Chico Buarque vous a ému ? La voix d’Elis Regina vous remue les tripes ? Vous êtes dépassé !
Ce qui enchante le brésil aujourd’hui, et qui s’exporte, c’est le hit de l’été, « Ai, se te pego ». Lancée durant l’hiver austral, en juillet, la chanson n’a a priori aucun des ingrédients du succès mondial. Un auteur, Michel Telo, peu connu, ni de rio de Janeiro, ni de sao paulo, mais de l'état du Para. Cadence tranquille, sonorités traditionnelles, rythmée par la guitare et l’accordéon, à la mode de la musique sertaneja, du fin fond du Brésil. Mais des paroles simples, une ritournelle entêtante, et une chorégraphie simplissime dont le public s’est entiché, et que des stars du sport ont popularisée. Rafael Nadal a dansé sur ce rythme pour fêter sa victoire à la Coupe Davis. Et le « beau gosse » star du Real Madrid Cristiano Ronaldo en a fait de même en octobre, pour fêter un de ses buts – l’élégance n’est pas toujours le propre des joueurs de foot, la chorégraphie étant un peu grossière…
Internet et les réseaux sociaux ont fait le reste. Fin décembre, la vidéo du hit avait été vue plus de 94 millions de fois sur Youtube. Alors que la langue portugaise s’exporte peu, c’est la musique la plus téléchargée sur Itunes au Portugal, bien sûr, mais aussi au Chili, en Argentine, au Pérou, en Colombie, en Espagne, en Allemagne et en Pologne. En France, on se l’arrache déjà chez les jeunes.
Au Brésil, c’est une revanche de la musique traditionnelle contre le funk ou les airs étrangers, et un symbole de cette nouvelle classe moyenne conquérante, avec tout ce qu’elle porte d’espoir – plus de 40 millions de personnes sorties de la pauvreté – et de déceptions – un modèle fondé sur une culture de bas étage et la consommation comme axe de vie.
La rumeur veut que Michel Telo, le trentenaire le plus demandé au brésil, soit en train de préparer une version en anglais pour définitivement conquérir le monde. Pour la version en français, des fans anonymes ont déjà planché, voyez plutôt : http://www.youtube.com/watch?v=IMqTL7SLnYY&sns=em