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Billet de blog 28 décembre 2014

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Les bancs de Léon

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

  Léon n’en avait pas fermé l’oeil de la nuit, à tel point que sa canne à laquelle on pouvait reconnaître une aptitude naturelle à la droiture et à la rigidité et qui, elle aussi, veillait, accotée au tabouret faisant office de table de nuit, se rêvait, elle-même transformée en serpent venimeux, sous le feu ardent et hollywoodien de commandements divins, et s’animant du dard.

  Le matin précédent,  comme à l’accoutumée, le bâton avait soutenu Léon dans ses pérégrinations quotidiennes. Le désormais vieillard boiteux se rendait, immanquablement, depuis quarante-et-un ans,  au Café des Phylactères. Le petit quart d’heure qui séparait son deux-pièces du rendez-vous quotidien avec l’activité de l’estaminet en  ébullition s’était, au fil du temps, distendu, la marche du pèlerin devenant forcée et chaotique. Une pause sur l’un des bancs judicieusement placés, à mi-chemin du parcours, devant la Mairie, lui permettait de reprendre le souffle nécessaire à l’oxygénation de son palpitant qui battait la chamade. Quelques amoureux sympathiques y prenaient l’air à pleins poumons et s’y envoyaient des baisers en forme de cœur. Léon leur lançait un regard complice. La canne s’étendait, du repos du juste. Mais, ce matin-là, canne et pèlerin se demandèrent si les effluves stagnants de la piquette ingurgitée, la veille au soir, au réveillon du père Léon, ne les avaient pas rendus, au bas mot, dingues. La relative douceur climatique pour la saison ne pouvait, tout de même, pas se mesurer aux cheminements, toutes eaux hors des pores, dans les dunes génératrices de mirages… Les bancs tant convoités étaient emprisonnés. Des grillages sortis de nulle part entouraient les doux objets. Amateur d’aventures et de fiction, Léon en avait vu de toutes les couleurs, durant sa chienne de vie en noir et rouge, mais des comme ça, pas encore… Quel crime avaient commis ses réceptacles de séants pour être, ainsi, incarcérés ?

  Pas d’aire de repos, pas de Phylactères.

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