Mali, suite.
Petit à petit l'oiseau fait son bonnet.
Les faits se décantent, des interrogations nouvelles interviennent. Des réunions se font et se défont.
La dernière réunion de Ouagadougou qui réunissait sous l'égide de Blaise Campaoré, campant une nouvelle fois dans ses longs habits de médiateur, les « forces vives « de la nation malienne, le Capitaine Sanogo du Comité putschiste et la CEDEAO, que Préside Monsieur Ouattara, Président de Côte d Ivoire grâce aux chars français et aux armes que lui filait en douce son ami Campaoré, ont abouti à une déclaration demandant que soit respectée l'intégralité territoriale et rétablie la constitution , que des élections aient lieu après une période de transition dont il appartiendra aux « forces vives « de définir la durée », et enfin un appel à l'aide et humanitaire et armée de la CEDEAO.
D'un autre coté on constate que ces » forces vives » qui en appellent et s 'en remettent si clairement à la CEDEAO sont constituées de ces mêmes partis politiques qui ,d'après Aminata Traoré, ont été en grande partie responsable du « chaos malien » et du Capitaine Sanogo qui lui n'hésite pas à se dire « contrôlant l'armée » et a rappeler qu'il a fait son coup d ' éclat, plus que coup d État, par ce qu'il considérait que la démocratie au Mali était une « coquille vide » .
Ainsi l'alliance des ennemis d'hier revient à mettre le pays sous la présidence d'un intérimaire qui n'a aucun pouvoir, d'un militaire d'un rang subalterne qui « contrôle l'armée », et de forces politiques si "vives" qu'elles ont conduit le pays là où il est maintenant, dans le trou et divisé en deux.
Le tout sous l'égide d'une puissance extérieure, la CEDEAO qui ,bien sur, joue les bons offices, manie le chaud et le froid, la caresse et la torgnole, la carotte et le bâton, l'aide alimentaire et la menace armée et est salué sur la scène internationale - voir Attias- avec chaleur comme la seule entité capable de sauver l'Afrique de ses « maladies infantiles », les coups d 'État et la partition territoriale.
Sans s 'interroger plus avant bien sur sur l'origine des événements sur cette « coquille vide » dénoncée conjointement par Sanago et Aminata Traoré qui est en train, en douce par réunions interposées de se renforcer et de redorer un blason bien terni .
Il n'est même pas fait une même timide allusion aux discussions et avancées de Nouakchott où les émissaires du Président intérimaire ont pu rencontrer les envoyés du MNLA qui se montrent beaucoup plus conciliants qu'on a bien voulu le dire et sont tout disposés à accepter, en renonçant à leur indépendance, ce que les autres touaregs sahariens ont obtenu de leur gouvernement respectif.
Car il - le MNLA- a bien conscience que si militairement il est le plus fort - les rodomontades d'une armée malienne recomposée comme le propose et le demande les " forces vives" à Ouagadougou ou la menace d'une armée d'ivoiriens et de burkinais le font rire- économiquement ils ne peuvent se développer sans l'aide mais surtout les échanges extérieurs tant occidentaux que locaux. Ils savent aussi qu'il ne peut y avoir un embrasement touareg car, pour le moins, trois des quatre nations, où des minorités importantes de touaregs existent ,ont déjà fait leur « révolution ».
A commencer par le Niger voisin où un mouvement rebelle touareg a déjà fait parler de lui.mais où grâce au coup d 'État de Djibo Salou, dont on ne dira jamais assez l'importance, et au terme d 'une transition de un an, est sorti des urnes Mahomadou Issoufou qui a compris l'importance d 'en finir avec la rébellion touareg et a nommé comme premier Ministre un des chefs touareg d 'Agades, Rafini Brigi, tout en prenant soin de s 'entourer de conseillers généraux touaregs comme Iag Boulo n hésitant pas a punir et réprimer ceux qui continuent à jouer un double jeu institutionnel qui consiste à profiter de leur statut pour vendre des armes (Alambo). Ainsi ré-intégrés dans le corps de la nation nigérienne les touaregs ne pensent plus à la dissidence et condamnent les tentatives et déclarations de leurs frères maliens .
De même Alger qui avait comme les autres pays tendance à négliger une population périphérique et culturellement indépendante et différente a ,depuis quelques années, développé le secteur de Tamanrasset ( eaux et électricité, école et université) où vit l'essentiel de sa population touaregs.
Enfin en Mauritanie, la population touareg est une population ni périphérique ni opprimée.
Ainsi seuls les toubous du Tchad risqueraient de se joindre au Mouvement de Libération de l'Azawad. Mais ils sont surtout implantés en Lybie où ils se trouvent, comme noirs, en butte aux exactions des tribus arabes et tentent une sécession à partir du territoire lybien. Il y a un conflit lui aussi oublié entre toubous , touaregs noirs de langue teda, et les shebas arabes .Mais il y a peu de chance qu'il se détériore en guerre.
Le piège est donc bien, puisque le concept fait aujourd'hui flores, de se contenter au Mali d'une ré-institutionalisation, d'un retour en arrière, d'un gommage général de ce qui vient de se passer, d'un retour des " forces vives " grouillant d'intérêts personnels sous le masque de la démocratie et d'un solution militaire contre le MNLA et les revendications touaregs.
Au Président intérimaire, décrété sans pouvoir, vient d 'être adjoint un Premier Ministre, lui aussi intérimaire,Modibo Diarra. Un scientifique éloigné de son pays, internationalement reconnu dans sa spécialité, et complètement vierge en politique . On est en droit de se demander dans le panier de crabes où les militaires de Sanogo ont déja commencé a mettre ssous les verrous bon nombre d'anciens dirigeants -dont le Ministre de la Défense- quelle va être son analyse et ses choix.
La seule solution est le soutien de la France, entre autres, au co-développement de la filière coton, - détruite par l'actuel Directeur de l'Agence Française de Développement-des cultures vivrières, et de l'arboristerie alimentaire ( fourrage), le développement des puits et des écoles, tant en Azawad ( où ne vivent pas que des touaregs mais aussi des peuls et des songhais (où à cote du tamasckeh se pratique le Bambara) que dans tout le Mali.