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Billet de blog 6 juin 2025

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Le progressisme sacré

Dans une tribune publiée le 30 mai dernier par le quotidien belge, La Libre, Cédric Limani remet en question l'étiquette progressiste qui serait attachée à certains partis bruxellois essayant de constituer une majorité gouvernementale à Bruxelles Région. Selon Cédric Limani le progressisme prend sa source dans "Les Lumières" et...

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Les Lumières washing ?

Dans une tribune publiée le 30 mai dernier par le quotidien belge La Libre, Cédric Limani, un conseiller en communication, remet en question l’usage du terme « progressiste » qui serait attaché aux partis politiques bruxellois (PS, Vooruit, Ecolo, Team Ahidar, PTB, Groen). Il affirme ainsi que : « Inspiré de la philosophie des Lumières, le progressisme désigne un courant de pensée qui valorise le progrès et prône des réformes sociales, économiques et politiques visant à améliorer la condition humaine et à permettre l’émancipation de l’individu. »

Je ne suis pas un spécialiste de la pensée des Lumières -ce courant que Limani présente comme le fondement du progressisme- mais j'aimerais égratigner ici cette légende que sont "Les Lumières". Je rappelle d'abord la citation de Voltaire : « Les Blancs sont supérieurs à ces Nègres, comme les Nègres le sont aux singes, et comme les singes le sont aux huîtres. » Le même Voltaire, souvent érigé en icône des Lumières, est qualifié par l’historien Léon Poliakov de « pire antisémite français du XVIIIe siècle ». Ce dernier ajoute que « la bestialisation des Juifs a atteint son apogée durant les Lumières ».

Le philosophe étasunien Richard Popkin considère que la pensée de David Hume — figure majeure des Lumières écossaises — est profondément imprégnée de l’idée de supériorité européenne. Cette critique d’un ethnocentrisme traverse également les travaux de l’historienne Michèle Duchet, notamment à propos de Buffon, Rousseau, Voltaire et Diderot. Des penseurs aussi influents qu’Adorno et Horkheimer voyaient dans le projet des Lumières les racines d’un certain racisme moderne, tandis que l’historien Georges Mosse identifiait dans cette même tradition une matrice de la « Solution finale ». D’autres chercheurs, tels que David Brion Davis et Edward Said, ont également interrogé la participation des Lumières à la justification de l’esclavage et à la construction de l’orientalisme.

Ces Lumières aveuglantes ?

Il est ainsi illusoire de penser les Lumières comme un bloc homogène. En réalité, on y distingue au moins deux discours : « L’un est universaliste : tous les humains sont égaux (…). Mais, selon le second, certains [humains] sont plus avancés (…) et d’autres ne le sont pas encore. » (Schaub, Sebastiani, 2021). 

Les thèmes épinglés par Cédric Limani dans sa tribune du 30 mai sont les suivants : « abattage rituel, port du foulard, communautarisme, défense du halal, situation en Palestine ». Selon l'auteur, les partis politiques précités sont globalement favorables à toutes ces thématiques et c'est ce qui remet en question leur appartenance à la grande tradition des Lumières et donc du progressisme.  A votre avis, quelle vision des Lumières mobilise Cedric Limani lorsqu'il épingle cette chaîne thématique : "abattage rituel, port du foulard, communautarisme, défense du halal, situation en Palestine : sont-ce les Lumières de l'universalité des droits ou bien les Lumières de la hiérarchisation des cultures ?  La question est vite répondue, n'est ce pas ?

Pauvreté du progressisme, progrès de la pauvreté ?

En conclusion de sa tribune, Cédric Limani attire l’attention sur la progression alarmante de la pauvreté à Bruxelles -et il a raison de le faire. Pour ma part, je serai présent dans les rues de Bruxelles ce 25 juin, afin de dénoncer la guerre contre les pauvres menée par le gouvernement dit « Arizona ». J’étais également dans la rue en mai, en avril, en mars, et à chacune des manifestations dénonçant le génocide à Gaza.

Je ne sais toujours pas ce que signifie, concrètement, être progressiste. Ce que je sais en revanche, c’est que la sécurité sociale a été conquise par des luttes ouvrières et pas par Diderot ; que le droit de vote des femmes a été arraché de haute lutte par des femmes et pas par Voltaire ; que les droits des minorités politiques n’ont jamais été offerts par les élites éclairées, mais gagnés par la mobilisation de ces minorités elles-mêmes.

AIT HMAD Lahcen / sympathisant Bruxelles Panthères (Belgique)

Références :

  • Schaub, J.-F., & Sebastiani, S. (2021). Race et histoire dans les sociétés occidentales.

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