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Billet de blog 12 mai 2009

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Au Paraguay, il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain

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Le 20 avril 2008, Fernando Lugo rentrait dans l'histoire en devenant le premier élu à en finir avec la domination du parti Colorado, au pouvoir depuis 61 ans. A l'époque, c'était même la plus vieille formation politique au pouvoir. Celui qu'on appelait "l'évêque des pauvres", puisqu’il venait de la région de San Pedro, la plus défavorisée du pays, voulait se battre aux côtés de ceux d’en-bas, dans un des pays les plus inégaux de l’Amérique latine. On connaît la suite de l’histoire : moins d’un an après son élection, une série de femmes ont sugir sur la scène politique pour exiger la reconnaissance de paternité de leur enfant. Il y a d’abord eu Viviana, 26 ans, mère d’un petit Guillermo de deux ans, puis Benigna, 27 ans et son fils de six ans, et finalement Damiana, 39 ans, maman Juan Pablo, seize mois. Pour couper court à la crise, Lugo a reconnu qu’il était bien le père du petit Guillermo.

Il n’en fallait pas plus pour que l’opposition – ainsi qu’une partie de la majorité de Lugo, élu également avec le soutien de partis de centre-droite – exige son retrait de la politique, le menaçant d’impeachment. Ils ont par ailleurs soudoyé un témoin pour qu’il assure que Lugo était lié à un meurtre fameux commis en 2004.

L’opinion publique semble penser qu’il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain, si j’ose dire. Bien sûr, la surprise, et pour beaucoup la déception – Lugo se voulait le chantre de la transparence – en a fait protester plus d’un. Mais la popularité du président reste au-dessus de 55%, un mois après le scandale et son exploitation par la presse locale. L’enjeu, était de savoir si l’histoire allait se transformer en source privilégiée de blagues, ou virer à la crise. A voir la quantité de plaisanteries, chanson, et même publicité détournée, on n’a l’impression pour l’heure que c’est la première hypothèse qui l’emporte. Le Paraguay est un pays triste, brisé par la guerre à la fin du XIXème siècle. Rire pour ne pas pleurer sur ce qui peut paraître pour certains une occasion perdue de plus, peut être la solution. Le petit film ci-dessus en est un bon exemple.

On peut espérer que l’épisode fera l’effet d’un électro-choc dans un gouvernement qui peine à gouverner et surtout à mettre en place d’ambitieuses réformes. Lugo peut constater que malgré le jeu de l’opposition et la presse, il lui reste quelques marges de manœuvres politiques, dans un pays pourtant marqué par l’instabilité institutionnelle. Ses proches réalisent à quel point il est urgent pour eux de reprendre les liens avec la société, et en particulier les mouvements sociaux.