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Billet de blog 8 mai 2010

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l'Afrique est mal partie

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Un certain nombre de chiffres et de commentaires circulent en ce moment dans les médias selon lesquels l’Afrique, mal partie, serait, depuis quelques années en voie de décollage. Pour preuve un taux de croissance voisin de 5% quand l’Europe peine à en atteindre 2. Ce chiffre, malheureusement, contrairement aux déclarations et aux optimismes se situe aux antipodes de la réalité.
D’abord parce qu’il est global et ne prend pas en compte la disparité entre les pays producteurs de matières premières, en particulier les pays pétroliers comme le Nigeria et l’Angola, dont les taux de croissance sont voisins de 12%, et les autres .

Ensuite par ce qu’il ne prend pas plus en compte le nouveau géant, l’Afrique du Sud, porté par sa taille sa richesse et la prochaine coupe mondiale de Football.

Ensuite par ce que les chiffres sont peu fiables et surtout qu’un raisonnement en terme de PIB dissimule les disparités de plus en plus fortes entre les différentes couches de la population. Or en termes d’Indice de Développement humain (IDH) il est clair que l’Afrique régresse et que même les pays qui s’en sortiraient plutôt bien comme le Nigéria en terme de richesse nationale sombrent dans la guerre, les famines à répétition, la misère, la déstructuration sociale et nationale.

Si, entre 1975 et 2000, le revenu net par habitant à diminué de 0, 5 % par an soit une régression de plus de 12 % quand l’Europe pendant la même période voyait son revenu croitre dans les mêmes proportions, il est vrai que le revenu moyen semble progresser depuis 2000 mais que, loin de créer une classe moyenne, il indique au contraire et stigmatise une césure sociale profonde entre les 10 % - les déciles- les plus riches et les déciles les plus bas, les premiers accumulant de plus en plus de richesse nationale quand les derniers vivent de plus en plus nombreux sous le seuil de pauvreté – 1 dollar par jour ; cela étant particulièrement vrai pour les pays producteurs de pétrole où à coté des groupes extrêmement riches vit une population de plus en plus misérable et de plus en plus en proie aux exactions et à la rébellion ( cf Nigéria)

Enfin ce taux de 5% est aussi alimenté par la croissance kenyane voire tanzanienne soutenue par des cultures de traite ( symbolisées par les roses du Kenya) qui sont toujours des développements entre parenthèses à la merci de la solvabilité et des modes des pays du centre.

Enfin il est clair aussi que la poussée démographique( quasi 3%) qui peut être un atout de développement, dans le contexte actuel de sous éducation est plus un facteur de déstabilisation de fragilisation et de sous-développement.

On a pu croire il y a dix ans l’Afrique sortie des crises qui la traversaient. En Sierra Leone, au Nigéria, au Rwanda. La libération de Nelson Mandela devenant le symbole d’une Afrique retrouvant avec sa dignité son essor économoique.Mais les conflits du Zaïre (Kivu) n’ont pas cessé alors que se rallument en Guinée, au Niger, au Tchad, en Mauritanie, en Cote d’Ivoire, en République Centrafricaine, des feux mal éteints et que dans les 12 pays qui formaient autrefois l’AEF+ l’AOF les ¾ sont aujourd’hui au cœur de troubles politiques graves dont l’assassinat de quasi 200 personnes lors d’une manifestation pacifique à Conakry il a six mois demeure dans toutes les mémoires.

Croire que l’Afrique va mieux comme on l entend et le lit un peu partout est un contre-sens total. L’Afrique va de plus en plus mal. Il eut été à l’occasion des anniversaires des indépendances intéressant de faire un bilan, de voir et les échecs et les réussites. De confronter les points de vue. Il n’en a rien été.

Certes on sait mieux aujourd’hui ce que nous essayions de démontrer il y a 30 ans à savoir que l’aide était une concurrence et un handicap. Tibor Mende nous l’avait appris dés les années 70.Mais les politiques suivies par l’Agence Française de Développement ( AFD)continuent à être le grand n’importe quoi et on continue de payer des matières premières minières ou agricoles à des prix extrêmement bas. L’économie de traite perdure. L’industrialisation de l’Afrique est à la traîne . La Chine reprend sans hésitations ni états d’âme la posture coloniale ou post coloniale. L’Afrique s’enfonce.

Dans un nouveau contexte. Climatique cette fois. Les déserts avancent, les sécheresses progressent…à cause de la boulimie et des habitudes énergétivores des pays riches dit-on. Peut-être. Mais les conditions de sécurité alimentaire diminuent ; la famine menace à nouveau avec son corolaire, les émeutes de la faim qui, elles aussi, apparaissent et se développent dans un contexte marqué, entre autre, par la pénurie industrielle et par l’échec éducatif .

Cet échec, lui aussi patent ,est masqué, lui aussi, par l’augmentation des constructions scolaires, augmentation qui n’est pas suivi d’effort conséquent de formation des maîtres, de contrôle des savoirs et des pédagogies à tel point que de moins en moins d’enfants accèdent au secondaire où ils sont de moins en moins bien formés alors que les plus compétents obtiennent des bourses pour continuer et terminer leurs études supérieures en Europe…Où 90% d’entre eux continuent à résider et exercer une fois leurs diplômes en poche. Ajouter à cela les progrès de l’école coranique qui fait du récitant l’alpha et l’omega de la connaissance et vous obtenez un tableau plus conforme de la réalité africaine que les beaux discours optimistes essaient de masquer. Pour masquer peut-être dans le même mouvement la fin des soutiens et de nos obligations, pour éviter plus surement de les repenser.

Mais la réalité est têtue. La révolte gronde. Elle n’est pas « à l’autre bout du monde « (« la Corrèze pas le Zambèze ») mais à nos portes et dans nos rues. La fin des turbulences liées à l’immigration et à la clandestinité des résidents ne prendra fin que quand enfin il y aura une vraie politique de la faim en Afrique.

Notre association ASAS-France y contribue.

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