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Billet de blog 2 mars 2015

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RÉFLEXION SUR LA "CULTURE" (1)

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Ce qui suit est un texte que j'ai écrit en 2002 lors de la création de notre compagnie de spectacle vivant.

Ce texte constituait la" Note d'intentions " nécessaire pour obtenir une subvention d'état. Certains paragraphes vont dans le sens du poil, d'autres sont plus agressifs, devinez lesquels.

 Si je poste ceci, c'est pour montrer l'évolution de la réflexion d'un professionnel, choisi au hasard (moi, en l'occurence). Depuis, ma position s'est un peu radicalisée, vous le verrez dans le n° 2

Culture : que de sens donnés à ce mot et partant, que de définitions

Je pose des définitions :

-L'éducation est ce qui nous permet d'évoluer à l'intérieur d'une société.

-L'érudition, ou savoir, nous donne la possibilité de nous acquitter de certaines tâches avec le maximum d'efficacité.

-La culture nous donne la possibilité de comprendre notre environnement et son évolution apparente : elle constitue l'enveloppe des deux précédentes.

-L'acte créatif est une réponse à un inconfort, matériel ou spirituel qui n'était pas ressenti comme tel auparavant.

Le chemin le plus souvent emprunté est celui qui partant du mot "culture" nous mène en réalité à "ensemble de comportements". Apparaissent des locutions du genre "culture populaire' et même "culture religieuse". Ce qui à tous le moins constitue un abus de langage.

Toutes ces "cultures" sont des comportements ritualisés par un groupe donné en un temps donné et devraient plutôt être nommés "expression populaire", "comportement religieux" car elles n'ont pas ce caractère intemporel qui fait qu'une poterie chinoise ou une peinture rupestre saute les siècles et les civilisations pour toucher notre sens du beau.

La plupart des réflexions conduites à propos de la culture posent que celle ci est appuyée sur l'acte créatif ou que l'acte créatif est à l'origine de la culture.

Je veux avancer mon opinion sur l'émergence du fait culturel,

Le besoin culturel peut être ressenti lorsque la survie est assurée. Ce qui implique l'existence d'une société, au moins dans sa forme la plus simple. A ce stade de l'histoire, certains choix de comportements ont déjà été adoptés, même à tort du moment qu'ils se révélaient utiles ou nécessaires. Les comportements sociaux de récompense ou de punition, de pouvoir ou de sujétion étaient en place. L'éducation avait fait son travail de cohésion, l'érudition, son travail de hiérarchisation professionnelle, les comportements étaient codifiés mais soumis à révision : la niche de la culture pouvait trouver sa place dans la société humaine.

A partir du moment où l'esprit humain n'était plus en permanence sollicité par les problèmes de survie, il pouvait trouver le"temps des questions" dont les réponses sont à l'origine de la culture.

 Ces réponses sont examinées et validées ou non par les générations suivantes, sans limitation de la durée de l'examen. Certaines sont " vraies" immédiatement et le restent (comme les peintures rupestres), elles entrent dans ce que j'appelle culture. D'autres, par contre, demandent plus de temps pour l'examen, mais finissent par être réfutées (comme les sacrifices humains), elles sont à ranger dans les comportements.

Le résultat de cet examen séculaire est notre culture.

Un acte créatif n'est pas culturel par le fait qu'il est admis comme tel par les membres d'une société, pas plus qu'un mensonge accepté par une majorité ne devient une vérité.

L'acte créateur d'une religion sanguinaire ou des navrantes majorettes n'est que la mauvaise réponse à une question limitée par la paresse. Que cette question soit plus vaste dans sa formulation, et la réponse (qui sera plus complexe), sera plus juste.

La démocratisation de la culture s'est souvent faite d'une façon telle que les résultats en ont déçus les initiateurs. Pour la diffusion de la culture, je ne sais que trois voies possibles:

-La première procède de l'imprégnation, par la "naissance". Pour le bénéficiaire, elle va de soi.

-La seconde, plus commune, nécessite la participation de missionnaires, d'enseignants.

-La troisième, moins connue, est l'appropriation d'un patrimoine auquel "on" n'a pas droit.

Transmission héréditaire, Distribution, Vol : Trois mécanismes d'acquisition que l'on retrouve dans tous les moyens de diffusion des biens, qu'ils soient matériels ou non.

La Transmission se révèle avoir un excellent rendement. Les bénéficiaires peuvent en critiquer les modalités, ils en acceptent les avantages.

La Distribution n'a de limites que celles des "missionnaires". Celles ci sont, hélas, vite atteintes.

Le Vol n'est pas compris, pas étudié. C'est à dessein que j'emploie le mot "vol", car les bénéficiaires s'emploient bien vite à le légaliser, le "blanchir".

L'étude du vol culturel reste à faire. En attendant ce jour, on ne peut éviter que la pierre de touche de ce qui est classé "Beau", "Bon", "Bien", soit entre les mains des élites issues de la "Transmission", plus rarement de la "Distribution" et exceptionnellement du "Vol", grâce au pouvoir qu'ils ont de subventionner les actes de création, ou par leur possibilité de mécénat. Mais la culture exerce sur eux aussi son travail de sélection, et j'espère qu'ils tiennent à ce que l'avenir leur donne raison quant à leurs choix d'aujourd'hui.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.