Le roi Salomon avait coutume de se reposer de l’agitation et du bruit, dans le désert, loin de son palais. Un jour qu’il cheminait sur les sentiers désertiques, il aperçoit une fourmilière.
Toutes les fourmis aussitôt viennent à lui pour saluer l'empreinte de ses pas, se bousculent et s’agitent pour se rapprocher de lui.
Une seule ne s’occupe pas de sa présence. Salomon l'aperçoit à l'écart de ses compagnes. Elle reste devant son trou, occupée à un labeur apparemment infini. Elle déplace un grain de sable, le pose plus loin, revient sur ses pas.
Le roi se penche sur son corps minuscule et lui dit:
« Que fais-tu donc, bête menue ? «
La fourmi lui répond sans le regarder ni se laisser distraire de son travail :
« Vois, roi des rois, un grain après l'autre, je déplace cette dune de sable.
- Ô fourmi généreuse, n'est-ce point là un travail exagéré pour tes faibles forces ? Ce tas de sable te dépasse de si haut que tes yeux ne peuvent en voir le sommet. Aurais-tu la longévité de Mathusalem et la patience de Job, tu ne peux espérer l'effacer de ta route.
- Ô grand roi, c'est pour l'amour de ma bien-aimée que je travaille ainsi. Cet obstacle me sépare d'elle. Rien ne pourra donc me distraire de son effacement. Et si à cette oeuvre j'use toute mes forces, au moins je mourrai dans l'étrange et bienheureuse folie de l'espérance « .
Ainsi parla la fourmi amoureuse.
Ainsi le roi Salomon découvrit, sur le sentier du désert, le sens de l'amour véritable.