Qui n’a entendu cette antienne n’a jamais été entrepris par un chevalier défenseur de la culture bretonne. J’ai côtoyé pendant six années des « bretons finistériens » dont beaucoup comprenaient le breton, certains le parlaient et la plupart avaient des ascendants bretonnants. Il ne me souvenait pas d’avoir ouï quelqu’un de ceux-là faire référence à cet écriteau qu’auraient du connaître leurs parents. Morvan LEBESQUE, chroniqueur de renom, y fait pourtant référence dans son ouvrage « Comment peut-on être Breton ? » sous-titré « Essai sur la démocratie française ». Au chapitre 4 intitulé «la parole assassinée », il raconte : « ... un petit demeuré qui a lâché un mot de breton comme on s’oublie dans sa culotte, un petit sale que les rires de ses camarades ne châtient pas assez. Le maître en rajoute donc : si l’enfant n’a pas réussi avant la fin de la classe à dénoncer quelqu’un d’autre, il le traîne sous le préau et lui fait épeler l’écriteau : Défense de cracher et de parler breton. Il l’oblige à nettoyer les cabinets puisque parle breton, parle cochon.... ». Emanant d’un journaliste dont la déontologie interdit de mettre en doute son objectivité et son honnêteté, un tel témoignage décrirait une parfaite illustration des agissements à la cruauté perverse des instituteurs à l’encontre des enfants bretonnants. Pierre Jakes HELIAS évoque la punition dite « du symbole » dans son ouvrage « Le cheval d’orgueil ». Sans doute est-ce son fort sentiment républicain et jacobin qui l’empêcha de citer l’existence de cet écriteau qui aurait orné chaque école. Fanch BROUDIC, qui ne peut être catalogué d’« antibretonisme primaire», consacre un chapitre entier à cette phrase dans son livre « Le breton, une langue en question ». Il fait état de ses diverses recherches pour tenter d’établir la véracité de cette assertion : (Extraits)- « Témoignage d’un enseignant occitan : J’ai été à la librairie Ar Bed Keltiek à QUIMPER, ainsi qu’au musée de l’Ecole à TREGARVAN. J’ai trouvé des tas de choses intéressantes mais je n’ai pas trouvé ce que je cherchais : une reproduction de l’affiche « Il est interdit de cracher par terre et de parler breton. »- Marcel GUIEYSSE, qui s’en prend allègrement à la politique d’étouffement qui est celle du gouvernement français à l’égard de la langue bretonne n’en fait pas état en 1936.- Ropars HEMON n’en parle pas dans « La langue bretonne et ses combats ».- Armand KERAVEL n’en parle pas dans son « Histoire sommaire de la langue bretonne » en 1966,- Elle ne figure pas non plus dans le « Livre blanc et noir de la langue bretonne » publié par GALV en 1969,- Klaoda an Dru n’en a retrouvé trace nulle part et ne le mentionne pas dans son livre pourtant intitulé « Histoire d’un interdit ».- Paol KEINEG reconnaît qu’il se pose la question de l’origine de cette inscription puisqu’il ne l’a jamais vue, même en photo. Et Fanch BROUDIG de conclure que « ... cette expression s’est donc imposée depuis une trentaine d’années, sous diverses formulations, comme une réalité d’évidence... Elle s’est imposée dans la mémoire collective de toute une région... C’est en réalité à Yann-Ber PIRIOU qu’il faut imputer la juxtaposition des deux interdits : dans un grand éclat de rire, il admet avoir délibérément choisi ce titre provocateur pour son anthologie poétique... » Conclusion :
Ne doit-on pas s’interroger sur les raisons qui animent M. Morvan LEBESQUE, lequel utilise ses notoriétés de journaliste, d’écrivain et d’essayiste pour asséner de telles contrevérités ?La défense de la cause culturelle bretonne n’aurait-elle comme seuls arguments que le mensonge, la manipulation, l’intoxication ?Quel crédit apporter aux autres affirmations dont M. Morvan LEBESQUE étaye son ouvrage et avec lesquelles il participe de cette victimisation de la Bretagne, de sa culture et ses habitants ?
Billet de blog 5 juillet 2011
Il est interdit de cracher par terre et de parler breton
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