C'est ce genre de constat qu'on aurait pu faire le 31 juillet, en suivant sur le petit écran les phases finales de la natation, se succédant à un rythme soutenu dans l'enceinte de la piscine olympique survoltée.
C'est que le nouveau prodige de la natation française, Léon Lemarchand, était décidé à rafler ce soir là les deux titres olympiques des finales de papillon et de brasse, programmées à deux heures d'intervalle.
Titres s'ajoutant potentiellement à celui qu'il avait déjà empoché en nage libre.
Ce qu'il est parvenu à réaliser, en se transcendant littéralement sur celle du papillon où la concurrence était pourtant redoutable.
Alors, chapeau bas, Léon !
Il n'en reste pas moins que la liesse généralisée qui s'est emparée du public pour la personne de Léon, à mesure que ses prouesses sportives étaient remarquées, peut paraître excessive à qui n'est pas un assidu des compétitions de sportifs de haut niveau.
Chez eux, on peut en effet admirer la performance, la beauté du geste, l'engagement, le courage face à l'adversité, l'empathie pour leurs concurrents, pourquoi pas la relation fusionnelle avec le public.
Tout cela est très humain.
Mais lorsque les performances se font exceptionnelles, comme celles réalisées par Léon dans le bassin des JO, il se passe autre chose.
Le public est alors comme en lévitation, la personne même du sportif semblant prendre l'ascendant sur ses performances.
On voudrait le toucher, le retenir, le figer, inscrire sa personne dans un cadre devant lequel on pourrait à loisir se recueillir.
On a même pu entendre le public, à la suite de la cérémonie de remise à Léon de sa dernière médaille de la journée, chanter l'inaltérable
"Que je t'aime", autrefois reprise par les fans électrisés de J.Hallyday.
Léon serait-il en train de combler un vide chez les personnes qui l'encensent à ce point, comme si leurs propres ressources émotionnelles n'étaient pas suffisantes pour envisager de se passer de maître à penser, maître à faire, maître à rêver, maître à admirer ?
Car, à l'issue des JO, la vie quotidienne va reprendre ses droits, et il n'est pas sûr que Léon, aussi talentueux soit-il, et les émotions XXL qu'il aura suscitées, leur soient d'une grande aide pour affronter ses inévitables vicissitudes.