Ma haine (bis)
Dans une précédente lettre, je vous parlais de ma haine, et je vous la décrivais comme une chose molle, un chiffon enveloppant toutes les petites trahisons des humains, les minuscules bassesses, les microscopiques reniements, les mensonges anodins qui, ajoutés les uns aux autres, font de ce monde le pire endroit où vivre pour un esprit naïf. Naïf, je le suis, et plus vraisemblablement niais. Tout comme un niais, je passe de l'espoir et de la confiance à la colère la plus noire lorsque je m'emmêle dans les ficelles que les petits menteurs et petites menteuses laissent traîner un peu partout.
Tous ces hommes et toutes ces femmes, qui furent des enfants naïfs et trahis, n'ont eu qu'un désir : sortir de cette naïveté qui leur a valu tant de sarcasmes. Tous, ils ou elles, renient l'enfant qu'ils ont été, tous, ils ou elles, ont lâché la main de cet enfant trompé, moqué, détrompé. Tous se sont dits qu'il fallait hurler avec les loups, tous ont déclaré que puisque "c'est comme ça que ça marche", il fallait faire avec.
Tous, au sortir de l'enfance, ont noués des liens de complicité avec leur entourage afin que leurs rejetons sortent également de cette naïveté qui les gêne tant dans leurs souvenirs, et plus encore dans leur présent.
Parfois, ils ou elles font une déprime, ils ou elles n'aiment pas leur vie, ils ou elles demandent et se demandent ce qu'ils pourraient bien faire pour que ça change. Les imbéciles! Ils ou elles n'ont jamais pensé, ne serait-ce qu'une fois, à cesser de faire. Ils ou elles veulent ajouter un nouveau "mieux" à leurs vies rapetassées. Les imbéciles! Rajouter du sucre sur une pomme au quart pourrie masque le goût de pourriture mais la diarrhée qui suit ne se masque pas. Les imbéciles! Ils continuent à faire alors qu'ils devraient arrêter, arrêter d'avoir honte de l'enfant qu'ils ou elles ont été, l'enfant qui dit que le roi est nu!
Quand je les côtoie, ma haine rebande.