« Okay, I’m sorry, I (h)ate your fish, okay ? » (« D’accord, je suis désolé, j’ai avalé / je haïssais ton poisson, d’accord ? ») … « Revenge ! » (« Vengeance ! »). Tel est, en substance, le dialogue hilarant de la célèbre comédie absurde A Fish Called Wanda (Un poisson nommé Wanda, Charles Crichton, 1988, EU-RU, 108 min., avec John Cleese, Jamie Lee Curtis, Kevin Kline, Michael Palin) après qu’Otto West, psychopathe susceptible, a sorti de son aquarium puis avalé, avec sadisme, le poisson dénommé Wanda du bègue Ken Pile, qui n'aime que les animaux. A elle seule, la troupe d’humoristes anglais, Monty Python, résume en quelques secondes d’images près de dix mille ans d’histoire de l’Humanité, en filmant le vengeur, au volant d’un rouleau compresseur, criant « vengeance » pour la mort de son poisson Pterophyllum alors que le criminel – et coupable – se retrouve stupidement englué dans le béton !
Depuis la naissance du cinéma, la vengeance a traversé tous les genres cinématographiques (western, films dramatiques, films policiers, films fantastiques, films de science-fiction, biopics), mais, sans réel manichéisme, nous pouvons, avec recul, distinguer, entre autre, dans la nature humaine représentée dans les salles obscures, deux types de vengeance. A savoir, la « vengeance chaude », d’une part, et la « vengeance froide », d’autre part.
La « vengeance chaude », en temps de guerre, peut durablement être incarnée par le film Le Vieux Fusil (Robert Enrico, 1976, Fr.-All., 103 min., avec Philippe Noiret, Romy Schneider, Jean Bouise, récompensé, entre autre, par le premier César du meilleur film puis par le César des César, dix ans plus tard). Inspiré du massacre d’Oradour-sur-Glane (près de Limoges, 10 juin 1944), nous assistons à la vengeance, un par un, du docteur Julien Dandieu, chirurgien pacifiste et humaniste, devenu ivre de douleur et de haine, à la mort de sa femme, Clara (violée puis brûlée vive au lance-flammes), et de sa fille, Florence, assassinées par un détachement de soldats SS Panzer Division (Division Das Reich) stationnés dans le château familial, après avoir sauvagement massacrés tous les villageois du petit hameau de la Barberie.
Quant à la « vengeance froide », elle peut prendre l’apparence du film Le Comte de Monte-Cristo (Claude Autant-Lara, 1961, Fr.-It., NB, 195 min., d’après le roman éponyme d’Alexandre Dumas, avec Louis Jourdan, Yvonne Furneaux, Pierre Mondy), divisé en deux parties « La Trahison » puis « La Vengeance », ou la peine est prise longtemps après l’affront de la jalousie. Pour assouvir sa froide et implacable vengeance, rien n’arrêtera Edmond Dantès … jusqu’à sa lente prise de conscience - envies puis dégoûts, souffrances puis rédemption ? - que l’on ne peut revenir sur le temps malheureusement écoulé, qui est – comme pour tout un chacun - « déjà » du passé !
Bien évidemment, à la différence de l’Ordalie (« jugement de Dieu »), la fameuse et millénaire « loi du Talion » - fréquemment résumée par l’adage « œil pour œil, dent pour dent » - pousse le vengeur à exécuter ses représailles un certain temps après l’affront, pour qu’elles soient plus « réjouissantes ». Il peut ainsi les préparer avec soin pour qu’elles frappent son adversaire au dépourvu, quand ce dernier n'est plus sur ses gardes.
Avec un peu de recul, dans une perspective de juste réciprocité du crime et de la peine, la sentence de la peine doit-elle être équivalente à celle de l’offense ? Tout au long des siècles, les avis divergent à ce sujet.
Oscar Wilde (1854-1900) écrivait avec ironie : « The worst vice of a fanatic is his sincerity. » (« Ce qu’il y a de pire chez le fanatique, c’est la sincérité. »). Quoi qu’il en soit, il existe une alternative à la vengeance, immortalisée en 191 minutes par Richard Attenborough, en 1982, et récompensé, entre autre, par l’Oscar du meilleur film : « First they ignore you, then they laugh at you, then they fight you, then you win. » (« D'abord ils vous ignorent, puis ils se moquent de vous, puis ils vous combattent et finalement vous gagnez. »).
Soignons lucides, cela demande de « prendre sur soi » et ce n’est jamais très facile.
Hauts les cœurs … « bonnes et belles toiles » !
Pierre Le Blavec de Crac’h
Professeur
LAvisDevantSoi_LAVDS / 17-01-2015 / Tous Droits Réservés