseils coutumiers…
Au-delà des institutions, la pluralité s’observe aussi dans la vie civile : l’accord de Nouméa (1998) a reconnu la coexistence d’un statut civil coutumier (inspiré des pratiques kanak) et d’un statut civil « de droit commun » (celui prévu par le droit français classique)[32].
Aussi, en proclamant l’existence d’une « souveraineté partagée », l’accord de Nouméa introduit la multiplicité au cœur d’un concept traditionnellement exclusif[33]. Comme nous le mentionnions au début de ce texte, l’indétermination et le multiple est présente jusque dans le nom de l’archipel : que dire, Nouvelle-Calédonie, Kanaky, Kanaky-Nouvelle-Calédonie ? Signalons aussi que la collecte de données statistiques sur base de critères ethniques est autorisée en KNC, alors que ce type d’étude est interdit dans le reste de la France, au nom du principe constitutionnel d’égalité[34]. Enfin, le cas des trois corps électoraux, imbriqués, mouvants, se superposant, illustre cette idée d’un droit rhizomatique.
Comme on le voit, l’archipel expérimente depuis des décennies un système juridique inédit qui semble éloigné du modèle de la pyramide ou de l’arbre. Ce système plus fluide et décentralisé a redéfini des concepts fondamentaux de l’ordre juridique traditionnel : la souveraineté, le corps électoral, le peuple… Certains de ces compromis locaux « par le bas » (pour reprendre un vocabulaire moniste pyramidal) ont ensuite intégré la norme fondamentale française. Dans ce contexte, le retour d’une conception verticale dans le discours du Garde des Sceaux, cherchant à imposer une norme universelle « par le haut », peut être critiqué comme une rupture avec l’approche passée de la France : l’arbre-pyramide tente d’écraser le rhizome.
Conclusion : l’étroit chemin de la créolisation
Au terme de ce cheminement, qui nous a mené des abords de la pyramide à son cœur, pour mieux en sortir en suivant ses failles et s’en éloigner, une conclusion s’impose : d’autres solutions et d’autres manières d’appréhender la tension sont possibles. Et la réponse à la question « qui vote ? » nous amène en réalité vers une autre interrogation : comment vivre et décider ensemble ?
Un chemin nous parle tout particulièrement, celui tracé par les auteurs antillais de la créolisation (Bernabé, Chamoiseau, Glissant et Confiant)[35]. Dans le contexte caribéen, la créolisation est une riposte contre la violence de l’histoire qui consiste à « réinventer des nouvelles manières de vivre en hybridant les diverses façons de penser, cuisiner, aimer, prier, bâtir, habiter, soigner… » (et pourquoi pas de décider/voter)[36].
Glissant emprunte à Deleuze et Guattari l’image du rhizome pour qualifier cette identité-multiple créole, la « racine-multiple », par opposition à « l’identité-racine-unique »[37]. Conformément aux caractéristiques du rhizome, les auteurs ne cherchent pas à figer le concept de créolisation, et le qualifient d’imprévisible, de « spécificité ouverte », de « totalité kaléidoscopique » [38].
Selon cette vision créole, la culture n’est pas un achèvement, mais « une dynamique constante chercheuse de questions inédites, de possibilités neuves, qui ne domine pas mais qui entre en relation, qui ne pille pas mais qui échange »[39].
Pourrait-on imaginer qu’une solution politique inspirée par ce concept émerge en KNC[40] ? Pourrait-on imaginer que la logique proto-rhizomatique des institutions de la KNC soit valorisée et amplifiée ? Pourrait-on espérer que ce processus fasse émerger un universalisme « immanent » ?
La créolisation est un processus complexe qui requiert plus qu’un simple dialogue. En effet, Glissant identifie les nécessaires « conditions d’épanouissement » du processus, au premier rang desquelles il place la reconnaissance de l’équivalence entre les éléments culturels en présence[41]. Au vu de l’actualité de l’archipel, cette condition semble loin d’être atteinte, et la créolisation parait utopique. Le lugubre discours du 14 juillet 2024 de la cheffe de file des loyalistes, Sonia Backès[42], sonne plutôt comme un manuel « d’anti-créolisation » :
« Au même titre que l'huile et l'eau ne se mélangent pas, je constate à regret que le monde kanak et le monde occidental ont, malgré plus de 170 années de vie commune, des antagonismes encore indépassables. […]. Qu'il s'agisse de leur manière de vivre en société, par la place qui est faite aux femmes par exemple. Qu'il s'agisse encore de leurs systèmes politiques, féodal pour les uns et démocratique pour les autres [ou le] rapport à l’économie, communautaire pour les uns, capitaliste pour les autres. […]. Lorsque deux forces s'opposent et que deux camps sont persuadés de défendre légitimement leurs valeurs, ils se retrouvent face à un choix. Celui de s'affronter jusqu'à la mort de l'un des deux ou de se séparer pour mieux vivre »[43].
Face à l’alternative mortifère présentée (l’extermination ou l’apartheid), il faut espérer que l’archipel empruntera un autre chemin : il existe, mais il est étroit.
[1] Nous utiliserons l’abréviation « KNC » dans la suite de ce travail.
[2] Voyez la liste des territoires non-autonome : https://www.un.org/dppa/decolonization/fr/nsgt.
[3] P. RIVOILAN, « La croissance démographique fléchit nettement en Nouvelle-Calédonie entre 2014 et 2019 », Insee Première, n°1823, octobre 2020, disponible sur www.insee.fr. Pour un détail des différentes vagues de colonisation, voy. S. GRAFF, « Colonisation de peuplement et autochtonie : réflexions autour des questions d’autodétermination, de décolonisation et de droit de vote en Nouvelle-Calédonie », Mouvements, La Découverte, 2017/3, n°91, pp. 25-26.
[4] Statistiques INSEE-ISEE, recensement de la population de 2019, voy. P. RIVOILAN, ibid., fig. n°5. Voy. aussi C. DAVID, « Les élections de mai 2014 dans le contexte d’autodétermination en Nouvelle-Calédonie », Colloque PIPSA 2014, 2014, Papeete (Polynésie française), pp. 2-4, compte-rendu disponible sur www.hal.sc.
[5] S. BLAISE, C. DAVID et G. PRINSEN, « Pour un réexamen des concepts de ‘décolonisation, indépendance et souveraineté’ au prisme de l’expérience néocalédonienne », Journal de la Société des Océanistes, n°155, 2022, p. 327.
[6] Voyez le site du Haut-Commissarait de la République en Nouvelle-Calédonie pour une présentation détaillée : https://www.elections-nc.fr/les-listes-electorales/les-3-listes-electorales/la-lesp.
[7] Haut-Commissariat de la République en Nouvelle-Calédonie, résultats officiels des référendums de 2018, 2020 et 2021, disponibles sur www.nouvelle-caledonie.gouv.fr/.
[8]Déclarations de MM. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice, et Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer, sur le projet de loi constitutionnelle portant modification du corps électoral pour les élections au Congrès et aux assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie, à l'Assemblée nationale le 13 mai 2024, disponible sur le site Vie Publique : https://www.vie-publique.fr/discours/294130-eric-dupond-moretti-gerald-darmanin-13052024-nouvelle-caledonie.
[9] O. CORTEN, « Sociologies du droit », Dalloz, Paris, 2023, p. 45.
[10] O. CORTEN, ibid., p. 291 ; Y. SENECHAL et P. NOREAU, « Introduction : pluralisme juridique et cultures juridiques dans les sociétés contemporaines », Revue générale de droit, n°49/2, 2019, p. 433.
[11] O. CORTEN, ibid., p. 23.
[12] Pour une représentation de la pyramide, voyez le site suivant : https://www.les-philosophes.fr/contributions/kelsen-et-la-pyramide-des-normes.html
[13] Voyez notamment l’avis du professeur Marcelo KOHEN sur « la licéité internationale du projet de loi constitutionnelle relatif au « dégel » du corps électoral », disponible sur le site : https://larje.unc.nc/fr/commentaire-sur-lavis-de-droit-de-marcelo-kohen-sur-la-liceite-internationale-du-projet-de-loi-constitutionnelle-relatif-au-degel-du-corps-electoral-rendu-public-par-le-flnks/.
[14] Un droit reconnu notamment par le préambule et l’article 1er de la Constitution française, l’article 14 CEDH et l’article 26 PIDCP.
[15] Un principe consacré par l’article 3 de la Constitution française, par une combinaison de l’article 3 du 1er protocole de la CEDH (« droit à des élections libres ») et de l’interdiction générale de la discrimination, et l’article 25 PIDCP.
[16] Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes est également consacré par l’article 1.2 de la Charte des Nations-Unies, par la « Déclaration sur l'octroi de l'indépendance aux pays et peuples » (résolution 1514 de l'Assemblée générale de l'ONU du 14 décembre 1960). Les droits des peuples autochtones sont aussi protégés par la « Déclaration sur les droits des peuples autochtones » (résolution 61/295 du 13 septembre 2007). L’ensemble de ces instruments lie la France.
[17] Voyez l’arrêt Cour E.D.H., Py Bruno c. France, 11 janvier 2005, §64 et 65. Il est difficile ici de ne pas dénoncer la posture du Ministre la Justice, qui semble s’inquiéter d’une hypothétique violation de la CEDH, alors qu’il n’a jamais dénoncé le fait que le Ministre de l’Intérieur revendique ouvertement la violation répétée d’arrêts bien réels de la Cour EDH, en matière d’expulsions d’étrangers (voy. l’article https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/12/12/gerald-darmanin-epingle-pour-avoir-expulse-un-ouzbek-en-violation-d-une-mesure-prescrite-par-la-cedh_6205349_3224.html).
[18]J.-D. MOUTON et B. SIERPINSKI, « La pensée juridique de Charles Chaumont », Civitas Europa, 2015/2 n° 35, p. 218.
[19] J.-D. MOUTON et B. SIERPINSKI, ibid., p. 218.
[20] J.-D. MOUTON et B. SIERPINSKI, ibid., p. 219.
[21] J.-D. MOUTON et B. SIERPINSKI, ibid., pp. 219-221.
[22]Sur la tension entre le monisme et les pluralismes juridiques, voy. O. CORTEN, op.cit., pp. 265-322.
[23] O. CORTEN, ibid., p. 23
[24] G. DELEUZE et F. GUATTARI, « Capitalisme et schizophrénie 2 : Les Milles Plateaux », Editions de Minuit, Paris, 1980, pp. 12-20 et pp. 36-37.
[25] G. DELEUZE et F. GUATTARI, ibid., p. 13 et p. 24.
[26] G. DELEUZE et F. GUATTARI, ibid., p.11 et p. 13. Voyez la p. 31 : « Nous n'invoquons un dualisme que pour en récuser un autre. Nous ne nous servons d'un dualisme de modèles que pour atteindre à un processus qui récuserait tout modèle ». C’est en ce sens que nous parlons d’un modèle « au-delà » de la pyramide, et non pas « contre ».
[27] G. DELEUZE et F. GUATTARI, ibid., pp. 30-31.
[28] G. DELEUZE et F. GUATTARI, ibid., pp. 27-28.
[29] Sur l’idéologie universaliste, voy. E. LEFORT, Notes du cours de philosophie des droits humains, cours 2 et 3, pp. 12-13. Voy. aussi le tableau des oppositions conceptuelles classiques, powerpoint « introduction », p. 7.
[30] Il est d’ailleurs intéressant de voir que G. DELEUZE et F. GUATTARI décrivent le rhizome comme un modèle traditionnellement plus oriental ou océanique.
[31] Cette expression latine est largement utilisée pour qualifier l’archipel et se définit, en français, comme suit : « terme latin de droit, signifiant ‘de son propre genre’ et qualifiant une situation juridique dont la singularité empêche tout classement dans une catégorie déjà répertoriée et nécessite de créer des textes spécifiques » (Wikipédia).
[32] Voy. l’art. 1.2 de l’accord de Nouméa, disponible via le lien suivant https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000000555817).
[33] Voy. le point 5 du préambule de l’accord de Nouméa.
[34] C.RIS, « Les inégalités ethniques dans l’accès à l’emploi en Nouvelle-Calédonie », Economie et Statistiques, Programme National Persée, vol. 464, p. 61.
[35] Pour une présentation de ce sujet, voy. S. KLIMIS, « L’énigme de l’humain et l’invention de la politique », De Boeck, Bruxelles, pp. 171-174.
[36] S. KLIMIS, ibid., pp. 172-173.
[37] Blog officiel d’Edouard Glissant, « Une pensée archipélique », Glossaire, section « Rhizomes », disponible en suivant ce lien : http://www.edouardglissant.fr/rhizome.html
[38] S. KLIMIS, op. cit., pp. 173-174.
[39] S. KLIMIS, ibid., p. 174.
[40] La différence majeure que nous tenons à souligner est que le peuple kanak est autochtone de l’archipel, ce qui n’est pas le cas des auteurs antillais, qui se perçoivent eux-mêmes comme un mélange européen, africain et asiatique. On peut imaginer qu’une injonction à « hybrider » sa culture soit mal perçue par une personne kanak vivant sur sa terre.
[41] Blog officiel d’Edouard Glissant, « Une pensée archipélique », Glossaire, section « Créolisation », disponible en suivant ce lien : http://www.edouardglissant.fr/creolisation.html.
[42] Et par ailleurs ex-collègue de M. Dupond-Moretti, en tant que secrétaire d’État en charge de la citoyenneté, entre 2022 et 2023.
[43] Extraits du discours reproduits dans l’article d’E. SALVI, « La Nouvelle-Calédonie s’enfonce dans une crise sans fin », 15 juillet 2024, disponible sur www.mediapart.fr.