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Billet de blog 9 octobre 2011

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L'art de la communication (fiction)

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Une naissance est toujours un grand événement qui bouleverse les membres de la famille, émeut les amis, attendrit les collègues de travail, trouble les masses. La maman est encensée, le bébé adulé et le papa toujours attendrissant.Elle peut être aussi un moyen de communiquer d’abord sur l’annonce de la grossesse puis celles à sur l’avènement de l’heureux avènement.D’abord, faites semblant de cacher la grossesse les trois ou quatre premiers mois puis distillez quelques informations aux intimes avec la certitude que certains se feront un devoir de la proclamer urbi et orbi.A l’approche du jour fatidique, communiquez discrètement sur une date et un lieu de l’accouchement. La qualité première d’une bonne rumeur étant la rapidité de sa propagation, vous serez surpris du nombre de «rois mages » qui précèderont l’arrivée de votre progéniture. Ils sont excusables, quand on connaît l’Histoire, voilà 2011 ans, ils étaient arrivés très en retard.Après quelques jours de vaine attente durant lesquels les médias, toujours à l’affût d’un fait divers qui pourrait marquer les deux millénaires prochains à l’instar de celui qu’ils avaient raté voilà 2011 ans, ont lancé leurs meilleurs grands reporters et leurs plus fins investigateurs pour avoir la primeur de l’Information. Les salles de rédaction s’agitent. Les plateaux de mi-journée et du soir relaient les informations d’envoyés spéciaux qui n’ont rien à dire.Puis, silence pendant plusieurs jours.Déçus mais flattés d’avoir été vus à la télé, les « rois mages » remballent leurs or, encens et myrrhe. Les médias rangent micros et caméras. Les envoyés spéciaux regagnent leurs pénates. Les curieux se retirent avec cette intime satisfaction du plaisir qu’ils auront à revenir.Les jours passent.Puis, un jour, à 19h50, vous paraissez seul sur le perron de votre demeure. Etonnamment, (encore une fuite) les « rois mages » la bouche remplie d’oraisons doucereuses, d’encensement matois et de mirifiques compliments vous attendent. Les médias occupent la cour. Les flashes crépitent. Les perches de micro se tendent au plus près. Les caméras tournent. La foule des curieux ébaudis applaudit.Un large sourire illumine votre visage. Vous saluez vos fidèles dont la joie explose.Vous rentrez.Une douce clameur de déception feinte accompagne la fermeture de cette lourde porte.Personne de cette assemblée n’ignore maintenant ce que vous leur prépariez depuis plusieurs jours. Tous louent votre discrétion. Tous glorifient votre sens de la famille. Tous louangent votre art de préserver votre intimité familiale… Tous attendent… Tous se perdent en conjecture sur le sexe, le prénom, la couleur de ses cheveux, ses ressemblances… Et la maman ? IL est 20h05.Soudain, l’ouverture avec une lenteur mesurée des deux battants de l’imposante porte impose un silence religieux. Le souffle en suspens, conscient de l’exceptionnalité de ce moment, chacun se hisse pour ne perdre aucun instant de ce spectacle qui, depuis plus vingt siècles, n’a encore jamais eu lieu et qui ne renouvellera jamais, sinon pas avant encore vingt autres siècles.Enfin, solennellement, vous avancez sur le perron. Près de vous, votre épouse souriante. Dans vos bras, l’enfant prési providentiel. La foule exaltée applaudit. Les journaux télévisés explosent leur audience. La première étape de la campagne se termine. La seconde peut commencer.

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