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Billet de blog 17 novembre 2009

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Une entreprise franco-britannique accusée de violation de droits de l'homme en Amazonie

 La compagnie franco-britannique Perenco va-t-elle recevoir le « prix Pinocchio 2009 » dans la catégorie «droits de l'homme » ?

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La compagnie franco-britannique Perenco va-t-elle recevoir le « prix Pinocchio 2009 » dans la catégorie «droits de l'homme » ? Elle est en tout cas une des premières nominées de cette distinction délivrée par l'ONG des Amis de la Terre (http://www.amisdelaterre.org/), qui dénonce les entreprises françaises qui ont « perpétré les violations les plus graves des droits de l'homme ». Le projet en question est une exploitation pétrolière d'un coût d'un milliard de dollars dans une région de l'Amazonie péruvienne habitée par deux des derniers peuples indigènes isolés du monde.

Cela fait déjà plusieurs mois que Perenco est au centre de la polémique. L'AIDESEP, l'organisation nationale des Indiens d'Amazonie péruvienne, a d'ailleurs porté plainte devant la Cour constitutionnelle pour stopper un projet de prospection pétrolière dans la concession, dite Lot 67, située au nord-ouest de l'Amazonie péruvienne. L'entreprise a reçu l'autorisation de prospecter moins de deux semaines après des massacres qui ont eu lieu début juin, à Bagua, dans le nord du pays. Les affrontements, qui ont découlé de l'attaque des forces de police contre une manifestation indigène pacifique a fait plus de trente morts parmi les policiers et les civils.

Cette explosion de violence, relayée par la presse internationale, avait poussé le président Alan Garcia à reconnaître que les consultations des peuples indigènes étaient bâclées. A l'instar du président de Perenco, le chef de l'Etat nie la localisation de tribus d'indiens isolés dans ce lot, et plus généralement, leur existence. C'est pour cette raison qu'en mai 2008, la Funai, la fondation nationale brésilienne de l'Indien, a mis fin à un tabou en publiant des clichés d'une tribu d'Indiens dits isolés, c'est-à-dire totalement coupés du monde, découverts dans l'Etat brésilien d'Acre, à la frontière du Pérou. Cela fait plus de vingt ans que la Funai survole ces tribus, sans jamais s'en approcher, ni surtout divulguer les coordonnées de leurs campements. Le moindre contact, même plein de bonnes intentions, peut en effet s'avérer fatal. Le corps de ces Indiens n'est en effet pas immunisé contre les maladies importées de l'extérieur. A l'époque, la Funai soulignait qu'outre les virus, ces tribus étaient de plus en plus victimes des compagnies minières et d'hydrocarbures, des chercheurs d'or et des agriculteurs, prêts à tout pour s'approprier les ressources de leurs territoires. La fondation ne cachait pas que sa campagne de prise de conscience était ouvertement orientée vers le gouvernement péruvien. Si le Brésil ne fait pas toujours les efforts nécessaires, il reconnaît au moins formellement l'existence de plus de 70 tribus d'Indiens isolés sur son territoire. Le président Alan Garcia préfère parler d'un mythe.

Le gouvernement péruvien persiste par ailleurs dans sa posture répressive, malgré les violents affrontements du mois du juin. Le ministre de la justice s'est en effet dit en faveur d'une dissolution de l'AIDESEP. Créé en 1980, le mouvement représente 350.000 Indiens d'Amazonie péruvienne. Cette annonce a provoqué un scandale dans le monde entier, de nombreux peuples indigènes d'autres régions, du Botswana au Canada, ont en effet condamné Lima.

La nomination de Perenco au prix Pinocchio 2009 appelle une nouvelle fois à la prise de conscience. Alors que le monde s'apprête à discuter, à Copenhague, les réductions de gaz à effet de serre, il faut se rappeler que les enjeux ne sont pas environnementaux, mais également humains. L'ONG Survival International compte sur l'opprobre pour influencer l'entreprise franco-britannique. « Ce prix est extrêmement embarrassant pour la compagnie Perenco. Une manière de ne pas le remporter serait qu'elle abandonne son projet avant le 24 novembre », argue Stephen Corry, directeur de l'ONG. C'est en effet la date à laquelle seront annoncés les « vainqueurs » du prix. En attendant, pour voter en ligne, il suffit de rentrer sur le site suivant : http://www.prix-pinocchio.org/nomines.php#

Une autre façon de se mobiliser, de façon plus ludique cette fois, c'est d'assister au concert exceptionnel qui sera organisé lundi prochain 23 novembre au théâtre de l'Européen à l'occasion des quarante ans de Survival. L'objectif est de récolter des fonds destinés au financement des campagnes que mène l'organisation en faveur des peuples indigènes. La chanteuse de folk et blues Grace, qui parraine la manifestation, interprétera ce soir là "Imagine one day", alors que la pianiste Dana Ciocarlie exécutera notamment des morceaux de Haydn, Schubert, Liszt et Bartók. Allez-y !

Théâtre de l'Européen 5, rue Biot 75017 Paris

Renseignements et réservations tél. 01 42 41 47 62 dd@survivalfrance.org

(photo Funai)