Nous l'avons déjà,à maintes reprises, ici, évoqué : les élections béninoises, présidentielles et législatives de 2011, furent, comme toutes les élections en Afrique, proprement calamiteuses pour les mêmes raisons qu'ailleurs, absence de fichier électoral, bourrages d 'urnes et autres dérapages malgré la présence d'une CENI , ici CENA, – Centre pour des élections indépendantes ici autonomes- , qui n'y pouvaient rien quand elles n'étaient pas elle-même complice de nombreux passe-droits.
A peine élu, Boni Yayi déclara vouloir, dans son discours d 'investiture, modifier la constitution .Dans ce cadre il fut décidé, quelques mois plus tard, d'accorder, dans les affaires de Justice, plus de pouvoir à la Cour Constitutionnelle, à la botte du Pouvoir et .. d'accorder au Président la possibilité d'exercer un troisième mandat. Comme Wade quelques mois plus tôt au Sénégal, comme Tandja au Niger , etc...Mais comme au Sénégal l'opinion, échaudée et amère, énervée par une série de scandales sur fond de corruption révélée en partie par l'audit de administration entend ne pas s'en laisser conter.
Cet audit Pascal Koukpaki, l'a présenté peu après l'élection en mars dernier. Vingt et un ministères et une soixantaine de sociétés d’État ou semi-publiques ont été passés au crible . A tous les niveaux, les conclusions ont révélé «d’énormes dysfonctionnements et des détournements» de deniers publics.
«337 comptes hors budget [autrement dit fictifs] ont été ouverts dans différents ministères sans l’autorisation du ministère des Finances. L’examen de ces comptes révèle un manque général de transparence et d’importantes ressources financières sont détenues illégalement dans certaines structures», a-t-il précisé. Mettant en avant le «manque de respect du bien public caractérisé par la dissimulation de matériels roulants, de cessions abusives de biens meubles et immeubles (véhicules administratifs, terrains et autres matériels) et de l’utilisation abusive des matériels et véhicules administratifs». Les audits révèlent en effet un total de 23 milliards de F cfa de dépenses non justifiées par 300 personnes à divers niveaux de responsabilité.
Dans le rapport, qui compte 7 800 pages, le ministère des Finances est largement pointé du doigt, notamment pour fractionnement des commandes en violation des dispositions du code des marchés publics, dépenses en l’absence de tout contrat, marché ou bon de commande et organisation de simulacres de consultation au profit de certains fournisseurs. En 2005, au ministère des Enseignements primaire et secondaire, 227 millions de primes ont été indûment payés à des cadres de la structure pour des formations qui n’ont pas eu lieu. Au ministère de la Jeunesse des Sports et des Loisirs, de 2004 à mars 2006, 76 millions et 30 millions de F cfa restent non justifiés, respectivement dans le cadre de l’organisation de la Coupe d’Afrique des nations juniors 2005 et de la participation du Bénin à la Coupe du monde de football féminin. Quant au ministère de la Communication, sept mandats ont été attribués à une société sous la base de bordereaux fictifs.
Au niveau de l’intendance du palais de la présidence, 93 millions de F cfa ont été détournés dont 39 millions ont déjà été remboursés par le comptable pris en faute. Difficile d’évaluer le montant global des pertes occasionnées. Pour autant, l’audit recommande le remboursement des sommes dues au Trésor public, des sanctions disciplinaires, des poursuites judiciaires et la restitution des «matériels indûment soustraits», dont certains auraient déjà été récupérés.
Mais aujourd'hui alors que les échos de ces scandales ne se sont pas encore éteints voici qu'un nouveau drame frappe l’État, la Nation , le Peuple : on a essayé d 'empoisonner son Président.
A vrai dire, personne n'y croit tout à fait.
Dans le complot sont impliqué Zoubérath Kora-Séké, nièce du Président , intrigante trop bavarde qui aurait dévoilé le terrible projet à son petit ami et à sa sœur qui se seraient empresser de divulguer ces informations à l’intéressé, le médecin personnel du président, Ibrahim Mama Cissé, qui aurait accepté de remplacer les habituels cachets du président par des pilules empoisonnées. Et enfin Moudjaidou Soumanou, un ancien ministre qui aurait joué les passeurs et récupéré les fameux médicaments à l’aéroport.
Derrière toute cette opération, l’indispensable commanditaire est incarné, d’après les premiers soupçons, par le riche entrepreneur Patrice Talon. Selon le parquet de Cotonou, cet ancien proche du président Yayi Boni, qui vit désormais en Belgique, aurait promis un milliard de francs CFA à chacun des protagonistes pour accomplir le forfait.
"Le 17 octobre dernier, lors du séjour de Yayi Boni à Bruxelles, en tant que président de l’Union africaine, sa nièce qui l’accompagnait aurait été contactée et invitée dans l’hôtel où logeait Patrice Talon. Ce dernier a réussi à convaincre Zoubérath pour qu’elle administre à Yayi des produits qui lui seront remis par le médecin Ibrahim", expliquait le 22 octobre le procureur Justin Gbènamèto, lors d’une conférence de presse au palais de justice de Cotonou
La nièce, le ministre et le médecin ont été interpellés et sont actuellement sous les verrous à Cotonou pour "tentative d’atteinte à la vie du chef de l’État". Le parquet a annoncé qu’un mandat d’arrêt international serait délivré contre Patrice Talon et l’un de ses proches, Olivier Boko.
Mais Patrice Talon est il le commanditaire ou la victime de cette fascinante histoire ? L' ’histoire de Talon est celle d’un favori qui tombe en disgrâce. Ancien proche du pouvoir, Patrice Talon a soutenu financièrement la campagne présidentielle de Boni Yayi en 2006 alors qu’il était le magnat du coton, première puissance financière du Bénin.
Mais en début d’année, il a perdu le contrat de la gestion du Programme de vérification des importations (PVI) chargé de fixer les taxes douanières dans le port de Cotonou - mobile probable du complot, selon des proches du Président. Talon a également été mis en cause dans une affaire de mauvaise gestion de subventions pour le coton.
Visé par une plainte du ministre de l’Agriculture en avril, Talon a été arrêté 48 heures et ses avocats ont dénoncé une cabale contre lui. Selon eux, le chef de l’État n’aurait pas apprécié les prises de positions de Talon contre une réforme de la Constitution qui permettrait à Yayi Boni de briguer un troisième mandat et aurait décidé de rompre unilatéralement leur accord
Mais ont été entendus voire incarcérés beaucoup d 'autres personnages de l'entourage présidentielle notamment, Pascal Todjinou, secrétaire général de la Confédération générale des travailleurs du Bénin (CGTB), Valentin Somassé, coordonnateur du projet d’appui au développement des filières lait et viande, Lionel Agbo ancien conseiller du Président qui avait dénoncé, en septembre, "la grande corruption" au sein du palais présidentiel et était déjà incarcéré pour "offense à la personne" du président.
Selon Joseph Djogbenou, avocat de deux des trois inculpés dans l’affaire, le complot n’est donc peut-être pas celui que l’on croit. "On ne peut pas dire dans quelles conditions les déclarations ont été obtenues et quel est le contenu des déclarations. Il y a encore beaucoup plus d’opacité que de lumière. Déjà, alors que l’on est soumis au secret de l’instruction, on a divulgué l’essentiel", déclarait Me Djogbenou à l’issue de la déclaration du procureur à la presse, le 22 octobre.
L'affaire des poisons risquent d'enfoncer encore un peu plus le Bénin dans un cloaque glauque où corruption, prédation, et grand n'importe quoi ( voir sur mon blog l'affaire CIC) se mêlent. Le pays s'enfonce irrémédiablement. On est loin très loin du temps où Cotonou avec Dakar tenait le haut du pavé des universistés francophones où le marxisme tropical et un léninisme mâtiné de rumba zaïroise faisaient folklore tant l'humour des béninois sauvait Kérékou de la caricature. L'avenue principale de Cotonou, en hommage au grand frère guinéen s 'appelait Avenue Sekou Touré , mais chacun, réaliste, à Cotonou, l'appelait l'Avenue « c 'est tout troué » .
C'est ce que nous écrivions dans les colonnes de Mediapart il y a un peu plus d'un an et depuis les faits , malheureusement, viennent confirmer jour aprés jour que nous sommes dans un état voyou où le Droit et à la Justice n'existent pas où la parano d'un malade gangrène tout l'Etat.
En charge du dossier tant de l'affaire des poisons que de celle du coup d 'Etat, conte rocambolesque que seul un esprit dérangé peut concevoir, le Procureur Général de la République du Benin Gbenameto, avait nommé son neveu, Angelo Houssou, obscur juge au à l'instruction du dossier, certain d'avoir à sa solde un juge encore à ses débuts et n'ayant jamais eu à traiter un dossier délicat et important Car eà force de manipuler la justice, de tenter de lui enlever toute crédibilité, de faire preuve de cynisme froid en utilisant les procureurs à des besognes peu honorables et en les jetant successivement comme de vieilles chaussettes, le Président Yayi Boni a fini par convaincre les acteurs de la justice, eux-même qu'ils ne peuvent compter sur rien: ils ne sont protégés par rien, ni par la loi dont personne ne tient plus compte, ni par la morale (mot inexistant dans le dictionnaire de la conscience présidentielle au Bénin) encore moins par la clameur publique, rendue inaudible depuis des lustres...
Or aprés une longue instruction où le Procureur ne cessa d'intervenir dans l'instruction avec son complice le Chef de gendarmerie de Cotonou, le petit juge rendit il y a un an , en Mai 2013, un jugement de non-lieu qui suscita l'ire du Président caudillo dictateur et néanmoins Père de la nation, Boni Yayi .
A tel point que, se sentant menacé, il décida de fuir aux USA où il fut incarceré, l'Ambassade des USA à Cotonou ayant annulé, sur demande de la Présidence, le visa qu'il detenait depuis deux ans.
Il a demandé l'exil et bénéficie sur le sol amérficain, pendant un an, d'un visa temporaire dans l'attente d'un jugement..
La France doit prochainement juger si l'extradition de l'homme d'affaires Talon est recevale et justifiée.