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Billet de blog 21 novembre 2025

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Fragile ? Instrumentalisée.

On me dit que c’est pour mon bien. On me parle de protection, de stabilité, de santé mentale. En réalité, on tente de gouverner mes relations pour servir d’autres intérêts. Ma fragilité supposée devient un argument stratégique. Voici comment s’exerce, aujourd’hui, un pouvoir affectif qui ne dit pas son nom.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

On ne me protège pas. On me façonne. On me détourne.

Il y a un phénomène très concret qui traverse mon quotidien en ce moment.
Pas une intuition.
Pas une impression.
Une mécanique réelle, observable, répétée.

Certaines personnes — des amis proches, des camarades militants, des figures qui se pensent légitimes pour parler “en mon nom” — tentent de me couper d’un lien très important pour moi.
Un lien ancien.
Un lien structurant.
Un lien qui fait partie de mon équilibre affectif et politique.

Ce lien, ils ne l’aiment pas.
Ils ne le comprennent pas.
Ils ne le contrôlent pas.

Et c’est précisément pour cela qu’ils veulent l’atteindre.

Les détails concrets : les petites interventions qui, mises bout à bout, dessinent une stratégie

Je note ici ce qui se passe vraiment, factuellement :

1. Les messages qui arrivent “par souci”

Des gens qui ne m’écrivent jamais m’envoient soudain :
— « Il faut que tu prennes tes distances, tu ne vois pas clair. »
— « Tu t’attaches à quelqu’un qui te met en danger émotionnel. »

Ces personnes ne connaissent pas ce lien.
Elles n’ont jamais assisté à nos conversations.
Elles ne savent rien des gestes qui nous unissent.
Mais elles savent qu’il ne sert pas leurs intérêts.

Alors elles s’autorisent à intervenir.

2. Les confidences “désintéressées”

On me rapporte des phrases soi-disant prononcées par quelqu’un d’autre :
— « Il parle mal de toi. »
— « Il te manipule. »
— « Il ne t’apprécie pas vraiment. »

Sauf que personne n’est capable d’expliquer , quand, dans quel contexte.
Cette information flotte, sans source vérifiable — mais elle produit son effet :
le doute.

3. Les mises en garde sous forme d’autorité morale

Dans des discussions politiques, je l’entends :
— « Tu es trop fragile pour fréquenter ce genre de personne. »
— « On veut t’éviter une nouvelle chute. »
— « Tu n’es pas en état de gérer ce lien. »

Qui décide que je suis en “état” ou non ?
Qui se donne ce pouvoir ?
Certainement pas moi.

4. Les conversations où l’on parle pour moi

Je ne suis pas là, mais on définit :
— ce que je ressens,
— ce qui me fait du mal,
— ce que “je devrais faire”,
— les distances que “je devrais poser”.

Ma parole disparaît.
Mon expérience réelle disparaît.
Ce qui reste, c’est la version d’eux :
la Charlène fragile, influençable, instable, à cadrer.

5. Les pressions collectives

Dans certains groupes, on glisse :
— « Tu devrais arrêter de lui écrire. »
— « Tu vas trop loin. »
— « On t’a vue avec lui, fais attention. »

Cette inquiétude n’est jamais neutre.
Elle sert à rendre suspect un lien qui ne leur appartient pas.

Ces détails construisent un dispositif : gouverner mes relations au nom de ma fragilité.

La sociologie nous donne les mots exacts pour décrire ce qui se passe :

Infantilisation

On me parle comme à quelqu’un incapable d’évaluer ses propres interactions.
Comme si mon vécu traumatique m’enlevait toute lucidité.

Moralisation

On transforme mes choix en faute morale :
si je maintiens ce lien, c’est “irresponsable”, “dangereux”, “instable”.

Instrumentation

On utilise ma sensibilité comme argument pour affaiblir l’autre personne —
et moi avec.

Contrôle affectif

On décide à ma place ce qui m’abîme ou me renforce.

Disqualification épistémique (Miranda Fricker)

Mon témoignage sur ce lien est systématiquement considéré comme moins crédible que leur interprétation.

Ce qu’ils redoutent n’est pas le lien. C’est ma liberté relationnelle.

Ce lien particulier m’apporte :

— stabilité,
— affection,
— honnêteté,
— compréhension,
— cadre,
— respect,
— ancrage.

Et surtout :
il n’est pas négocié avec eux.

Il ne leur doit rien.
Il ne passe pas par eux.
Il ne renforce pas leur influence.
Il ne dépend pas de leurs dynamiques internes.

Cela suffit pour qu’on tente de m’en détourner.

Parce qu’une femme qui entretient un lien qu’ils ne contrôlent pas  est une femme qui échappe à leur pouvoir.

Je refuse de devenir le prétexte d’une disqualification politique.

Car soyons francs :
l’objectif n’est pas de “me protéger”.
L’objectif est d’affaiblir ce lien pour fragiliser l’autre.

On veut que je cesse d’écrire,
que je cesse de soutenir,
que je cesse d’être présente,
que je cesse d’exister dans cette relation.

Et pour cela, on me répète que je suis fragile, instable, influençable.
Parce que si je suis fragile,
alors mes choix sont invalides.
Alors ma loyauté peut être discréditée.
Alors mes liens peuvent être gouvernés à ma place.

Conclusion : reprendre la souveraineté sur mes liens

Je refuse :

— d’être un outil dans des tensions qui ne m’appartiennent pas,
— d’être réduite à ma sensibilité,
— d’être gouvernée au nom d’une fragilité qu’on me fabrique,
— qu’on décide pour moi des relations que j’ai le droit d’entretenir.

Je choisis mes liens.
Je choisis mes distances.
Je choisis mes fidélités.
Je choisis mes risques.
Je choisis mon monde.

Et je reprends le contrôle de ce qui m’appartient : mes relations, mes attaches, ma parole.

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