Aussi loin que remontassent ses souvenirs, Philippe Henri Benoni Omer détestait les topinambours. Dédaignés par les boches au profit de la patate, ces fichus artichauts de Jérusalem – on reconnaîtra quand même la main du destin dans cette appellation – le pourchassaient depuis l'armistice comme le symbole honteux de l'ordinaire amoindri par la compromission de l'occupation. Alors que bon, au fond, c'est pas si mauvais, le topinambour ; ça nourrit son homme, ça s'accommode de mille et une façons et bien qu'ayant lui même une sainte horreur de son goût farineux, Philippe Henri Benoni Omer s'en était fadé à toutes les sauces sur une pléthore d'affiches de Propagande supposées soutenir le moral défaillant de la population. La famille française sauvée par les tubercules. Travail famille et Topinambour. Topinambour soir et matin et le tuberculeux joue du tambourin. De Vichy à Sigmaringen, il en avait soupé - le Maréchal – de ces fichus topinambours. Il en avait eu sa ration - par dessus les moustaches, ras le képi.
Aussi ne fut-il pas peu surpris quand l'Enfer, pour s'adresser à lui, choisit de lui parler par le biais d'une soupe aux maudits tubercules.
La surface du brouet s'irisa, s'agita, les croutons s'égayant dans ce qui semblait au départ une dérive aléatoire et que le Maréchal mit sur le compte de la goutte dont il s'était abreuvé à l'apéritif. Ainsi l'ennui et l'eau de vie troublent l'esprit. Belle Maman et ses sœurs le lui avaient bien souvent répété mais ici, à l'Ile d'Yeu, sa morosité et son alcoolisme avaient atteint des proportions qui... le raisonnement de Philippe Henri Benoni Omer s'arrêta net comme le mécanisme défaillant d'une horloge et il resta là, figé, le sourcil relevé et la moustache frémissante, au dessus du bol de soupe. Les croutons s'étaient alignés pour former un grossier visage et la soupe lui sourit. Là, il ne s'agissait plus de neurasthénie ou d'ivresse, on basculait carrément dans la démence. Doux Jésus...
- « Hé on reste poli ! Dit le potage. »
Au ton tranchant de la soupe, le Maréchal se figea. Les voix autoritaires ont tendance à faire cet effet aux militaires. Il fit donc le dos rond et se tint coi. Pourtant une sorte de vide dans ses yeux bleus limpides firent comprendre à son interlocuteur que quelque chose ne collait pas. Les croutons dérivèrent pour former une expression de perplexité.
- « Attends ? Tu vas pas me dire que c'est une surprise ? Tu veux me faire croire que tu ne t'attendais pas à me voir ? »
Prudent, Pétain se tortilla les moustaches : « Et bien, à vrai dire... »
La soupe poussa ce qui évoquait un soupir. Des bulles crevèrent sa surface et un parfum de souffre se mêla un instant aux relents du topinambour.
- « On m'avait prévenu que tu n'étais pas une lumière, mais quand même. Mes subalternes aurait pu te mettre au parfum. Bon. Partons du début : un peu avant tes six ans, ta Belle Mère t'a voué à nous, les Puissances d'en Bas... »
Pétain se leva de sa chaise comme un pantin à ressort. Les sensations refoulées d'une enfance mutique jaillirent dans sa conscience à l'image des secrets que la terre vomit quand des obus au phosphore lui labourent le ventre. La douceur de la peau de sa mère... Pauvre Maman … Et le parfum musqué de la femme au cœur sec qui l'avait remplacée dans le lit de son père. D'autres fragments surgirent: les longs ongles de cette femme, incongrus dans une ferme mais durs comme de la corne, les poils noirs sur ses jambes, cette lueur dans ses yeux Be … Be … Be … Belle Maman ?
Les croutons adoptèrent une symétrie cruelle: « Et oui, Be Be Belle Maman. Ta belle mère Marie Reine était une sorcière. Son Matronye complet était Marie Magdaléna Yskander Régina de la Nouvelle Lune. Et tant qu'on est dans les révélations brutales, mon petit vieux, j'ai bien peur que ta pauvre maman ne soit pas morte de causes naturelles. Cette bonne vieille Marie Régine a du l'aider un peu. »
Pétain dut s'accrocher à la table : Maman.
- « Je t'en prie » – gémit la soupe – « Epargne moi le mélodrame. Tu as un parcours tout ce qu'il y a de plus classique. Une famille paysanne, une Marâtre initiée : c'est notre schéma habituel de recrutement. ... Ainsi, je dois le préciser, que la marque de notre sens de l'humour tout particulier. »
Dans la tête du Maréchal, les images se succédaient, nettes et précises, en rafales de mitrailleuse. Ses très chers grands parents, si bons et si catholiques ! La messe qu'il célébrait, chaque jour, comme enfant de choeur, dans la petite église de Cauchy-la-Tour. Se pourrait-il que le prêtre – si gentil avec les enfants – ait eu dans les yeux la même lueur que Belle Maman ?
- « Après, tu t'es avéré assez créatif. Ta première guerre mondiale a été exemplaire. L'offensive à tout prix : brillant. Le Chemin des Dames : splendide. Et la façon atroce dont tu as réprimé les mutineries de dix sept ! Ces malheureux soldats auxquels tu as infligé tous ces procès grotesques et ces humiliations pour les faire finalement passer par les armes ! Et que je te fais fusiller par leurs propres copains des malades brûlants de fièvre et des traumatisés en état de choc profond! Bravo ! En Bas, on a applaudi de bon coeur ! Crois moi ! »
L'indignation submergea Philippe Henri Benoni Omer comme une coulée de boue noyant une tranchée. Et quoi encore!? Dès l'école supérieur de guerre, on avait salué l'audace de ses théories ! N'était-il pas l'auteur de ce mot admirable sur la puissance de destruction de l'artillerie : le Feu tue !? Et ses vues étaient loin d'être exemptes d'humanisme ! Faites vous tuer ! Aimait-il dire à ses officiers. Mais seulement si c'est nécessaire. Si vous pouvez l'éviter, ça ne me dérange pas. Alors ce n'est pas un bol de soupe aux légumes qui allait lui donner des leçons de morale. Il frappa violemment la table du plat de la main. « Calomnies ! » hurla-t-il. « Je n'ai fait que mon devoir ! »
La soupe en rit si fort que le bol faillit verser. Elle ne pouvait plus contenir son hilarité. Pétain se rassit, mutique et resta silencieux jusqu'à ce que le potage ait fini de se boyauter puis un silence pesant s'installa entre eux.
- « Ne fais pas cette tête, vieille mule ». Dit finalement le démon. « Sans nous, tu serais devenu paysan, boutiquier... Tandis que là, mon vieux : la Divine Surprise ! Maréchal nous Voilà ! Tu t'es bien amusé. Et en plus... » La soupe marqua une pause théâtrale: « J'ai réussi à t'obtenir une nouvelle rallonge : on va te recycler pour la Troisième Guerre Mondiale. »
Les yeux bleu acier de Pétain s'écarquillèrent : « La troisième guerre mondiale !? Jésus Marie Joseph! En finira-t-on un jour de la barbarie des Boches?! »
Lentement, avec patience, les croutons s'alignèrent un peu différemment.
- « Les Boches ? Mais non voyons. Ils sont lessivés là, les Schmidt, ils ont tout donné. Faut dire que le Nazisme - c'est pas à toi que je vais l'apprendre – ça a mis la barre très haut. L'alliance du pulsionnel ET de l'industriel ! Cette esthétique ! Cette rhétorique ! Rien que le slogan Arbeit Macht Freï j'ai failli m'en étouffer de rire. Non, les Allemands, on n'en tirera plus rien d'aussi bon avant longtemps. Ceux à qui on va t'envoyer cirer les bottes, dans le foutur, ce sont les Chinois.
Les Chinois? Philippe Henri Benoni Omer n'en revenait pas. Peut être le temps passé à brasser les fantasmes aux yeux clairs des nazis lui avait-il troublé les sens; mais bon, c'était un homme de convictions et il n'avait pas porté à bout de bras sa Révolution Nationale sans un socle solide de croyances racistes. Les juifs avaient leurs défauts, certes, mais eux au moins étaient blancs! Tandis que les Chinois ! Et pourquoi pas les Congolais tant qu'on y était?
La soupe marqua une pause, comme pour chercher ses mots : « Bon, entendons nous bien : quand je dis les Chinois, c'est une vision simpliste. La guerre, en fait, c'est transversal: Capital contre Travail, riches contre pauvres; mais va t'en faire comprendre ça à un militaire. Alors – hop – simplification ! La Troisième guerre mondiale : c'est les Chinois. Pour une vieille baderne Nationaliste comme toi, ce sera plus parlant. »
Le Maréchal écarta les mains en signe d'impuissance : « Oui, mais qu'est ce que je vais faire? Je n'y entends rien, moi, aux Chinois. »
- « Oh ! C'est pas compliqué ! » Reprit joyeusement le démon. « Ce qu'on aime chez toi, en Bas, Maréchal, c'est ton sens de la soumission. Les Chinois, c'est pas plus sorcier que les Fritz : tu fais tiennes leurs valeurs et tu fais du zèle. Il te suffit de transformer ton peuple en esclaves et de les faire bosser jusqu'à ce qu'ils crèvent. Usines, ateliers, bureaux, champs, peu importe du moment qu'ils triment. Tu surveilles, tu punis, tu exhortes ce qu'il y a de pire en eux pour qu'ils finissent par se fliquer les uns les autres et ça ira tout seul. En plus, on va te confier une arme secrète. Avec ça, tu n'auras plus aucune limite en termes de répression. Ce sera une question de santé publique. S'il y en a un qui moufte et que tu le fais – disons – écarteler dans une cour d'école, on applaudira encore ta cruauté comme un mal nécessaire.Tu vas a-do-rer ! »
Pétain réfléchissait. Ça vrai que tout ça semblait totalement dans ses cordes. Après tout, il était l'homme derrière le Vel'd'Hiv et la rafle des billets verts. Il avait fait déporter des milliers de juifs pour l'occupant nazi. S'il fallait se salir les mains, il le ferait. Surtout si au final, il pouvait dire c'est pas moi, ce sont les chinois.
Il n'y avait qu'un seul problème et il l'articula d'une voix chevrotante : « Les Français ne me suivront pas, voyons. Je suis trop vieux.»
La soupe frissonna, les croutons dérivant comme sous l'effet d'un ricanement étouffé : « Là, tu n'as pas tort. Mais on a tout prévu. L'ironie de la chose, c'est que cette fois, justement, ce qu'on va mettre en avant, c'est ta jeunesse. »
- « Ma jeunesse? » Philippe Henri Benoni Omer était de plus en plus perplexe.
- « Et oui ! On va te réinventer en homme jeune et beau ! A l'époque où on t'envoie, il n'y a que ça qui marche. Bon ta beauté sera lisse et normée; pas un pli qui dépasse, aucun charme, très ennuyeux. Je ne te cache pas d'ailleurs qu'avec les filles, ce ne sera pas tous les jours la rigolade. Tu vas devoir te contenter d'une vieille… » Le démon se tût et des rides amusées parcoururent sa surface: « Non, je te laisse la surprise! ».
Le Maréchal Pétain brandit ses mains tavelées à la face de la soupe : «Quelle jeunesse, Jean Foutre ?! Regarde! Comment veux-tu me faire passer pour jeune?!»
- « Métempsychose, Pépé. La réincarnation. Tu renonces à cette vieille carcasse, on t'en fournit une neuve sur mesure. Adieu le Maréchal, bonjour Monsieur le Président. Je les ai même persuadé de garder tes beaux yeux bleus!»
Philippe Henri Benoni Omer se mit à trembler. Toute couleur avait déserté son visage parcheminé, toute dignité quitté son célèbre regard. Cette fois, il avait compris au quart de tour. La réincarnation ? Ça voulait dire qu'il fallait... qu'il allait...
La soupe acquiesça : « Oui mon vieux. On n'a rien sans rien. Ton heure est venue. Je sais que tu as la trouille car en général plus vous êtes dégueulasses, plus vous êtes lâches. »
Pétain s'était levé et tournait dans la salle à manger comme un ballon espion pris dans la tourmente d'un tir antiaérien. Il voulait se rappeler les mots du Notre Père, ceux de l'Ave Maria... mais où se cachaient les anges quand on avait besoin d'eux ?!
- « Ne te fais pas de souci. » continua le potage d'une voix apaisante et impitoyable. « Je ne te quitterai pas. Je serai avec toi, là bas. Jusqu'à la fin. Pour me reconnaître, souviens toi de deux choses : je rendrai hommage à ton prénom préféré et j'arborerai – bien visible sur mon visage – une marque du Grand Néant dont je suis issu. Tu te souviendras, hein? »
Mais Pétain n'écoutait plus. Il balbutiait, bavait et trépignait : « Je ne peux mourir! Pas ici! Pas avec toi! Je suis l'âme de la France! Je suis... »
Une force incoercible ramena le Maréchal sur sa chaise. Un filament ectoplasmique s'étendit du bol jusqu'à son épaule et s'y posa comme la main familière d'un vieil ami. La pensée imbécile que sa texture rappelait celle d'un fil de fromage dans une gratinée aux oignons traversa l'esprit déjà ralenti de Philippe Henri Benani Omer. La soupe se mit à bouillir, noyant la petite maison de Port Joinville dans une effroyable odeur de mort, de guerre et de pestilence – le fumet de toutes les tranchées et de tous les charniers du monde – la puanteur de Verdun et d'Auschwitz. Pétain voulu hurler mais son cœur avait déjà cessé de battre. Le visage de croutons se dispersa, sa voix s'éparpillant en mille chuchotements qui chevrotaient comme pour endormir un enfant : Maréchal, nous voilà. Devant toi, le sauveur de la France...
Philippe Henri Benoni Omer bascula en avant et sa tête – plouf – plongea dans le bol. Bien qu'il fut incapable de proférer un son, il lui restait encore un souffle de vie et sans doute parce que l'enfer aimait à préserver sa réputation d'ironie cruelle, le Maréchal qui les avait tant détesté se noya – littéralement – dans sa soupe aux topinambours.
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Snort ! La ligne de coke lui file dans la narine. Il déglutit et le goût envahit sa gorge. C'est qu'on s'y fait à la poudre de perlimpinpin ! Si on en profitait pour se faire un petit Selfie. Un cliché à l'arrache dans des toilettes publiques, ça pourrait lui donner un petit air populaire. Populaire, peut-être pas non – faudrait pas charrier – mais débordé, oui, avec un petit coté urgence un peu canaille.
- « Monsieur le Président ! Monsieur le Président ! »
Dehors, c'est la panique, ça cogne, ça tambourine; ses gardes du corps sécurisent les lieux comme ils peuvent pendant qu'il prend son temps pour cadrer la photo. Voilà. Le menton levé, le regard bien en valeur. Les filtres merveilleux effaceront du cliché toute forme d'imperfection, n'en gardant que la jeunesse et l'éclat des yeux bleus. Hardi petit ! A la guerre comme à la guerre ! Galvanisé, il entreprend de se refaire une ligne. De l'autre coté de la porte, il y a un choc sourd et le bruit de chairs qu'on déchirent.
- « Emmanuel, c'est moi! Ouvre! »
Il ne se fait pas prier et obtempère vite fait. L'Achidémon Philippe n'est pas patient, c'est le moins qu'on puisse dire. Avec ses potes, SansTête et Préfèt Nazizi, il s'en donne à cœur joie depuis quelques jours. A croire que ce n'était pas une si bonne idée d'incruster autant d'émissaires d'en Bas au Gouvernement. Il y a un tel turn-over dans le petit personnel de l'Elysée, depuis, que ça devient difficile de trouver du monde pour les taches domestiques. Il ouvre la porte en évitant de marcher dans le sang du vigile qu'effectivement Philippe à éviscéré avant de lui dévorer la moitié du crâne. Doux Jésus ! Il en a foutu jusqu'au plafond. Ces fichus démons deviennent ingérables !
Le premier ministre s'engage dans les toilettes. Sur sa barbe poivre et sel, la tache de néant s'est encore étendue. Combien de temps avant qu'elle n'ouvre une porte sur les régions du monde souterrain et que toute l'humanité y disparaisse, hurlante, pour aller plonger dans les grands chaudrons d'en Bas?
A son regard flottant, Philippe grille direct qu'il a forcé la dose : « T'en as trop pris, Manu ! Tu vas encore zozoter. »
Le ministre infernal lui confisque la drogue et s'entaille le poignet d'une de ses griffes brûlantes pour y creuser un sillon où verser la poudre. La plaie est cautérisée instantanément et il y vide la totalité du pochon. Quatre gramme de cocaïne disparaissent aussitôt dans six paires de narines. Philippe efface d'un geste ses attributs d'en Bas et retrouve un visage humain - enfin à l'exception de l'effroyable tache.
- « Tu es carré sur ton discours au moins ? » Lui demande-t-il ?
Le Président fronce les sourcils. Allez, bon sang. Courage.Tu es la Divine Surprise. Le vainqueur de Verdun. Et pour le zozotement, il suffit d'éviter les mots en S: « On les déconthine touf à partir du onve. On aura les drones et les gav lacrymovènes. Tout le monde retourne boffer et feux qui ne font pas contents, on cogne deffus. En fe qui conferne les tefts, on ne tefte que feux que fa ne fert à rien de tefter parce qu'ils font déjà quaviment thoutus. Donc, le peu de tefts qu'on a, on les gafpille ! De toute façon les crevards vont boffer quand même. Les vieux, on maintient le cap: euthanavie papi! Je penfe qu'on peut commenfer les handicapés auffi. Perfonne ne bronffera. Alors, f'est bien hein ?
Philippe lisse ses cheveux qu'il a rares et hideux. Il se tourne vers le président et sourit largement : «Tu fais des progrès. Mais ça ne suffit pas. »
Le visage d'enfant du Président se décompose.
Philippe s'approche et plonge son regard d'un noir abyssal dans les beaux yeux bleus: «Il faut qu'ils t'en donnent plus, Manu. On était d'accord, non ? Cinquante millions d'esclaves. Une soumission totale, abjecte et sans limites. Ça ne se mesure pas avec quelques petits vieux et des handicapés... »
Le Président s'emporte : «Mais je les ai enfermés, Philippe! Humiliés! Infantilisés! Qu'est ce que tu veux que je leur arrache de plus?»
Sincèrement touché par sa rage puérile, Philippe soupire et lui pose une main sur l'épaule : « Heureusement que je suis là, Manu. Il faut tout te dire. C'est sous tes yeux et tu ne le vois pas. Ils t'ont donné les vieux, ils t'ont donné les malades... alors, maintenant, tu vas leur prendre... tu vas leur prendre... »
Le silence se prolonge. Philippe claque plusieurs fois des doigts mais rien ne vient. Les grands yeux restent vides. Le ministre secoue la tête avec indulgence.
- « Les enfants, Emmanuel. Le 11 Mai, tu vas prendre leurs enfants. »
Emmanuel en reste sans voix. C'est tellement malin. L'Archidémon renoue tendrement sa cravate et le pousse hors des toilettes d'une tape sur l'épaule.
Rassuré sur la marche à suivre, détendu, le Président Macron s'avance dans la lumière.
Quelques minutes plus tard, ses yeux bleu acier fixés dans l'objectif des caméras de télévision, il prononcera une allocution vibrante d'émotion.