Buenos Aires, son obélisque, ses librairies, ses jacarandas en fleur, ses clubs de tango... et sa statue de Peron. Le général omni-présent dans la vie politique argentine dardera bientôt de son regard les passants du centre-ville, du haut d’une statue de quatre mètres, à un paté de la Casa Rosada, le palais présidentiel. Elle sera protégée par un arc de triomphe de 11 mètres. Inutile d’y voir un complot des époux Kirchner, la construction de l’oeuvre a été décidée il y a 22 ans, peu de temps après le rétablissement de la démocratie, sous le gouvernement de Ricardo Alfonsin, un radical, mais sous l’impulsion d’Antonio Cafiero, une figure du péronisme. L’exécution de la loi a été retardée par des problèmes techniques (la statue sera à deux pas de l’héliport présidentiel) et de batailles entre péronistes su la meilleure représentation de le leur idole. Les artistes penchaient pour une statue sur le modèle des sculptures Olmecas du Mexique, qui mettrait en scène une énorme tête avec en arrière plan le drapeau argentin. Les « historiques » du mouvement ont finalement imposé un Péron debout, vêtu comme lors du 12 juin 1974, lors de son dernier discours effectué à partir du balcon de la Casa Rosada, en direction de la Plaza de Mayo. Il est mort une semaine plus tard, le 1er juillet. La décision a réveillé les vieux démons de la société. Dans la capitale argentine, qui n’a jamais eu de tendresse pour le péronisme, la perspective de voir le général à deux pas de la Place de mai, même sous forme d’une statue de bronze, provoque déjà la colère des conservateurs. Les péronistes assurent pourtant que l’Etat ne mettra pas un sous dans la construction (le monument devrait coûte 2,5 millions de pesos, (600 000 euros). Il sera payé par des donations des militants, « avec un peso, deux pesos, ce que pourra chacun » a assuré le leader du syndicat des camionneurs. Pour Moyano, le chef de la puissante CGT, « Le regard de Peron sur la Casa Rosada poussera ses hôtes à bien travailler ». Commence maintenant une course contre la montre : la statue sera-t-elle prête pour être inaugurée le 17 octobre prochain, qui commémore le « jour de la loyauté », quand Juan Domingo Perón, en 1945, alors prisonnier du gouvernement qui tenait à se défaire de ce ministre trop encombrant, est libéré sous la pression du peuple. Les péronistes auront ainsi un lieu de plus pour se recueillir, et se déchirer.
Billet de blog 11 novembre 2008