Il y a des villes qui vous marchent dessus, qui se dérobent, qui sèment votre parcours d’embûches et de billevesées pour vos décourager. Il y a des villes où la pluie serait la bienvenue. Des villes que l’on parcourt le corps posté de post-it pour ne pas oublier de tourner au bon endroit. Il y a des villes dont on cherche la sortie des années durant. Dans Le secret des mages du trident rouge, il y a une ville comme ça, une ville où on se dit, bordel mais qu’est-ce que je fais ici, pourquoi je suis venu habiter là ? Ces habitants-là sortent tout juste d’une série de meurtres, que voilà, c’est reparti. Une ado se fait trucider, décapiter, le truc moche, le truc du samedi soir à la télé, sur M6, avec Buffy et les 3 sorcières. Ou un vendredi soir, pour les plus jeunes, avec Abby à la science légale et Grissom aux questions judicieuses.
Sauf qu’ici, ça se passe en France, et c’est écrit par Maurice D’accord : « Le secret des mages du trident rouge ». C’est surtout un roman aussi bien ficelé qu’écrit, qui vous pose une ambiance dès le début, en quelques paragraphes.
" Tranquille, la ville était tranquille.
Passés ces effroyables crimes chez les bonnes sœurs, depuis que ce nouveau commandant de gendarmerie avait pris ses fonctions et résolu l’affaire en deux temps trois mouvements ou presque, le calme régnait.
Il était temps, remontaient dans les mémoires d’horribles histoires, des crtimes jamais résolues, meurtres plus atroces les uns que les autres, mutilations, éviscérations, rites sacrificiels…
[…]
A quelques mètres derrière Crevette, Eddy sue sang et eaux, se maudissant in petto d’avoir cédé à la demande récurrente de son pote : courir avec lui chaque semaine.
Ça te fera du bien, lui a-t-il répété à l’envi, sauf que là il n’en peut plus, encore un tour de ce parcours interminable et il va y laisser la peau."
Dans l’écriture de Maurice Daccord il y a la lumière. Dans les horreurs racontées et décrites, Daccord cache une porte de sortie, un petit écriteau à peine éclairé pour que l’on s’y retrouve : de l’humour partout et des personnages truculents. C’est exactement le mot, ses personnages sortent d’un imaginaire à la Fellini, ils parlent comme du Audiard. Mêmes les rôles secondaires prennent place au premier rang. Les pages tournent et on a envie de fermer le livre et d’aller prendre un verre avec eux, avec tous.
" Eddy Baccardi, soixante-cinq ans, toutes ses dents, pas de corset. Cet ancien chef de service aux assurances, le Parapluie, « Avec le Parapluie, finis les ennuis ! », est né français de parents italiens. Dans sa nouvelle vie il est le Barrolo des amours brisées, en compagnie de Léon il est devenu le pizzaiolo du crime.
Depuis qu’il est à la retraite, Eddy fait dans l’écoute… Véritable ministre des couples quand ce n’est pas les coulpes, il exerce son saccerdoce en confessant les personnes divorcées ou en passe de l’être."
Alors on se dit c’est ça, c’est du feuilleton +, +, +, c’est addictif, on veut savoir, on veut comprendre, on veut continuer d’arpenter cette ville malchanceuse, surtout si c’est en compagnie des 2 compères, Crevette et Baccardi.
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Le texte est extrait du numéro 1 de la revue "La Nuit du Dimanche", disponible ici : https://revue.lanuitdudimanche.fr