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Billet de blog 4 décembre 2008

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UNASUR : Il y a bien eu un massacre en Bolivie

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Six mois à peine après sa naissance, l’Union des Nations sud-américaine (UNASUR), qui réunit 12 pays du sous-continent vient de démontrer qu’elle pourrait, cette fois, être autre chose qu’un énième organisme régional. Mercredi, la commission créée en son sein pour enquêter sur les morts de plusieurs paysans à Pando, en Bolivie, le 11 septembre dernier, a présenté ses conclusions. Après avoir interrogé les deux camps, visionné plusieurs vidéos et reçu les témoignages des survivants, la commission a rétabli les faits, estimant qu’il ne s’agissait pas de simples combats entre partisans et adversaires du président Evo Morales. Elle déclare « avoir la conviction intellectuelle et morale que le 11 septembre 2008 a été perpétré un massacre dans la localité de Porvenir, ainsi que dans d’autres lieux du département de Pando ». Sans être parvenue à faire une liste exacte du nombre de victimes, la commission estime qu’au moins 20 paysans ont été assassinés.

Le massacre a eu lieu dans la région orientale, quand des fonctionnaires de la préfecture, en faveur de l’autonomie, contre le pouvoir central, aidé par des milices financées par la préfecture, ont décidé de s’opposer à une marche lancée par des paysans partisans d’Evo Morales. La commission insiste sur le caractère « organisé » de l’assassinat des paysans, et sur le fait que les meurtriers « obéissaient à des ordres articulés depuis la préfecture ». Le préfet, Leopoldo Fernandez, est aujourd’hui détenu à La Paz. L’équipe de l’Unasur dénonce également la complicité de la police locale «qui n’a pas honoré de manière flagrante sa mission de protéger la vie ».

Les détails du rapport présenté mercredi par le président de la commission, l’Argentin Rodolfo Matarollo, sont sordides. Il relate de nombreux cas de tortures et révèle que plusieurs des blessés transportés à l’hôpital ont été torturés sur place. Comme il fallait s’y attendre, l’opposition a rejeté le rapport, estiment qu’il n’avait « aucune valeur ». Le fait que le rapport ait le soutien de douze pays de la région, y compris des pays peu suspects d’amitié à l’égard du pouvoir bolivien, comme le Chili (avec lequel les relations diplomatiques sont suspendues pour cause de conflits frontaliers) ou la Colombie, l’allié local des Etats-Unis, en montre toutefois la légitimité.

Ce rapport reconnaît à une vitesse remarquable pour ce type de commission internationale, les droits des victimes, ce qui rehausse les valeurs de la démocratie aux yeux des secteurs populaires traditionnellement criminalisés. Il souligne également que les capitales latino-américaines refusent les mouvements de déstabilisations internes, même contre un régime souvent incompris et non dénué d’actions chaotiques. Le rapport de la commission est peut-être le véritable acte de naissance de l’UNASUR.