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Billet de blog 17 juillet 2025

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Ozempic, patriarcat et dictature de la minceur

Dans nos métros, sur nos écrans et jusque dans nos cabinets médicaux, l’Ozempic est partout. Ce médicament à l’origine destiné aux diabétiques est devenu l’arme chimique d’une société qui préfère prescrire la minceur plutôt que combattre la grossophobie.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Cette note propose une lecture féministe et critique de ce phénomène, entre marketing pharmaceutique, violences esthétiques et injonctions patriarcales au contrôle des corps.

💄 Le corps féminin comme terrain de contrôle.

Ce que révèle l’obsession collective pour ce médicament, c’est la violence sourde, systémique, constante que le patriarcat fait peser sur les corps féminins. Dans une société où les femmes doivent être minces, lisses, discrètes, silencieuses, le recours à un médicament lourd de conséquences pour "perdre quelques tailles" n’est pas un caprice : c’est un cri d’angoisse sociale. Un cri de survie.

Depuis l’enfance, on apprend aux filles que leur corps est un projet. Qu’il faut le mériter. Qu’il ne faut pas prendre trop de place. Qu’il faut souffrir pour correspondre. Dans ce contexte, Ozempic apparaît comme un outil de discipline corporelle chimiquement assistée, comme le corset du XXIe siècle : invisible mais contraignant, médicalisé mais socialement exigé

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🚇 Quand les couloirs du métro deviennent des couloirs de la honte.

Depuis quelques semaines, des affiches publicitaires de Novo Nordisk ont envahi les couloirs du métro parisien, vantant les mérites du “nouveau traitement contre l’obésité”. Derrière ces slogans pseudo-scientifiques, des images épurées, des silhouettes normées, et surtout, un message brutal et culpabilisant : “votre corps ne va pas bien, et vous n’êtes pas encore en train de le réparer”.

Dans un espace public déjà saturé de diktats esthétiques, voir ces messages s’imposer à toutes et tous – y compris à des adolescent·es, des personnes en souffrance, ou en parcours de TCA – est d’une violence rare. Ces campagnes normalisent l’idée que le corps gros est une pathologie, que la seule bonne direction, c’est la perte de poids, et que l’inaction face à son poids est un défaut moral. Pas un mot sur les déterminants sociaux de la santé, pas un mot sur les causes structurelles de l’obésité, encore moins sur la grossophobie médicale.

Ce que Novo Nordisk vend, ce n’est pas qu’un médicament : c’est un stigmate bien emballé dans un visuel chic, une injonction au contrôle de soi, à la conformité. Et l’État laisse faire. Aucun encadrement, aucun débat public, aucun garde-fou.

La publicité devient une arme, le métro un tribunal, et nos corps, encore et toujours, des cibles.

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💊 Une industrie pharmaceutique qui capitalise sur le mal-être féminin

Ce qui dérange profondément, c’est à quel point cette détresse a été captée, exploitée, et transformée en marché juteux. Novo Nordisk, le laboratoire qui produit l’Ozempic, a vu ses profits exploser. Et tant pis si les patient·es diabétiques se retrouvent en rupture de stock. Tant pis si les effets secondaires (nausées, vomissements, fonte musculaire, pancréatites) sont minimisés. Tant pis si des corps sont abîmés au nom du "avant/après".

Le capitalisme patriarcal a toujours su transformer la haine de soi en produit de consommation. L’Ozempic ne fait pas exception.

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🧠 Minceur, santé mentale et injonction à la perfection

Ce qu’on oublie trop souvent, c’est que ces pratiques médicales s’inscrivent dans une réalité déjà marquée par la souffrance : troubles du comportement alimentaire, dépression, honte de soi, violences médicales, et un système de santé qui préfère prescrire un médicament à vie plutôt que d’écouter les causes sociales du mal-être corporel.

Et cela, dans une société où l’apparence devient une condition d’acceptation, d’amour, d’emploi, de soin. Où chaque kilo au-dessus des normes devient un défaut moral, une "paresse", une "faiblesse".

Alors oui, bien sûr, il faut respecter les personnes qui choisissent Ozempic. On ne juge pas les stratégies de survie.

Mais on a le droit de dire : ce n’est pas ça, la libération.

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✊ Refuser l’injonction, c’est politique

Choisir de ne pas céder, de ne pas s’injecter un médicament pour se faire une place dans cette société grossophobe, ce n’est pas une faiblesse. C’est une résistance.

C’est refuser de croire que notre valeur dépend de notre tour de taille.

C’est se réapproprier un corps qu’on a tenté de nous faire haïr.

C’est dire non à la marchandisation de la douleur, de la faim, de la honte.

Il n’y aura pas de révolution féministe tant que nos ventres devront se taire, tant que nos corps devront se plier.

Et tant que l’Ozempic sera présenté comme une libération, alors qu’il n’est qu’un autre nom pour la soumission à l’ordre esthétique.

 (Merci Adrien pour la relecture <3)

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.