Les Européens amoureux de l'amérique latine se sont souvent enorgueillis de l'intérêt portés par les politiques d'outre-atlantique à l'Union Européenne, perçue comme un modèle idéal pour le développement du Mercosur (bloc des pays du cône sud incluant également le Venezuela) ou de l'Unasur, l'union des pays sudaméricains. Au bout du compte, c'est bien l'Union Européenne qu fait l'unanimité... mais contre !
Les chefs d'Etats du Mercosur (Argentine, Brésil, Uruguay, Paraguay, Venezuela, avec comme membres associés le Chili et la Bolivie) ont fait preuve d'une rare unanimité lors de la réunion semestrielle, en condamnant, à Tucuman, au nord de l'Argentine, la dernière directive européenne sur le retour des immigrés.
Ce sont les Chiliens, pourtant réputés pur leur modération, qui ont donné le ton, Michelle Bachelet plaidant, dès son arrivée à Tucuman pour que les Latino-américains «répondent d'une seule voix sur la question des lois d'immigration de l'UE». Son compatriote José Insulza, secrétaire général de l'OEA (équivalent de l'ONU pour tous les pays des Amériques, Cuba exclu) a estimé que l'UE devait « donner des explications à l'Amérique Latine », rappelant combien la région avait accueilli d'immigrés européens dans le passé.
Signe de la mauvaise humeur de la région, c'est une autre voix réputée modérée, celle de Lula, qui a attaqué de front les Européens : « Le vent froid de la xénophobie souffle une nouvelle fois, avec des réponses fausses aux défis de l'économie et de la société. En réaction à la fermeture des Européens, les membres du Mercosur ont annoncé qu'il sera désormais possible de voyager au sein de la région sans passeport, avec la seule carte d'identité, ce qui n'était auparavant permis qu'aux membres fondateurs du bloc».
L'Europe démontre une nouvelle fois non seulement son manque de générosité et de gratitude (les miséreux italiens, allemands, français et espanols étaient ravis d'avoir une deuxième chance sur le continent sud-américain) mais aussi son aveuglement.
Les négociations commerciales avec la région seront de plus en plus compliquées alors que l'Amérique du sud se révèle être une des régions les plus dynamiques économiquement, source de l'essentiel des ressources naturelles dans le monde entier et un laboratoire politique dont on ferait bien de s'inspirer.