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En fait, j’ai toujours voulu être écrivain. Et puis, la retraite, le temps libre, l’envie, le désir, et puis c’est parti, j’ai franchi la ligne

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Billet de blog 25 mars 2013

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Le chaos, le choc et la catastrophe.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Beaucoup de littérature sur ces sujets,  mais peu sur les liens entre eux,  et pourtant.

Pour résume d’une façon très succincte, la théorie du chaos en science (voir ICI),  traite de systèmes qui présentent un phénomène d'instabilitéaux conditions initiales et qui les rend imprévisibles à long terme. Un bel exemple en est donné avec les phénomènes climatiques qui, en fonction d’un changement des conditions initiales, peuvent parfois devenir des catastrophes naturelles ou pas.

Appliqué en économie, la théorie du chaos, ou plus exactement la stratégie du choc (voir ICI) est un essai publié en 2007 par la journaliste canadienne Naomi Klein, et qui démontre que les catastrophes naturelles ou les guerres civiles (donc le chaos) engendrent naturellement  des chocs psychologiques au sein de la population, et donc une dépendance quasi automatique à suivre toutes consignes des leaders politiques, et notamment les réformes économiques ultra libérales qui n’auraient pas été possible à mettre en œuvre sans ces chocs. Les plus grands adeptes de cette école de pensée économique en furent Reagan, Thatcher et Bush.

Puis advient la crise financière de 2007 et 2008, la plus importante depuis un siècle et qui perdure encore aujourd’hui, surtout en Europe, plongeant maintenant la population dans un désarroi et un désespoir propice à mettre en œuvre ces réformes ultra libérales, propice à plus de profit.

Son application, fortement mis en œuvre sous le gouvernement précèdent,  est maintenant poursuivi par le gouvernement de gauche, qui applique les mêmes formules (catastrophes annoncées avec la dette qui augmente, la montée du chômage, la récession, le déficit des différentes branches de la protection sociale), et  poursuit ainsi, les réformes libérales qui viendront détricoter les acquis sociaux (marché du travail, retraites, allocations familiales, sécurité sociale, et tant d’autres à venir).

L’exemple le plus flagrant en est cette future réforme des retraites.  En 2010 une majorité de français était contre l'allongement de l'âge de départ à la retraite, en 2013 c'est le contraire. Pourquoi? Parce qu'on a conditionné une majorité d'entre nous à penser que c’est la seule solution pour sauver les retraites et pour qu’on fasse nous-même ce choix. Ensuite on réforme. Et la dernière étape sera de faire passer les retraites du domaine public (organisme d'état et égalité pour tous), à un domaine privé (retraite par capitalisation et pris en charge par les sociétés privées d'assurance), comme dans les pays anglo-saxons.

Oh, cela ne se fait jamais en une seule fois, mais par réformes successives pour ne pas trop heurter l’opinion publique.

En terme de management dans les entreprises, cela s’appelle la technique du boulon, on le fait doucement pour ne pas casser le filetage, mais tour après tour. Et quand c’est fini, les acquis sociaux sont remis en cause. Le chaos : la mondialisation et la crise économique, le choc : les licenciements et le chômage, le boulon : les salaires et le temps de travail.

La loi de Murphy (voir ICI) est un principe, très présent en gestion des risques de toute nature, selon lequel si une action comporte des risques, elle va très certainement devenir une catastrophe. Erigée en méthode dans le domaine de la  psychologie des foules, elle énonce le principe qu’un événement négatif marque plus les personnes  qu'un événement positif. Et devient donc une vérité immuable, et c’est ainsi que les trains sont toujours en retard, l’insécurité est partout, la dette publique est insoutenable, les réformes avec moins de protection sociales (voir ICI) sont inéluctables.

Les évènements négatifs deviennent des vérités, et les changements pour les inverser indispensables. Et la commission européenne de l’ériger en principe intangible pour le pacte de stabilité et les plans de rigueur qui en découlent : « On ne peut pas faire autrement » (voir ICI).

Et le plus bel exemple flagrant en est ce plan de sauvetage de Chypre (voir ICI), et comme le dit cet économiste : « L’opération est un succès. Dommage, le patient est mort. »

Par contre, les évènements positifs sont oubliés et deviennent des contre-vérités, la majorité des trains sont à l’heure, la criminalité a baissé en France depuis 25 ans  (voir ICI), les dettes des états sont une vieille histoire depuis plusieurs siècles avec des hauts et des bas (voir ICI), et la protection sociale de la France a permis de mieux résister à la crise que chez nos voisins européens (voir ICI, ICI, et ICI).

Les quatre piliers de ce chaos, de ce choc et de cette catastrophe annoncée,  ce sont les experts économiques qui en parlent,  les médias qui les relayent, la commission européenne qui l’érige en dogme, et nos politiques qui distillent le même message, baissant ainsi les bras.

On peut se souvenir de cette analyse de Danièle Mitterrand qui dans ses souvenirs évoquait cela : «  Mai 1981 fut un mois de grande activité, car c’était la préparation de l’arrivée au pouvoir de François. J’essayais d’apporter tout ce qu’il y a de meilleur en moi, pour que ces rêves d’avoir une société socialiste, quoique à l’européenne, deviennent réalité. Mais bien vite j’ai commencé à voir que cette France juste et équitable ne pouvait pas s’établir. Alors je lui demandais à François : Pourquoi maintenant que tu en as le pouvoir ne fais-tu pas ce que tu avais promis? Il me répondait qu’il n’avait pas le pouvoir d’affronter la Banque mondiale, le capitalisme, le néolibéralisme. Qu’il avait gagné un gouvernement mais non pas le pouvoir. J’appris ainsi que d’être le gouvernement, être président, ne sert pas à grand-chose dans ces sociétés sujettes, soumises au capitalisme. J’ai vécu l’expérience directement durant 14 ans. Même s’il essayait d’éviter le côté le plus négatif du capitalisme, les rêves ont commencé à se briser très rapidement. »

On pourrait ajouter à cette liste d’il y a trente ans : le FMI, la commission européenne, l’Eurogroupe, l’OCDE, et tant d’autres.

Pour les experts économiques, rien à ajouter par rapport au livre de Laurent Mauduit sur les  « Imposteurs de l’économie » et à son article (voir ICI) récent qui en reparle.

Pour les médias, rien, non plus à ajouter sur l’analyse sans concession de la connexion entre la plupart d’entre eux et les communicants (voir ICI) de François Bonnet.

Quant aux politiques, ils n’échappent pas à la règle générale et à la forte pression des lobbies financiers (voir ICI).

Reste un élément qui échappe parfois à toutes ces règles et théories, le chaos est imprévisible à long terme, et Chypre pourrait en être l’exemple.

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