Depuis une dizaine d’années la
goélette Tara
parcourt les océans, les mers et les rivières à des fins scientifiques, pour être ainsi la
passerelle entre les scientifiques et les nouvelles générations, le grand public, les acteurs économiques et politiques nationaux, européens et internationaux.
La Fondation Tara Océan, fondation reconnue d’utilité publique consacrée à l’Océan, à réalisé différentes expéditions ayant pour objectif l'étude et la compréhension de l'impact des changements climatiques sur nos océans.
- Tara Arctique; dérive arctique
- Tara Océan; étude globale de l’écosystème planctonique
- Tara Méditerranée; étude de la pollution plastique sur l’écosystème marin
- Tara Pacifique; étude de la capacité d’adaptation des récifs coralliens au changement climatique

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Ces missions passées ont permis de découvrir la
présence de microplastiques dans toutes les mers et tous les océans du globe
; Pacifique, Atlantique, Méditerranée… À commencer par l‘Arctique.
C’est pourquoi en 2019 Tara a décidé de poursuivre ses expéditions au delà des mers. C’est sur les
fleuves européens
, origine de bon nombre de flux de microplastiques se retrouvant dans les mers, que les équipes Tara ont trouvé urgent de naviguer et d'analyser.
Les microplastiques ont une taille inférieure à 5 mm
. Au-dessus, il s’agit de macroplastiques alors qu’en dessous ce sont les nanoplastiques (dont la taille est inférieure au millième de millimètre).
Les microplastique en chiffres c’est:
- 10% des déchets (nos poubelles) qui finissent dans la mer
- 80% du microplastique retrouvé dans la mer, provient du continent = NOUS
- 8 millions de tonnes de plastique par an sont déversés dans la mer, ce qui représente 1 camion benne par minute.
Dans certaines zones, comme celle du bassin Méditerranéen, les microplastiques sont en quantité égale que le zooplacton, qui est la base de la chaîne alimentaire.
“Dans l’assiette du poisson, il y a moitié de plastique, moitié de zooplancton". En Méditerranée, “4 fois plus de microplastiques que ce qu’on peut trouver dans le 7e continent de plastique, qu’on croyait le plus pollué au monde”. (Jean- François Ghiglione, "13h15 le samedi", France 2)

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LES OBJECTIFS de Tara durant cette mission:
Comprendre
les flux des fleuves
- où vont ces plastiques? - et donc:
- Trouver les sources
- Comprendre l’impact sur la biodiversité terre - mer
Pour cela
- 41 scientifiques se sont relayés pendant plusieurs mois pour parcourir 9 fleuves européens:
- La Tamise
- L’Elbe
- Le Rhin
- La Seine
- La Loire
- L’Ebre
- Le Rhône
- La Garonne
- Le Tibre
et
- 15 laboratoires de départements de recherches variés en collaboration
ont permis de:
- Commencer à décrire et modéliser les flux de plastique grâce à l’aide, entre autres, d’images satellite
- Observer des plaques qui contribuent à la dispersion des espèces et donc observer leurs effet sur la biodiversité
- Observer la vie présente sur le plastique.
- Se demander si les microplastiques sont transporteurs d’espèces pathogènes (celles qui donnent des maladies) ou invasives
- D'évaluer la possibilité ou non de biodégradation par les microorganismes
- Se poser la question sur la création d’épidémie pour les animaux marins

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PRÉLÈVEMENTS: Réalisés avec un Filet-Manta
La stratégie a été de faire des
prélèvements à différents points clefs des fleuves
:
- au large de l’embouchure
- à l’embouchure
- au fil du fleuve - à salinité intermédiaire
- en amont d’une ville
- en aval d’une ville
Effectuer également des prélèvements si bien
dans l’eau que sur terre
(les berges, les plages…)

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OBSERVATIONS:
Chaque prélèvement sera analysé au microscope électronique puis traité par le centre de séquençage ADN pour connaître les gènes des microorganismes qui vivent dessus. Ce qui en résulte:
- Omniprésence des microplastiques dans les fleuves européens - 100% des prélèvements contiennent des micropastiques
- Les microplastiques - invisibles - sont déjà présents dans les fleuves
- Les microplastiques absorbent toute pollution. Ces “ éponges à polluants” impactent directement la biodiversité
Ces observations font penser qu’un
nouvel écosystème
est en train de se créer.
Jusqu'à maintenant, les scientifiques procédaient à un travail de fourmis, opérant manuellement afin de procéder à l’identification des matériaux et de leur composition.
Aujourd'hui, une nouvelle méthode d’identification basée sur l’intelligence artificielle permet d’accroitre et d’accélérer l’analyse chimique
.
Le développement de cette méthode permet de déterminer automatiquement la nature chimique des microplastiques au moyen de la spectométrie, autrement dit, la mesure de la lumière absorbée par la matière plastique:
Basée sur l’intelligence artificielle, cette méthode a été mise en place grâce à des tests réalisés sur une base de données composée de 969 spectres de microplastiques. Les résultats montrent que le processus d’apprentissage automatique (machine learning) est très efficace pour identifier les polymères classiques tels que le polyéthylène, le polypropylène ou le PET (utilisé notamment pour nos bouteilles d’eau, de sodas,…).
Bientôt, l’analyse de la base de données Tara sera élargie à des types de microplastiques de nature moins courante et que l’algorithme n’a pas encore intégré. En termes de fiabilité et de reproductibilité, les espoirs sont grands. Cette méthode a été appliquée sur plus de 4 000 types de microplastiques non identifiés. Le protocole de vérification a montré un écart de moins de 10 % dans les résultats entre la méthode automatisée et l’expertise humaine. Dans ces 10 % d’erreur, les 3/4 peuvent être très facilement corrigés. La marge d’erreur de 2,5 % est donc très mince. L’identification automatisée s’avère rapide et fiable même lorsque des milliers de spectres doivent être étudiés.
Cette réussite constitue une avancée majeure et se base sur la première partie d’un logiciel dédié à l’étude des microplastiques, appelé “POSEIDON”. (source Fondation Tara Océan)
MISSIONS:
L’objectif actuellement est de quantifier toute cette pollution plastique au niveau européen, en définissant les mêmes procédures de prélèvements et d’avoir ainsi
un même et unique protocole européen
.
L’idée de Tara a été de créer une
science participative
pour comprendre ainsi ou se retrouve certains types de plastiques; plutôt en mer, plutôt sur les plages… Pour cela, le projet “Plastique à la loupe” a été mis en place avec des classes de toute la France, afin de d’engager les jeunes, leur susciter l’intérêt et les sensibiliser. 2019/2020 fut l'année pilote, Tara se prépare plus que jamais à entamer une nouvelle année scolaire, avec la collaboration d'un nombre toujours plus important de classes.
L'utilisation de nouvelles pistes de recherche, comme la
PLASTISPHÈRE
: cet écosystème, constitué en grande partie de composants plastiques créés par l'homme, serait-elle une nouvelle source d’informations pour la biotechnologie? En utilisant ce nouvel outil de détection des plastiques en mer, que sont les
bio-indicateurs
- comme le sont par exemple les moules - Tara augmente sa base de données sur la biodiversité.
Ces bio-indicateurs doivent révéler aux scientifiques les interactions entre les microplastiques et le vivant.
Les axes de recherches:
- Identifier les bactéries et comprendre si elles peuvent survivre en dehors d’un environnement autre que les microplastiques.
- Isoler les microorganismes capables de biodégrader des plastiques complexes.
- Comprendre si les plastiques dit biodégradables le sont réellement.
- Comprendre quels sont les éventuels effets toxiques pour les organismes marins et donc pour notre nourriture. - impact sur la mytiliculture et la conchyliculture
- Comprendre l’impact de l’accumulation de polluants - toxicité et bioaccumulation
Aujourd’hui
Tara Océan souhaite souligner son rôle de pont entre les acteurs politiques, les acteurs économiques - que peuvent être les entreprises et les industriels - les acteurs sociaux - telle que l’éducation - mais aussi tout un chacun
, dans notre vie de tous les jours.
Ils entendent la difficulté politique dans la compréhension et la divulgations d’informations, c’est pour cela qu’ils souhaitent partager leurs connaissances, leurs résultats, afin d'éclaircir des décisions publiques.
CE QU”IL FAUT DÉVELOPPER
Les fleuves ont été pris en considération, en ce qui concerne la pollution plastique, que très récemment. Depuis une 10 d'années il y a une prise de position des scientifiques. Aujourd'hui il est urgent de:
- Améliorer le recyclage
- Remplacer le plastique par du carton ou du papier, bannir le polystyrène qui n’a ni valeur écologique, ni valeur économique.
- sensibiliser les citoyens dans le tri de ses emballages, mais surtout agir en amont, pour une consommation éco-responsable.
- Apporter la science aux politiciens, au citoyens, aux industries
- Rester attentifs sur le développement des microplastiques et sur la biodiversité. Le plastique peut aussi être une moyen de diffusion de bactérie ou de virus.
- Adopter des lois avec un calendrier auquel se tenir.
Sont autant de points à développer, de propositions à faire, de solutions à trouver.
FAITS IRREVERSIBLES
- Il est impossible de retirer le plastique des mers, des océans et des fleuves.
- Le plastique a une durée de vie de 300 à 400 ans. C’est un processus extrêmement lent
- La nature ne peut pas détruire ce plastique
- Nous avons souhaité utiliser le plastique durable pour des produits qui ne sont pas durables
- Le meilleur des plastique c’est celui qu’on ne consomme pas
Pourquoi continuer à produire du plastique alors qu’on est capable de faire autrement?
Merci à toute l'équipe de Tara Océan pour toutes ces informations et pour leur travail.
POUR ALLER PLUS LOIN:
Si les déchets flottants sont aujourd’hui très étudiés, leur masse cumulée représente moins de 1 % du plastique présent dans les océans du monde. Les scientifiques supposaient que les 99 % manquants se trouvaient dans les profondeurs de l'océan, mais jusqu'à présent, personne ne savait où ils se trouvaient exactement. Une nouvelle étude publiée sur Science, datée du 30 avril 2020 révèle que
l
es courants océaniques semblent être capables de détourner les microplastiques des eaux peu profondes vers les eaux profondes et peuvent être responsables de l’existence d'énormes zones d’accumulations de sédiments - des hotspots de microplastiques - dans les fonds marins
. En temps normal, ces courants des grands fonds marins transportent également de l'eau riche en oxygène et en nutriments, ce qui signifie que ces zones de microplastiques des fonds marins peuvent également abriter d'importantes
communautés biologiques susceptibles de consommer ou absorber les microplastiques.
POUR APPROFONDIR:
- Source: TARA OCÉAN - AUX ORIGINES DE LA POLLUTION PLASTIQUE - Webinaire du 30 AVRIL 2020 En compagnie de Jean- François Ghiglione, Leila Meistertzheim et André Abreu
- Fondation Tara Océan
- Une nouvelle méthode d'analyse de la nature chimique des micro plastiques mise au point grâce à l'intelligence artificielle - Science Direct 2019
- Seafloor microplastic hotspots controlled by deep-sea circulation - Science 30 Apr 2020