Alors qu'à Conakry l'armée réprime dans le sang une manifestation, quasi 200 morts par balles au dernière nouvelle, à Dakar, un groupe cagoulé et armé saccage les locaux d'un journal qui avait, la veille, émis un jugement qui ne lui convenait pas .... Beaucoup de différences dans ces évenements : l'horreur des massagres guinéens n 'a rien a voir avec ce que titrait Médiapart sur "l horreur du saccage des bureaux "du journal Walfadjri. .D'un coté il s 'agit de la force armée, de l 'autre d'un groupe de talibés se voulant au service d'un marabout.D'un coté il y a un massacre...des viols organisés par les forces légales, des pillages de villas appartenant aux membres de l'opposition...un drame humain épouvantable et de l'autre une broutille d'un petit groupe incontrôlé.
Mais il y a des ressemblance pourtant..
Les talibés ce sont ces bandes de mendiants de 6 à 14 ans, qui, tôt le matin, en groupe, crane rasé, maigres, à peine habillés de loques sales, la sébille à la main , sauterelles humaines, s'abattent sur la cité et tentent en jouant sur l'importance de l 'aumône en terre d 'islam, de ramener au marabout des sommes d 'argent qui serviront à les nourrir, à les éduquer à une lecture par coeur du coran mais serviront aussi à assoir la réputation et la force de ce qui devrait être un saint homme, le marabout, et qui de plus en plus ne devient qu'un exploitant d'esclaves, ignorant alors qu'il devrait être savant, riche, mêlé a quasi toutes les histoires sordides, et affidé lui-même d'une confrèrie qui a ses fidèles mais aussi ses curés ses évêques ses cardinaux et son pape, le khalife de Touba pour les mourides, lesquels constituent , se constituent , sont, de fait, le premier pouvoir au Sénégal. Ainsi peut-on voir les talibés comme une milice, prête à suivre aveuglément les directives ou les directions indiquées par la condrèrie
Lorsque le khalife général de mourides, le chef des chefs, le marabout des marabouts, Saliou Mbacké, mourut, en Décembre 2007, le chef de l'Etat, Maître Abdoulaye Wade vint, l 'apres-midi même, présenter ses condoléances à la famille et son allégeance au successeur du vieux descendant d'Ahmadou Bamba, Bara Mbacke. Il profita de l'occassion pour, devant la télénationale, se déclarer lui-même et pour toujours talibé mouride et joignant le geste à la parole faire cadeau au nouveau khalife de 11 milliards de francs – quasi deux cents millions d 'euros-pour l'amélioration de la ville sainte de Touba, francs cfa qu'il avait reçu en cadeau le matin même de la France dans le cadre de travaux d'épuration de la ville de Dakar.
Il ne peut y avoir d'élections gagnées qui n'aient reçu l'aval des mourides .Un des essayistes sénégalais le plus percutant, Sanou Mbaye, vient de publier un livre dans lesquels il dénonce avec alacrité ce qu'il appelle le bi-céphalisme politco-religieux . "
Saliou Mbacke, le vieux khalife décédé avait géré son capital, son patrimoine et sa foi dans les limites et le cadre d'un capitalisme paternaliste et d'une foi sincère et tolérante qui sont, sous la direction de Bara Mbacke, en train de changer. Déja il y a quelques années sous l 'impulsion de Bara, Saliou qui avait alors plus de 90 ans, avait interdit l implantation de deux écoles françaises à Touba, au prétexte que le seul enseignement possible dans la ville sainte était l'enseignement coranique qui rappelons le n'enseigne rien et est largement responsable du fait qu'aujourd'hui on peut considérer que plus de la moitié des jeunes de 15 à 25 ans sont analphabètes et incapables d'exercer quelque métier que ce soit. Radicalisation donc qui s'explique aussi, face à lui, par un mécontentement, de plus en plus tangible, de plus en plus visible, et l'émergence d'une force de contestation encore peu audible mais enraciné dans le ras le bol populaire.
Or face à ces incertitudes Wade , après avoir entretenu l'idée qu'il laissait sa succession à son fils Karim- constitution d'une dynastie comme au Gabon et au Togo-vient récemment de se déclarer candidat à sa propre ré-élection .La corruption généralisé qui permet d'éviter de payer la fonction publique, la subtilisation ou le grignotage des aides , la subtilisation ou le grignotage des deniers de l'état, autant de moyens qui permettent le seul enrichissement des élites . Etre fonctionnaires, douanes, policiers , administratifs, toute personne détenant une parcelle de pouvoir ,n'est nommé là que sur recommandation et n 'a pour seul objectif , n'étant pour ainsi dire pas payé, que de tondre le client, conducteurs de voiture, entrepreneurs, écoliers, commerçants, malades etc...A l'entrée et à la sortie de chaque petite ville il y a des contrôles de police. Deux policiers"contrôlent" c est a dire taxent une trentaine d'automobilistes par jour. C'est leur salaire. ....Ibidem pour le contrôle technique des voitures par exemple . Toutes les voitures sont contrôlées , papier faisant foi. Or plus de 90% des voitures seraient , en Europe déclarées d 'office hors d'usage et bonnes à la casse . Or elles roulent, polluent, transportent et tuent, faute de freins, de pneus en bonne état, de pare-brise etc....Il en coute 10 euros pour avoir le OK de contrôle. C'est aussi le prix que coute un tampon sur un carnet de santé afin d' éviter piqure contre la fièvre jaune, la typhoïde etc.
Le système, la sociéte dans son ensemble, ainsi perdure et fait bloc. S'opposer c est d'abord demander et faire allégeance.....
Mais ce ne sont pas les élections que les politiques craignent mais l'effervescence populaire. La contestation. Toutes les élections sont largement truquées. Une campagne électorale c est d'abord un parcours d 'allégeance, de villes en villes, de communautés à communautés pendant lequel se négocient les passe-droits, les postes, c est à dire, dans un pays où l'économie est "informelle" a plus de 60% , la survie... Etre au pouvoir c est être assis prés des trésors de l'aide internationale et des taxations frauduleuses multiples, c 'est gérer cette masse de clients à qui , par le poste, est offert la possibilité de survivre avec les confettis de pouvoir, c est être assis près de les seules sources possibles de revenus..
Ainsi la violence de l'intervention du marabout Thierno Mbacke, frère du khalife, ou du moins de ses talibés, cagoulés, armés, n 'est elle pas un épiphénomène extérieur au système. Plus la crise s'approfondit, plus les mécontentements lèvent, plus il devient urgent pour le binome au pouvoir de bien marquer les limites de la contestation.
En ce sens c est aussi ce qui vient de se passer en Guinée . Avec une toute autre ampleur. Nous ne sommes plus dans le cadre d'un peuple tenu en laisse par la corruption et la religion mais dans celui de militaires intervenant de la plus absurde et brutale façon que ce soit. Les répressions en Iran n 'ont pas fait plus de 20 morts. On parle, à Conakry, de 200 morts, d'un vent de folie meurtrière avec viols, pillage, perpétrés par les forces légales du pays pour réprimer dans un stade public une réunion officielle d'un parti politique officiel s'élevant contre la décision du Capitaine Moussa Debis Camarra, chef de la junte commandant le pays , de se présenter aux prochaines élections alors que, chef d'une coalition d'officiers venant de se saisir par les armes du pouvoir, il avait alors déclaré solennellement qu'il n'était pas question qu'il restât, lui, et les militaires au pouvoir. Il prétendait ainsi, alors, ré-éditer l'aventure de Jerry Rawling au Ghana. Amateur de reggae et aviateur, nationaliste energique et bon vivant, en 79, avec une audace inouie il prit le pouvoir, déclara le rendre, fit un procés à quelques huiles comme Archeampong, les fit condamner et se retira, ... Si cette légende traine encore en Afrique de l 'Ouest, le capitaine chargé de l'intendance Moussa Debis n'avait pas la tête de l'emploi.L 'atrocité, l'absurdité, l'ampleur de la represion face à une opposition structurée encore bien faible, ces deux cents morts rappellent les pires heures de ces gouvernements barbares dont on croyait l'Afrique libérée.Sur fond d 'Afrique qui gronde, sur fond de la délinquessence de plus en plus nette des services publics, de l'hopital, de l'école, de la justice, de la police, de l'administration, face à la crise dont les effets ne se sont pas encore faits sentir vraiment en terme d'emploi et en terme de prix, face à un chomage réel qui touche plus de 70 % de la jeunesse, les crispations autour du pouvoir politique et de la gestion de l'état risquent de voir se renouveler et s 'étendre le retour à des violences qu'il convient dés maintenant de stigmatiser et d'interdire. La faiblesse des réactions en France face à ce massacre qui touche un pays dont des milliers de ressortissants vivent et travaillent depuis longtemps en France, massacre ignoble qui touche un pays dont la France est le premier client après la Chine, avec entre autre Total à Bolloré, est, sous couvert d'en finir avec la françafrique, scandaleux/ Il s 'agit d'une démission flagrante des principes humanistes....à dire vrai il y a déjà quelque temps que l 'Afrique, les guinéens, les sénégalais, ne se faisaient pas trop d'illusions sur les intentions et les pratiques françaises et sarkoziennes.