En se focalisant sur les élections américaines, on en oublie presque que la planète continue de tourner, avec ses multiples scrutins, en apparence peu importants, mais qui peuvent jouer le rôle de discrète sonnette d’alarme. C’est le cas au Chili, où les élections municipales se sont tenues le 26 octobre. Pour la première fois depuis 18 ans, quand Augusto Pinochet a quitté la présidence de la république, la « Concertation », la coalition dite de « gauche », formée par le Parti socialiste et le parti démocrate-chrétien, a perdu. Le résultat final montre une chute de 27% du nombre de villes dirigées par la coalition.
C’est le signe que la droite, incapable de retrouver du prestige aux yeux de la population épuisée par 17 années de dictature, commence à se relever, sans complexe. On pourrait s’en réjouir, et se féliciter du renouveau démocratique, si ce n’est qu’il n’a de nouveau que le nom : le parti de la « Rénovation nationale », recycle sans états d’âmes plusieurs cadres du régime de Pinochet.
Certes, il ne s’agit pas des figures de l’époque, d’ailleurs aujourd’hui trop vieilles, mais des jeunes loups estampillés « modernes » car économistes, pour lesquels le régime néolibéral imposé par le dictateur était parfait. Ils ne sont pas associés directement à la torture, à l’exil et à la mort de centaines de militants, mais au règne de l’argent. Il suffit aujourd’hui de se dire « indépendant » pour ne pas risquer d’être relié à la dictature. Ainsi Lucia Pinochet Hiriart, fille d’Augusto a été la deuxième conseillère municipale la plus votée dans le quartier de Vitacura.
Ce résultat est inquiétant pour la Concertation, à un an des élections présidentielles. Pour la première fois, elle pourrait perdre l’élection. Cela s’explique par la présidence plutôt décevante de Michelle Bachelet, incapable de résoudre des problèmes du quotidien (le transport collectif est devenu chaotique à Santiago), de réformer le système politique (il est très peu démocratique au Chili, puisqu’il assure la permanence des trois principaux partis, et refuse la représentation des plus petits, même s’ils obtiennent un nombre important de voix). Elle n’a pas su non plus donner de signe fort symbolique sur sa gauche. La population indigène mapuche, continue d’être
Dans la perspective des élections, les deux noms mis en avant pour lui succéder sont ceux d’ex-présidents : Eduardo Frei, 65 ans, qui a gouverné le pays de 1994 à 2000, et Ricardo Lagos, 70 ans, président de 2001 à 2006. Face à eux, le millionnaire Sebastian Pinera, propriétaire de la compagnie aérienne LanChile, et déjà candidat de la droite en 2005, pourrait presque apparaître comme moderne. Ce serait une sérieuse marche arrière pour le pays