On a condamné récemment une tripotée d’insoumis pour apologie du terrorisme. La plupart sont bien sûr ici de quartiers ghettoïsé et je ne pense pas que le qualificatif d’idéologue leur correspond, ni même celui de personnes embrigadées. On a surtout l’impression que la justice de classe sait frapper là où elle aime faire mal : les classes populaires, surtout si c’est bronzé. Peut-on vraiment qualifier d’apologie du terrorisme le fait de dire, même à voix forte, « bien fait pour leur gueule, aux Charlie, ils l’avaient bien cherché » ? Ce n’est pas parce qu’on est pas d’accord avec cette affirmation qu’on fait de ceux qui la profèrent des apôtres du terrorisme. En effet, faire l’apologie, c’est à mon sens se prononcer ouvertement pour le terrorisme, l’encourager, chanter ses louanges. C’est quand même pas rien. D’autre part, condamner des jeunes, pour beaucoup des mineurs, pour leur apprendre à corriger leur manière de voir les choses, est-ce réellement la bonne méthode. N’est-ce pas l’esprit de la justice des mineurs en France, que de dire qu’il faut privilégier l’éducation à la punition ? Ainsi, est-il utile de punir pénalement un mineur, si le délit qu’on lui reproche n’est pas constitué de manière formelle et certaine ?
Pour mettre en regard ce traitement, je mettrais dans la balance le sort réservé aux intégristes catholiques, ceux des commandos anti IVG. Sont-ils condamnés pénalement pour quelque délit. Alors qu’ils entravent la bonne marche d’un service, qu’ils violentent psychiquement voire physiquement des femmes et des médecins. Je mettrais aussi dans la balance ce faits divers sordide survenu ill y a quelques mois en Irlande : une Indienne, enceinte, risquait de perdre la vie si on ne procédait pas en urgence à un avortement. Mais la loi catholique sévissant là-bas fut appliqué, au mépris de la vie humaine : la mère décéda, et le bébé en gestation aussi avec.
Ne nous trompons : en agissant avec une justice expéditive et en écrasant des mouches avec un marteau, on ne fait que renforcer le terreau de la haine. J’aurais cru penser que ce qui devait l’emporter, à l’issu de ce drame, c’est l’idée de renforcer le lien social, le vivre ensemble. Que tout ça ne soit pas encore que du jargon de politicards. Mais je sois certainement n’être qu’un laxiste bien trop gentil. Cependant, j’ai comme l’impression de bien mieux connaître ces cités si souvent décrites par tous ceux si prompts à nous fabriquer des coupables.
J’ai toujours adoré ces mots d’Onnetti il me semble « juger, c’est ne pas comprendre, car si l’on comprenait vraiment, on ne pourrait pas juger. ». Le peu de fois où j’ai pu assister à des procès, j’y ai toujours vu une mauvaise parodie, un jeu social où le juge, le procureur et l’avocat sont les vedettes d’un spectacle où l’accusé et la partie civile ne sont que des figurants.