ou les traquenards d'une colonisation par les néo-décolonisateurs.
Jusqu'à présent, je croyais que les langues gallaises continueraient de vivre, vieillir et éventuellement mourir dans la dignité et le respect de leurs diversités.
Dans mon petit coin de campagne gallaise, depuis une trentaine d'années, quelques associations, souvent d'anciens du terroir accompagnés par de plus jeunes, ont pris conscience qu'un pan de leur passé disparaissait inexorablement. S'emparant des outils modernes d'alors, ils ont collecté et enregistré « vocalement » tout ce qui subsistait comme expressions, contes, histoires, anecdotes, proverbes, dictons, chants, mélodies... Pour eux, et à juste raison, cette sorte d'embaumement permettra à nos générations futures d'apprécier les différents « parlers » (environ un par commune) avec chacun sa singularité dans la phraséologie, la prosodie, le lexique et les singulières formes de conjugaison,... L' « étranger » entend « un » gallo mais nous, nous savons que de multiples sont pratiqués et qu'ils doivent leur richesse au seul fait que ce sont des langues orales et non point « écrites », ce qui aurait obligé les rédacteurs à une « normalisation ». Les « gallos » étaient des langues vernaculaires de communication orale adaptées aux us et coutumes de chaque localité. Avant l'apparition des moyens d'enregistrement sonore actuels, des autochtones gallos ont mis sur papier des histoires en gallo. Ce travail de rédaction de ce qui deviendra une petite « anthologie de contes gallos » fit prendre conscience de l'obligation à un choix pour chaque mot, pour chaque graphie, pour chaque phrase. Choisir, c'est « éliminer ». Ecrire, c'est « perpétuer ». Ecrire, c'est perpétuer un mot en en faisant disparaître des dizaines. Ecrire, c'est normaliser, donc tuer des langues de communication orale.
Dans mon petit coin de campagne gallaise, je peste contre ces comiques qui occupent régulièrement quelques médias locaux en « dégoisant » avec l'accent français dans un néo pseudo gallo et ne font plus rire que quelques rurbains en mal d'exotisme bobo. Il leur semble suffisant de traduire « oir » en « ouère » en roulant les « rrr » ou en grasseyant pour faire « plouc ». Les langues gallaises et leurs locuteurs présents et passés méritent mieux que cela.
De mon petit coin de campagne gallaise, je vais assister à la mise à mort officielle des langues gallaises sous les applaudissements des néo-intellos. Sous couvert de la défense des langues minoritaires dont ils se sont accaparés, ils charcutent, ils dépècent, ils détruisent, ils dilapident, par une ignorance crasse, les patrimoines linguistiques avec la complicité des politiques régionaux. Depuis le 17 décembre 2004, le Conseil Régional de Bretagne a officiellement reconnu le breton et le gallo comme « langues officielles » de la Bretagne au côté du français. L'utilisation du ‘singulier' est significative : les langues « gallaises » subiront la même avanie que les langues « bretonnes » : au « breton unifié » coïncidera un « gallo unifié » qui ne correspondra à aucune réalité sauf aux nouveaux locuteurs qui pouuront se comprendre entre eux et seulement entre eux, avec l'aval constitutionnel dont l'article 75-1 stipule « les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France. » D'abord, les langues régionales appartiennent à ceux qui les pratiquent et quiconque s'arroge le pouvoir de se les accaparer pour les corrompre n'est qu'un vil imposteur. A l'instar de Louis NEMO (alias Ropars HEMON) qui « unifia » les langues bretonnes dans un unique but identitaire et autonomiste, nombreux seront ceux qui, parfois pour certains avec la même intention ou manipulés par ces derniers pour d'autres, pourront bientôt se targuer de cette reconnaissance régionaliste de meilleurs fossoyeurs des parlers locaux de langues gallaises. Alors que diverses manœuvres ont débuté depuis longtemps, le « Télégramme de Brest » du 22 novembre 2010 nous informe que le concours est officiellement ouvert avec cette déclaration de Madame Léna LOUARN, vice-présidente du Conseil Régional en charge de la politique linguistique : «En ce qui concerne la graphie commune, il s'agit d'une responsabilité qui incombe aux enseignants, écrivains et militants du gallo mais aussi aux locuteurs. Il est évident qu'une concertation aboutissant à une seule graphie renforcerait la lisibilité du gallo auprès du grand public, des collectivités et des entreprises.» A ceux qui oseraient s'interroger sur la nécessité d'une « unification linguistique des langues gallaises », Monsieur Bèrtran Ôbrée, directeur de Chubri, l'Institut d'inventaire et de valorisation du gallo, situé à Rennes répond dans ce même article que « Le travail de collecte permet de restituer une langue locale, non unifiée. Mais des besoins nouveaux apparaissent. Quand la Région demande la traduction en gallo d'un document, le texte doit être compris par tous les gallophones. On choisit donc le vocabulaire le plus courant, sans exclure des mots plus rares... Actualité, politique ou international. On devrait pouvoir parler de tout, en gallo!».
«La Région n'utilise pas le gallo dans sa communication, car il n'y a pour l'instant que très peu de locuteurs qui soient capables de le lire, et la demande sociale de son utilisation dans la vie publique est très réduite, explique Léna Louarn. Quand sera formé un nombre suffisant de personnes capables de lire le gallo, il y aura moyen de l'employer dans la communication. (...)Le breton et le gallo ne doivent pas être mis en concurrence. Ils ont chacun leur histoire et ils doivent tous deux faire face à un environnement francophone omniprésent».
On peut aussi rire de tout mais pas avec n'importe qui et surtout pas avec les tenants de la nouvelle culture bretonne. Hélas, un tel argument ne m'esquisse aucun rictus sinon de réprobation tant je le trouve plus navrant que caricatural, aussi grotesque que ridicule. On ne promeut pas les parlers locaux pour préserver un patrimoine culturel mais pour « faire face à un environnement francophone omniprésent ». Le français, voilà l'ennemi qu'il faut combattre. Comme l'on « forme » des locuteurs au néo-breton, on « formera » des locuteurs au néo-gallo pour créer « une demande sociale » et développer l'utilisation dans la vie publique de ces deux néo-langues « produites en Bretagne » « qui ne doivent être mises en concurrence » face à l'ennemi commun, sans doute. La disparition de centaines de « dialectes » gallos est donc programmée afin que quelques « élites » puissent « parler de tout en leur gallo unifié. » et puissent lire les documents administratifs rédigés en cette même langue mais avec quelle écriture ?
- L'écriture ELG, initiales de "Ecrire le gallo", actuellement utilisée par des membres de l'association Bertaèyn Galeizz ?
- L'écriture MOGA, actuellement utilisée par des membres de l'association Chubri ?
- L'écriture ABCD actuellement utilisée par des membres de l'Association des enseignants de gallo ?
- L'écriture BAP, utilisée par des membres de l'Association L'Andon dou Galo mais en voie d'être délaissée au profit de l'ABCD ?
Vouloir arcbouter son action sur la traduction des textes officiels, administratifs, ... en langue gallaise unifiée relève de l'inconséquence. Combien de personnes les liront effectivement ? On m'objecte que ces actions sont créatrices d'emplois... Certes, mais sont-ce vraiment des emplois utiles pour la défense linguistique ?Je reste convaincu qu'après quelques lignes de déchiffrages, le lecteur découragé rangera soigneusement ces productions dispendieuses dans le classeur... américain. Par contre, les locuteurs peuvent commenter en leur langue ces textes français, les critiquer et, pourquoi, s'essayer à leur traduction.
De mon petit coin de campagne gallaise, j'observe que, remontant aussi loin dans mes souvenirs, jamais je n'ai vu parent ou voisin écrire en gallo qui n'était qu'une langue usitée pour leur communication orale usuelle. L'auraient-ils voulu qu'ils se seraient heurtés à la manière de transcrire la phonétique de chaque mot avec des outils (nos lettres de l'alphabet et leurs combinaisons) inadaptés. Car la seule manière de respecter dans sa transcription toute langue gallaise est l'usage des signes phonétiques. D'autre part, bien que maîtrisant assez correctement le parler gallo de ma commune de naissance, il m'est impossible d'effectuer une « lecture silencieuse » d'un texte rédigé en « gallo ». Et même à haute voix, je suis souvent dans l'obligation de redire une phrase en changeant la prononciation d'un ou plusieurs mot(s) pour en comprendre le sens. Tentez de lire silencieusement l'histoire de « Marie Berdaodao dô sa ribotéïe », non seulement vous ne rirez pas mais elle vous sera si tôt fastidieuse que jamais vous n'en voudrez connaître la fin. Quand je compulse mon dictionnaire « Français-Gallo », j'éprouve toujours un sentiment de frustration parce les graphies ou les sens des mots proposés ne correspondent pas à mes savoirs locaux. Par exemple, chez nous, on parle « d'iaô jaouréïe » et non pas « d'iô jaurie », un râteau n'est pas un « râtet » mais un « râtiaou », une « teurte » et pas une « teurtue », un « poèr' » et non un « véro ».... Mon gallo serait-il moins gallo que d'autres ? L'évidente multiplication d'exemples similaires suffit-il à démontrer le danger de vouloir faire rentrer des cultures linguistiques dans un moule unique ?
De mon petit coin de campagne gallaise, je constate qu'une poignée d'autochtones intellectuels « politiques » accompagnés de « délocalisés » en recherche de leurs racines vont pratiquer le même « génocide linguistique » dont, pour des raisons qui les regardent, ils aiment accuser la République pour justifier leurs actions. Curieuse argumentation que celle-ci, non ? L'unification des langues (breton et gallo) seraient donc la conséquence du fait que les langues locales furent cessées d'être enseignées dans les écoles depuis l'avènement des hussards de la République. Je suis circonspect quant au fait qu'ils puissent avoir pratiqués ou entendus un quelconque dialecte gallo durant leur enfance. Cela expliquerait leur mépris à l'égard des divers parlers locaux. Voilà ce que chacun peut lire dans l'ouvrage de Anne-Marie THIESSE, « Ils apprenaient la France » (Editions de la Maison des sciences de l'homme) : « La Troisième République, assurément, a été un temps fort d'affirmation de l'identité nationale. Mais contrairement à une opinion fort répandue sur cette période, la célébration de l'identité française ne s'est pas effectuée par une dénégation des identités locales, tout au contraire. » De multiples exemples émaillent les 120 pages consacrées à l'exaltation des régions dans le discours patriotique. Concernant ce propos, les pages 76 et 77 sont croustillantes.Jean François CHANET dans « L'école républicaine et les petites patries » (chez Aubier), préfacé par Mona OZOUF démontre, documents à l'appui, la non-réalité historique des allégations proclamées ci et là.
De mon petit coin de campagne gallaise, j'observe que nos langues locales subiront inexorablement la même destinée que les langues bretonnes (Léon, Trégor, Vannetais, Cornouaille): leur remplacement « officiel » par une langue artificielle incompréhensible des locuteurs naturels. (Voir « Le breton en question » de Fanch BROUDIC, Emgleo Breiz. Page 81 : « Roparz Hemon -de son vrai nom Louis NEMO a appris le breton qui n'était donc pas sa langue maternelle- n'est pas sûr de son breton... Quand il élabore son nouveau dictionnaire, ce n'est pas pour y inclure des tournures de la langue populaire, ni davantage pour y intégrer les acquis de la linguistique, à l'égard de laquelle il est d'ailleurs extrêmement critique. Souverainement, il décide de n'y faire figurer que les termes qu'il a collectés chez les créateurs du breton littéraires, chez ses collaborateurs et ... dans ses propres œuvres. »Mais il est vrai que la disparition normale de ces derniers authentiques locuteurs laissera le champ totalement libre à tous ces intellectuels qui pourront alors s'ériger en chevaliers sauveurs des lettres gallaises. Il reste toujours une alcôve vide sur la place de la mairie de Rennes pour y ériger le symbole de leur victoire linguistique. Pour être reconnu comme défenseur de la Bretagne, il suffirait donc de normer sa culture et faire preuve d'initiatives, même malheureuses mais onéreuses si possible car le politique aime dépenser pour le patrimoine, ça rapporte des voix ! Les langues bretonnes qui disparaissent au profit du « breton unifié » par Louis NEMO, un gallo unifié qui se substituera aux langues gallaises appelées à s'éteindre peu à peu, les arts bretons qui doivent satisfaire aux règles édictées par les « Seiz breur », je n'ose évoquer les danses traditionnelles que, à ce qu'on m'a chuchoté, certains voudraient aussi standardiser. Personnellement, je pense que les habits dont nous devrions nous accoutrer quotidiennement devraient répondre à un cahier des charges spécifiques de notre Bretagne. Pardon ? Proposition pas plus ridicule que d'autres, si ? Parmi les initiatives, il en est une très à la mode, ce sont les panneaux routiers bilingues. Les premiers furent breton-français et on voit l'apparition, à ce qu'il paraît, de nouveau nom de commune « britonnisé » (CESSON SEVIGNE, en plein pays gallo où on ne parle pas breton depuis plus de 1000 ans, se transforme en SAOZON SEVIGNEG). Maintenant, ce sont les panneaux bilingues « français-gallo » avec ces réserves : - qui saura les décrypter ? - Combien de personnes cela concernera-t-il ? - Quels coûts ? - N'y aurait-il pas d'autres dépenses plus « intelligentes » à envisager ? Exemples : Eumderiâ ? Euillou qu'c'éti qu'c'eï ? et comment qu'c'éti qu'ça s'dit ? Bois Gergâo ? Sin péï ? Quelle graphie de quel gallo ou quel gallo avec quelle graphie choisir ? Exemples : Loudéac, Loudia ? Lodeiac ? Saint Brieuc, Saint Berrieu ? Saent Bérioec ? Seint Beriae ? Ploërmel, Plermé ? Ploermaéu ? Piermae ? Mais, là, c'est un argument de poids pour la création d'un gallo unifié ! Et les communes en limite linguistique pourraient avoir droit à la triple signalisation : français-breton-gallo... Mis à part leur éventuelle rentabilité sur le plan électoral, ces doubles voire triples signalétiques sont-elles bien raisonnables et utiles au développement de la pratique des langues locales ? Je suis sceptique devant cet argument qui affirme que les panneaux de signalisation bilingue participeraient du bon apprentissage d'une langue. Retour aux racines ? Combien de panneaux de signalisation ponctuaient les routes de nos arrière-grands-parents ? Les vieux bretons et les vieux gallos n'avaient point besoin d'une double signalétique. Parfaitement bilingue, ils traduisaient automatiquement « QUIMPER » en « KEMPER » ou « MEDREAC » en « EUMDEURIA ». Personnellement, quand je lis « LONDON », je pense (et même je vois) « LONDRES ».La remarque vaut pour les traductions écrites des textes officiels en « gallo ». Ils peuvent se lire en français et se commenter oralement en gallos, qui sont traditionnellement des langues vernaculaires de communication orale.
De mon petit coin de campagne gallaise, je paraphraserai la citation de Clémenceau « La guerre est une chose trop sérieuse pour la confier à des militaires », en " les langues locales rurales sont une chose trop sérieuse pour être confier aux seuls intellectuels urbains ou rurbains". La lecture des ouvrages du linguiste Claude HAGEGE (Le français, Histoire d'un combat - L'enfant aux deux langues - Halte à la mort des langues) m'incitent à être très circonspect quant aux diverses initiatives dont les fondements ignorent le contexte familial et sociétal du milieu dans lequel sont pratiquées ces langues locales.
De mon petit coin de campagne gallaise, j'entends « qu'on ne peut avoir de racines si on n'a pas de langue ». Mais en aura-t-on plus en apprenant une langue qui, puisant ses radicelles partout et donc nulle part, n'aura aucune réelle racine tels le gallo unifié ou le breton unifié ?J'entends aussi que « une langue bretonne est devenue un emblème qui matérialise et exprime la relation amoureuse des Bretons avec la Bretagne ». (« Le lobby breton » Clarisse LUCAS, Nouveau Monde Edition, page 211). Il me faudra donc pratiquer la langue bretonne officielle pour être reconnu breton et pouvoir exprimer mon amour pour ma région.
De mon petit coin de campagne gallaise, j'imagine d'autres manières pour sauver ce qui peut encore l'être avec ce postulat : la redécouverte de tout patrimoine n'est pas un outil de développement identitaire dirigé contre les institutions nationales. L'héritage culturel appartient à tous les hommes et femmes et certainement pas à quelques factions. D'abord, quand on se déclare défenseur du patrimoine qu'il soit architectural, artistique, linguistique, ... ce n'est pas pour en créer un autre artificiel, synthétique, incompréhensible de ceux qui connaissent encore l'authentique mais pour donner tous les moyens pour que tous puissent s'approprier et conserver le vrai patrimoine. Dans le domaine architectural, on entretient, on rénove dans le respect des traditions de construction notamment au plan des matériaux utilisés. On construit avec discernement : un bâtiment de facture très contemporaine pouvant s'inclure dans un ensemble de bâtis anciens, les deux époques se valorisant mutuellement. Dans le domaine des arts, on se donne les moyens de retrouver toutes les pratiques ancestrales et de les retransmettre (création d'écoles spécifiques, ...) tout en laissant les artistes contemporains s'en emparer pour les créations originales. Dans le domaine des langues, la transmission d'une langue ne peut s'effectuer que d'une manière naturelle, l'immersion est d'abord familiale ou environnementale. Immerger des enfants pendant des heures scolaires dans une pratique de langue qu'ils n'ont jamais entendue, encore moins pratiquée sans savoir à quoi cette nouvelle acquisition pourra leur être utile reste de la mystification et ce d'autant quand la « langue » apprise est elle-même le résultat, ou le fruit porteur de germe, d'une manipulation linguistique. Au risque de me répéter, toute langue locale appartient d'abord à ceux qui la pratiquent usuellement. Qu'elles soient bretonnes ou gallaises, les langues étaient et sont encore avant tout un moyen de communication orale au sein d'un groupe social défini. Le développement de cette communication « naturelle » passe bien entendu par l'école élémentaire mais pas avec un « Maître diplômé es langue locale » qui débitera ce qu'il aura appris avec l'accent français. Il faut faire appel aux vieux qui maîtrisent leur dialecte local, connaissent parfaitement les us de cette langue, ses subtilités mais surtout sauraient transmettre sa truculence. Ils pourraient animer des ateliers de conversation avec les enfants pendant quelques heures par semaine, leur diraient des contes, leur apprendraient des chansons, des comptines locales, évoqueraient le passé avec ses richesses faites de traditions disparues, leur feraient écouter les musiques locales, leur feraient découvrir le patrimoine local, les us et coutumes, le tout participant d'un travail authentique de collectage local pouvant être rassemblé dans une « maison communale des patrimoines »... les champs d'exploration, d'exploitation et de création sont infinis. D'autre part, une langue locale ne livrera toutes ses subtilités et sa richesse que si elle est utilisée en situation réelle : travaux de la ferme, fabrication du cidre, récoltes diverses, ... activités auxquelles participeraient les enfants accompagnés éventuellement de leurs parents non-gallaisans. Ensuite, avec l'aide de « professionnels », les enfants pourraient réinvestir leur connaissance du terroir dans la production de contes, de pièces de théâtre, de poésies. Les ateliers de danses ou de chants mêlant enfants et adultes ne se cantonneraient plus à un placard artificiel ouvert le jour de la kermesse mais enrichiraient la vie culturelle et relationnelle de la commune. Un (ou plus en fonction des besoins) animateur « Education nationale » par canton, issu du pays gallo et rompu aux langues gallaises* des communes dans lesquelles il interviendrait assurerait l'élaboration des projets pédagogiques en relation avec les enseignants, les animations, le suivi ... A lui la responsabilité de mettre en synergie toutes les forces vives linguistiques et culturelles du pays dans lequel il œuvre. (*: Parler gallo n'est pas aligner des mots en gallo avec la prosodie et la syntaxe du français, valable aussi pour le parler breton. Quand j'écoute des émissions en breton à la télévision, j'entends les mêmes intonations, les mêmes rythmes qu'en français. ) Au collège, sous le contrôle d'un enseignant « Education nationale » recruté selon les mêmes critères que l'animateur cantonal, la connaissance linguistique s'enrichirait de la « comparaison » des différents parlers, d'un approfondissement de la dimension culturelle des parlers locaux avec la continuation des apprentissages et de la maîtrise de la et des langues locales. A ce niveau seulement, pourrait apparaître la découverte des écrits en langue romane et leurs graphies. Au lycée, avec l'aide d'un enseignant « Education Nationale » pratiquant les langues gallaises, les élèves accoutumés à la pratique de plusieurs « gallos » pourraient avoir un regard critique sur les productions dites modernes qu'on nous vend actuellement Certes, de telles initiatives ont une seule prétention: le respect de toutes les langues locales et sans acrimonie aucune à l'égard de quiconque. Elles ne se révèlent guère grandiloquentes : Pas d'inaugurations en grand tralala d'école primaire ou de collège ou de lycée pratiquant l'immersion linguistique. Pas de belles théories sur les bienfaits du bilinguisme. Pas de grands discours contre cet état jacobin, cause de la misère culturelle bretonne. Pas de dépenses démesurées. Pas de récupération politique possible.Pas d'utilisation indépendantiste ou autonomiste antirépublicaine. Pas de clivage au sein de la population bretonne. Mais une formation éclairée du citoyen qui s'approprie son patrimoine participant de la richesse de la Nation. Donc, pas intéressant ! Donc, libre champ aux dépeceurs des cultures !
Dans mon petit coin de campagne gallaise, loin de toute pensée unique, loin de tout formatage pseudo-intello-rurbano-anthroposopho-boboïste, je ne rencontre que des personnes fières de leur campagne, fières de leurs traditions, fières de leur culture, fières d'être Breton, fières du rayonnement de leur Bretagne mais aussi fières d'être Français. Par contre, elles n'apprécient nullement que tous les objets de leur fierté soient insidieusement confisqués à des fins de basses politiques antirépublicaines. Un ami étranger amoureux de la Bretagne et amateur de nos traditions m'a soufflé sa trouvaille qui allie 3 sortes de parlers locaux : « Peuple de Bretagne, débreizh-toi vite avant qu'on ne te débraïse* ! », Je la trouve amusante et ô combien réaliste, pas vous ? * : du verbe gallo « débraïser » : baisser son pantalon.