Le film d'Oliver Laxe a obtenu le prix du jury au festival de Cannes 2025. Celui-ci l'a qualifié d'odyssée mystique ; c'est beaucoup d'honneur. Film très aimé des cinéphiles et des connaisseurs de la mode, le magazine Numéro, par exemple.
On commence dans le désert sud-marocain. Dans une rave techno. Transe obtenue par pulsations qui prennent le ventre et le corps entier. Cette musique qui raréfie et remplace toute parole continue au long du film.
L'armée arrive, veut emmener la petite foule. Mais les raveurs s'échappent, deux camions et une camionnette filent vers une autre rave, loin, proche de la frontière avec la Mauritanie. Dans une halte ils aperçoivent un convoi militaire qui va dans la même direction qu'eux, ça sent mauvais, ils décident de passer par la montagne. C'est le thème donné deux fois : s'échapper.
Les deux camions : ceux des cinq raveurs. C'est un mode de vie. On est bien équipés. Mobilité puissante, un équivalent, peut-être, des motos du film de Dennis Hopper (1969). La camionnette : celle d'un père et de son fils qui cherchent leur fille et sœur disparue. Les incidents viennent de cette disparité de forces, le plus faible ne peut franchir les obstacles. De là naissent l'entraide, des épisodes de fraternité. Routes de cailloux au bord de précipices. Plus c'est difficile et dangereux plus on s'attache au petit groupe – une manipulation déplaisante, après coup. Oui, la camionnette, frein à main lâché, qui roule de plus en plus vite et tombe dans l'abîme avec l'enfant et son chien, c'est déchirant.
Restent deux camions, six personnages. De retour dans la plaine les camions et trois personnages disparaîtront. Pulvérisés par mines. L’armée était encore là.
La dernière image est celle d'un très long train qui va à bonne allure dans le désert. La caméra le survole. Sur le toit des wagons des milliers de passagers allongés, entassés. Parmi eux dispersés les trois personnages restant. Regards vagues, on suppose remplis des scènes atroces qu'on vient de voir.
Voici donc le scénario réduit à l'os : les seuls qui s'en sortent c'est l'armée et le chemin de fer.
Mettez-vous ça dans le crâne : on ne s'échappe pas, retour à l'ordre.