La censure , ou comment Jeannot lance une réflexion entre café et croissant.
Au bout du boulevard enneigé se trouvait le troquet ou j'allais ce matin là commander mon café, signe du départ d'une nouvelle journée...
J'avais à peine passé la porte que Jeannot m'interpella:
-"Tu le connais toi M'Bala?"
-"Salut Jeannot, et non, c'est un de tes potes, un des incontournables du zinc?"
Jeannot me fixait, le sourire aux lèvres...
-"Dieudonné..., c'est son nom M'Bala..."
-"Dieudonné, oui, j'aimais bien ce qu'il faisait avec le petit là...euh..."
-"Le petit, c'était Seimoun..."
-"C'est ça, elli seimoun..."
Les incontournables avaient posé leurs cartes et se tournèrent vers moi.
-"Ils lui en veulent à ce gars, Valls a décidé de le faire taire et ses spectacles sont annulés à coups d'arrêtés préfectoraux...tu te rends compte...!"
-"Ouai mais Jeannot, ses sketchs sont antisémites, c'est un pote de Soral ce dieudonné..."
J'en appelais à la sagesse de Jeannot...
-"Et alors, pas une raison pour le persécuter, même s'il dit des conneries. .."
-"Et des conneries il en dit de belles, le soir des attentats sur Paris..."
-"Ouaip, celle-là, elle était moche..."
Jeannot m'avait coupé, il avait été touché au point de ne pas me laisser terminer ma phrase...
-"Tu sais..." avança Jeannot " ce gars là, je ne l'aime pas plus que toi, mais on est la France, toi, moi, on est la France... et ici, on ne tue pas pour des caricatures, pas plus qu'on ne fait taire les gens, quoiqu'ils pensent ou disent, ou écrivent..."
-"Je sais Jeannot, je sais..."
Merde, Jeannot avec ses pensées philosophiques à deux balles, avec sa culture de pilier de comptoir franco-français venait de me sortir la phrase la plus profonde que n'entendrait jamais le 'Bar de la Poste'...