L’exiguïté des courtils urbains (si, si, il en existe encore dans quelques quartiers) et leur mitoyenneté participent beaucoup du bon climat relationnel entre voisins. Les travaux printaniers sont l’occasion d’échanges divers. Ceux-ci, souvent banaux mais aussi parfois fructueux, permettent de mieux se connaître, de s’apprécier autrement. Entre deux propos concernant les salades et les moyens écologiques de luttes contre les pucerons, j’interrogeai mon voisin qui venait de changer d’automobile sur sa nouvelle plaque d’immatriculation qui ne correspondait pas au modèle local. « Ah, vous aussi, vous trouvez ça bizarre ? Figurez-vous que mon garagiste voulait affliger ma voiture de plaques portant le numéro de notre département, c’est normal, mais surtout le logo de notre région, et ça je n’en voulais surtout pas. J’adore ma région mais j’exècre son nouveau logo. Il me disait que c’était maintenant obligatoire, c’est la loi et que je risquais une contravention si je m’obstinais dans mon refus.Comme je suis un vieux têtu, j’ai téléphoné à la préfecture. La dame du Service des Cartes Grises m’a bien dit que c’était la loi. Mais elle m’a bien expliqué que « La plaque d'immatriculation devra comporter obligatoirement un identifiant territorial composé d'un numéro de département et du logo de la région correspondante » et que « La référence départementale sera sous la forme du numéro actuel du département et la référence régionale sera sous la forme d'un logo régional, qui a été proposé par chaque conseil régional et arrêté officiellement par l'État. ».Mais comme je lui disais que justement, je ne voulais pas de ce logo régional, elle m’a rassuré car « cet identifiant territorial n'aura plus nécessairement de lien avec votre adresse. » et que je pouvais choisir le département que je voulais avec le logo de sa région. J’en concluais que j’avais une obligation de faire librement mon choix. Mon fils est allé sur Internet pour connaître les différents logos et après réflexions, j’ai choisi le département avec son logo régional qui me convenait le mieux.Vous allez me demander pourquoi j’ai choisi le « Centre ». Alors, c’est hautement intello,continua-t-il avec un petit sourire tout en s’appuyant sur sa bêche. Voyez-vous, le « Centre » m’évoque beaucoup plus qu’une région de France… C’est du « Centre » que tout part. Avant de tracer un cercle, il vous faut marquer un « centre »… Dans votre cercle d’amis, c’est vous le « centre »… et c’est vous qui allez agrandir ou diminuer ce cercle… C’est du « centre » que partent tous les rayons. Celui qui croit va vous vous dire son « dieu » est un « Cercle » dont le « centre » est partout… Nous, en ce moment, notre « centre d’intérêts », c’est le jardin, c’est ce qui nous rapproche et nous formons un petit cercle. Chaque nation se voudrait être le « centre » du monde dans un domaine donné… Le « centre », c’est ce qui rapproche et rayonne… Vous n’êtes pas d’accord ?- Euh…. si … présenté comme cela mais … la construction administrative de la région Centre n’a pas été réalisée sans grincements de dents et il paraît qu’aujourd’hui encore, certains regrettent que cette région soit le résultat d’un démembrement de diverses vieilles provinces : Orléanais, Berry, Touraine et Anjou, je crois. On est loin de vos interprétations, non ? - On peut dire aussi que la région Centre unit diverses cultures traditionnelles et qu’aujourd’hui, cette union est bien vécue par une grande majorité. - Si vous voulez, mais pourquoi avoir choisi le « 18 » ?- Le « 18 », c’est le Cher mais c’est aussi le N° d’appel d’urgence quand vous êtes en détresse. Et certaines choses qui se passent ici dans notre territoire régional qui m’est cher relèvent d’une certaine détresse, d’une urgence à agir. Le 18, c’est aussi un nombre « rectangle »… vous vous demandez bien ce que c’est, non ?… ça, c’est ma corde pythagoricienne… Le nombre qui mesure le périmètre ou l’aire d’un rectangle de 6 par 3 est le même soit 18. Ce qui circonscrit a même valeur que ce qui est circonscrit, égalité de tous quelle que soit sa place, égalité de Droit pour chacun devant la Loi… J’aurais pu prendre le nombre « carré » « 16 », mais les Charentes ne font pas partie du Centre. Mais surtout, j’ai choisi le « 18 » en mémoire du 18 juin 1940, jour de l ‘appel à la résistance lancé par le Général de Gaule… Vous connaissez mon parcours de soldat et de résistant pendant la dernière guerre … Je fus dans les premiers à rejoindre le Général à Londres… J’ai d’ailleurs épousé une londonienne. J’ai vu de nombreux bretons dans les camps d’entraînements anglais et beaucoup d’entre ont donné leur vie pour la défense de la liberté contre le régime nazi. Je peux vous dire que ceux qui arboraient le drapeau « gwenn ha du » étaient du côté des nazis, traquaient les résistants au côté de la Gestapo et aidaient les SS dans leur sale besogne. Combien de bretons sont morts sous la torture après avoir été dénoncés par ces sbires ? Eh bien, moi, je n’oublie pas et jamais ce truc ne sera sur ma voiture. - Ce que vous dîtes est historiquement vrai mais le Général de Gaule a voulu une grande réconciliation après la guerre pour que la France redevienne une grande puissance. Pourquoi, 60 ans après, ressassez-vous les mêmes ressentiments ? - On n’était pas obligés de prendre ce drapeau pour symboliser la Bretagne, on pouvait faire preuve d’imagination pour créer un symbole alliant Bretagne et République Française et ne pas prendre cet emblème des indépendantistes… Ils doivent bien rigoler… La République a été bonne fille. Ils n’ont pas réussi à l’assassiner alors ils l’ont violée. Et ils continuent aujourd’hui et continueront demain mais en respectant la Loi… J’ai doucement rigolé quand des gendarmes ont verbalisé des automobilistes qui avaient transformé le « 44, Pays de Loire » en « 44, BREIZH » et quand un juge a renvoyé une affaire pour cause de « baragouin »… Vous aviez vu ça aussi ? … La Loi, c’est la Loi… y’a pas de combat politique qui vaille… surtout pour ce combat-là. Et puis l’Histoire n’est pas là pour être édulcorée selon les désirs des politiques… Ils ont quand même du toupet : ils crient partout qu’au nom de l’Histoire, la Bretagne doit recouvrer ses 5 départements mais ne veulent surtout pas qu’au nom de cette même histoire, on leur rappelle leur passé récent. Vous avez lu le bouquin de Françoise MORVAN sur les milices et les résistants dans le centre Bretagne et celui sur les archives de Bretagne pendant la dernière guerre ? Ecœurant ! Surtout quand on voit le parcours politique de tous ceux-là qui ont plus ou moins collaboré ? On peut pardonner mais oublier, jamais ! Et ces zigues font pourtant tout ce qu’ils peuvent pour qu’on oublie leur sale histoire. Il y a des alliances qui historiquement sont contre la nature même d’une vraie démocratie républicaine… Si chaque personne qui s'affiche avec ce drapeau savait à quelle mouvance appartenait celui qui l'a fait, il y en aurait certainement qui réfléchirait à deux fois. C'est le symbole du rejet de la République française et de l'Etat français. En plus, c'est la marque de l'alliance du sabre et du goupillon ... Pour moi, le mettre sur ma voiture ou ailleurs, ce serait apporter ma caution à ceux qui haïssent la France... Je cause, je cause mais pendant que je suis planté là à raconter mes salades, les vôtres ne le sont pas…. Il y a un aussi un petit secret que j’ai découvert depuis : en étant immatriculé dans une autre région, on est plus gentil avec moi quand je fais une erreur de conduite en ville ou quand je roule lentement en campagne : « Encore un touriste qui cherche sa route…! » Mais dans ma voiture j’ai un drapeau breton, le vrai, l’authentique, celui qui a fait les croisades… Y’a pas beaucoup de gens à le connaître. Lors d’une promenade en week-end, j’en ai vu un fièrement flotter au haut du mat d’une péniche transformée en magasin de vêtements dans le port de DINAN. C’est la seule fois et j’ai eu plaisir à voir ce drapeau blanc divisé par une croix noire défier l’usurpateur d’ailleurs absent … sans doute avait-il préféré fuir … Alors, qu’on ne vienne pas me dire que je ne suis pas breton.Il partit d’un grand éclat de rire, empoigna sa serfouette puis, après quelques pas sur sa parcelle de pommes de terre, se ravisa :- Vous connaissez les « Bars à Breish » ?- J’ai lu les logorrhées anti françaises du Barzhaz Breizh, je suppose que c’est la même chose…- Pas du tout… rien à voir … vous en êtes loin et pourtant tout l’y ramène. Ça s’écrit B.A.R.S à B.R.E.I.S.H. et on fait bien la liaison : « barzabreis »… Je vous y emmènerai un jour… enfin si vous le souhaitez. »
Billet de blog 5 juillet 2011
Cher Centre Bretagne
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