Aujourd'hui j'ai fini de lire Hector est mort, livre écrit par François Ruffin, journaliste à Fakir. C'est le résumé de 11 années d'enquête sur un accident du travail remontant à 2002, sur le chantier "d'insertion" de la citadelle d'Amiens. 11 ans plus tard, les responsables de cet accident ne sont pas inquiétés, ils n'ont même jamais été mis en cause par la justice. L'ancien maire d'Amiens, ancien ministre, et (comble de l'histoire) actuellement président du Bureau International du Travail (BIT), Gilles de Robien, est directement responsable des manquements à la sécurité sur le chantier.
Manquements, il faudrait un mot plus fort pour dire ce qu'il en était réellement. Reprenons les termes d'un des experts qui est intervenu dans la délivrance du permis de construire (que la mairie a demandé après l'accident...) : «aucun filet de protection», «aucun suivi régulier», «aucune analyse préalable», «aucune mesure de prévention», «aucune sécurité collective», «aucune précision sur le nom des personnes chargées de la sécurité». En clair : rien.
Un homme est mort, et 11 ans plus tard, les responsables de cet accident qui n'en est pas un n'ont pas de soucis à se faire, la justice y veille... Ce livre est d'ailleurs très intéressant sur ce point, sur ce qu'il révèle sociologiquement de cette magistrature pantouflarde, qui n'ose pas s'attaquer aux notables de la ville, surtout pour un banal accident du travail... Les mots du bâtonnier de la ville à l'avocate de la famille sont d'ailleurs éloquents : "j'espère que vous ne comptez pas créer d'ennuis à M. De Robien". Tous ces gens n'ont pas compris que les accidents du travail portent très mal leurs nom, c'est pas des accidents, c'est presque toujours de la négligence patronale.