Il convient de savoir et de dire clairement si le libéralisme et sa version extrémiste représenté par l’OMC, peut représenter pour les pays moins développés –pays de l’ACP – Afrique, Caraïbes, Pacifique- une chance d’un développement harmonieux, socialement acceptable, et économiquement rentable. Le bilan de l’Alena, qui en 96, institua une zone de libre-échange entre les USA et le Mexique montre au contraire que la formule libérale précipita la ruine de milliers de paysans et signa la fin de l’autonomie alimentaire du Mexique dépendant pour sa nourriture de base, le maïs, désormais de leur puissant voisin.
Inversement l’entrée de l’Espagne dans le Marché Commun européen et le libre-échange entre son économie arriérée et celle de ses voisins dont la France marqua le début d’une évolution économique spectaculaire aux retombées politiques et démocratiques bénéfiques.
Ce qui signifie clairement qu’il n’y a pas de libre-échangisme bon ou mauvais, bénéfique ou catastrophique, mais des rapports et des complémentarités spécifiques qui peuvent être soit l’un soit l’autre. En d’autres termes deux économies voisines à des niveaux de développement différent peuvent s’entraider. Deux économies dont les niveaux sont par trop différents -en termes d’investissements, de formation, de richesse naturelles-ne peuvent que conduire à l’absorption du plus faible par le plus puissant.
C'est-à-dire que les directives de l’OMC appliquées aux rapports entre l’UE et les pays de l’ACP conduiraient non à une régression du montant des droits de douane- ce qui est un moindre mal – On est en droit de s’interroger sur la santé d’une économie dont les droits de douanes constitueraient une des principales rentrées budgétaires -mais à une régression de la capacité de développement social et économique des pays de l’ACP signataires.
Par ailleurs les droits de douane ne peuvent qu’être regardé que comme compensation et non droit c'est-à-dire être évalués en termes d’impact social ( sur l’emploi entre autre) plus qu’en termes de produits. En ce sens ils marquent une volonté de l’Etat, et plus qu’un montant monétaire, ils représentent un sceau qu’il serait extrêmement dommageable sous couvert de développement économique de supprimer. Les directives de l’OMC et en général toutes les approches libérales visent et conduisent à gommer, supprimer, diminuer, faire disparaitre la main mise que les états peuvent avoir sur leur économie, à couper le cordon ombilical entre économie et politique, à restreindre la fonction politique à une fonction de représentation sans pouvoir, un masque, sous laquelle la bonne gouvernance exigée ne porte plus sur rien sinon sur l’apparence- la messe démocratique du vote- et la gestion des déchets sociaux , humains, environnementaux, produits par une sphère, l’économie, sur laquelle elle n’a aucun pouvoir.
Il faut au contraire et j’invite les gouvernements des ACP à réagir vigoureusement autrement que par l’anathème, à des propositions qui viseraient à leur enlever non des droits de douane mais la possibilité d’agir directement sur leur économie et partant sur les sociétés qu’ils gouvernent. IL faut re-installer, le plus rapidement possible, l’Etat au coeur de l’économie du développement. Tous les pays en décollage, dont la Chine, viennent d’en apporter la preuve. Non par des nationalisations qui rappelleraient les fameuses théories de l’industrialisation par substitution et leur échec mais par des accords de partenariat avec les pays développés qui ne passent pas par les produits mais par l’impact de ceux-ci sur le développement. Les sociétés d’économie mixte peuvent en ce sens représenter une porte de sortie dans la mesure où les avantages concédés de l’ouverture aux marchés intérieurs seront compensés non par des droits réciproques identiques ou des droits de douane dont on peut s’amuser à retarder l’échéance mais par des nécessités d’investissement et de formation internes.