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Billet de blog 8 février 2021

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Communication en chaînes- chaînes de contaminations à l'école

A tous les migraineux, les essoufflés, les courbaturés, les asymptomatiques inquiets, les dépressifs temporaires ou de longue durée, à toutes celles et ceux qui sont, ont été ou seront en arrêt maladie cette année. Et pour tous les autres aussi, un brin de vérité(s), moins joyeux que le brin de muguet !

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Calendrier scolaire à l’ école primaire

A la rentrée de septembre, on s’était dit qu’on ne nous y reprendrait plus :

L’indigestion et les angoisses suscitées par les annonces subites et contradictoires avant, pendant et après le premier confinement de mars 2020.

Les aménagements permanents de nos pratiques pour tenter de garder un lien avec nos élèves et donner sens à ce qui n’en n’avait pas : la continuité pédagogique à distance.

Les questionnaires envoyés en toute hâte aux parents d’élèves et les réponses attendues dans la foulée pour opérer un tri entre les élèves autorisés ou non à revenir à l’école pour quelques semaines, quelques jours.

Le casse tête des espaces cloisonnés et les horaires échelonnés à mettre en place par l’équipe pédagogique.

Certes, on savait qu’on allait de nouveau devoir composer avec le virus et adopter des mesures sanitaires strictes. Mais si nous, enseignant.e.s, avions réussi à organiser notre structure d’école, préparer notre rentrée, il était légitime de penser que nos dirigeant.e.s avaient eux aussi faits leur devoirs estivaux. D’ailleurs, le 31 août 2020, M.Blanquer affirme en visite dans un lycée professionnel de Mayenne ¹: « Il ne manquera pas d’enseignants, la rentrée a été bien préparée , elle sera aussi normale que possible ».

Et leur impréparation nous est tombée dessus, comme la réplique d’un mauvais cauchemar avec l’école pour épicentre.

Calendrier sanitaire à l’ école primaire

On découvre alors le nouveau protocole, pâle copie du précédent, avec un copier-coller des moyens humains et matériel , autrement dit rien de plus.

En Seine-Saint-Denis, la baisse des effectifs dans les classes n’est pas d’actualité, le DASEN décide de plusieurs fermetures de classes une semaine après la rentrée, en pleine crise sanitaire.

Le 7 septembre 2020, les parents d’élèves d’écoles maternelles et primaires de Montreuil se rassemblent devant l’école Louise Michel pour contester cette décision.²

En revanche, il y aura bien plus d’hésitations à fermer, de manière temporaire, une classe dans laquelle les enseignant.e.s et les élèves sont touché.e.s par le Covid, tour à tour. Les remplaçant.e.s sont fortement exposé.e.s et leur nombre, déjà insuffisant depuis des années, s’épuise vite.

Les chaînes de contamination se poursuivent mais M.Blanquer ne l’évoque dans aucune chaîne... de télévision .

Lorsqu’un élève est testé positif, les consignes sont inaudibles : ses camarades de classe ne sont pas considéré.e.s comme cas contacts, quand bien même elles et ils auraient mangé ensemble à la cantine.

Le 18 septembre 2020, le syndicat Sud éducation fait un point de recensement dans les écoles de Seine-Saint-Denis.³

Le 29 septembre, dans un entretien au Figaro, Jean-Michel Blanquer assure : «L’école n’est pas le nid du virus. On ne doit pas engourdir la société. »

Le journal Libération rappelle ses propos dans un article publié le 26 octobre 2020 et intitulé « Covid à l‘école, l’omerta et le déni »

Briser les chaînes de la désinformation

2 Novembre 2020, le retour en classe est rude. On nous refuse un temps de concertation en équipe pour réfléchir à comment aborder l’événement tragique de Conflans-Sainte-Honorine avec nos élèves et on nous laisse nous débrouiller avec la minute de silence sous surveillance, un texte tronqué de Jaurès, le message de l’équipe de France de football aux élèves de France et autres scénarios pédagogiques pour la matinée.

Et comme si ça ne suffisait pas, les enseignant.e.s sont chargé.e.s d’aménager le nouveau protocole dit « renforcé » : accueil, cantine, récréations échelonnées, cour de récréation cloisonnée, nouvelle répartition des services, temps périscolaire…

C’est un travail chronophage et quasi impossible compte tenu de tous les paramètres à prendre en compte mais nous sommes partagé.e.s entre une sourde colère et la peur de revivre l’école à distance, loin de nos élèves.

Dans le second degré , la colère, elle, gronde et enfle. Les profs usent parfois de leur droit de retrait et bataillent pour obtenir des demi-groupes d’élèves.

Certain.e.s d’entre nous se sont mobilisé.e.s le 10 novembre puis étaient de nouveau en grève le 17 novembre tant pour dénoncer les conditions sanitaires que les conditions de travail en général.

En primaire, on se creuse la tête pour éviter les brassages entre les classes.

Mais à quoi bon quand les municipalités ne peuvent installer des équipements adaptés et créer la fameuse distanciation recommandée dans un réfectoire ?

Quand les agents territoriaux ne peuvent assurer leurs tâches de plus en plus nombreuses et complexes et sont très souvent en sous effectifs ?

Jusqu’où va t-on user de la flexibilité des animatrices et animateurs qui assurent l’accueil du matin, les cantines , le goûter et l’animation après les cours sur des temps échelonnés?

Les enseignant.e.s remplaçant.e.s constatent parfois l’absence de nombreux professeurs au sein d’une école qui pourrait, qui devrait fermer tant le nombre de cas de Covid est élevé.

Début décembre, L’Éducation Nationale a annoncé le recrutement de 6 000 contractuels dans le premier degré, jusqu’aux vacances de février.

Elles et ils sont déjà présent.e.s sur Montreuil et doivent apprendre sur le tas, assurer leurs premiers jours de classe sans formation préalable ; et ce dans un contexte de pandémie !

Après quoi, on les remerciera et elles et ils pourront de nouveau aller pointer au chômage.

C’est à nous, enseignant.e.s, de dénoncer le discours ministériel qui affirme encore aujourd’hui que « sa stratégie a fonctionné »6 et méprise chaque jour un peu plus notre métier.

C’est à nous de faire l’écho de ce qui se passe dans nos écoles, ATSEM, agents, enseignant.e.s en éviction, de rendre compte des réalités de protocoles élaborés hors sol et caduques avant même d’être nés.

Nos échanges, nos témoignages, nos alertes, nos mobilisations sont indispensables pour contrer les mensonges sur la prétendue normalité de la situation.

Qu’on se le dise et redise : le collectif reste le meilleur remède pour lutter !

¹ https://www.francebleu.fr/infos/education/jean-michel-blanquer-en-mayenne-pour-la-rentree-des-profs-il-ne-manquera-pas-d-enseignants-1598870338

² https://www.fcpe-ucl-montreuil.fr/mobilisation-lundi-7-contre-les-fermetures-de-classes/

³ https://www.sudeducation93.org/Situation-sanitaire-dans-le-93-une-impreparation-et-un-deni-criminels-de-l.html

https://www.liberation.fr/france/2020/10/26/covid-a-l-ecole-l-omerta-et-le-deni_1803450

https://eduscol.education.fr/2395/hommage-m-samuel-paty-et-unite-autour-des-valeurs-de-la-republique-2-novembre-2020

6 https://www.lejdd.fr/Politique/jean-michel-blanquer-au-jdd-la-situation-permet-la-continuite-scolaire-4020487

https://www.liberation.fr/checknews/2020/11/11/covid-19-decouvrez-region-par-region-pourquoi-le-nombre-d-eleves-contamines-donne-par-blanquer-est-m_1805185

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