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Billet de blog 25 août 2022

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VI- Des idées politiques en questions…

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

VI- Des idées politiques en questions…

33-Quelles sont les idées politiques  qui vous tiennent  le plus à cœur ?

34-Que répondez-vous quand on vous qualifie  d’utopiste ?

35-Pourquoi  faites-vous souvent l’éloge de  la non-violence ?

36-Pour vous qu’est-ce que la radicalité écologique (réponse à travers un long article) ?

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33-Quelles  sont  les idées politiques qui vous tiennent  le plus à cœur ?

Ce sont des  pensées politiques porteuses de   radicalité ,    seule série de  choix pour remettre en cause le système mondial autodestructeur, elles sont aussi  porteuses de cohérence et de sens, on en manque souvent. J’en souligne  au moins quatre relatives aux moyens, à certains  principes, au « commun » et  aux limites des activités humaines.

1- La première  idée politique est  relative aux rapports entre les fins et les moyens .

  «  On entend dire « les moyens, après tout, ne sont que des moyens ». Moi je vous dirai plutôt : « tout, en définitive, est dans les moyens. La fin vaut ce que valent les moyens. Il n’existe aucune cloison entre les deux catégories » (…) Votre grande erreur est de croire qu’il n’y a aucun rapport entre la fin et les moyens (…) Les moyens sont comme le grain et la fin comme l’arbre. Le rapport est aussi inéluctable entre la fin et les moyens qu’entre l’arbre et la semence. » (Mohandas Gandhi, dans l’ouvrage posthume réunissant ses écrits  « Tous les hommes sont frères »  , première parution en 1969, puis folio essais , Gallimard,1990, p.147.)

Autrement  dit  : si l’on veut la démocratie, la protection de l’environnement ,la justice ,la paix il faut des moyens démocratiques ,écologiques, justes et pacifiques.

2-La seconde idée  politique est relative  aux respects de quelques  principes  entre les différents niveaux   géographiques .  

Si l’on part de l’idée selon laquelle le village, la ville, la région sont nos terroirs, les pays sont nos patries, les continents nos matries et la Terre notre foyer d’humanité alors quelle énumération de principes essentiels pourrait-on penser et mettre en œuvre pour chaque lieu donné, du local au global et du global au local ? Ces différents lieux de vie ne doivent-ils pas ainsi se reconnaitre, se protéger, se compléter, s’interpeller, se limiter et s’incliner les uns vers les autres ?

Une plate-forme remarquable, dont nous nous inspirons, a été publiée dans Le Monde diplomatique (avril 1994, pages 16 et 17)      intitulée « Pour un monde solidaire et responsable », elle est fondée sur «  les éléments de diagnostic, les principes communs, l’esquisse d’une stratégie d’action en particulier sur l’articulation des niveaux géographiques et sur des programmes mobilisateurs. » Cette plate-forme met en avant les principes suivants :

Le principe d’humanité c’est-à-dire la possibilité d’avoir une vie digne répondant aux besoins essentiels, le principe de responsabilité des divers acteurs dans la construction des sociétés, le principe de diversité par exemple des cultures, le principe de précaution qui consiste à ne mettre en œuvre de nouveaux produits et de nouvelles techniques que si  des risques graves ou irréversibles n’existent pas, , le principe de modération qui consiste pour les plus aisés à limiter leur consommation, à apprendre la frugalité. Ajoutons à cela  le principe de non-régression  par lequel  la protection de l’environnement ne peut faire l’objet que d’une amélioration constante, il est interdit de remettre en cause des avancées  environnementales.

Il faut enfin souligner le principe de subsidiarité qui consiste, pour chaque collectivité, à respecter les principes évoqués ci-dessus. Cette forme d’organisation des volontés consiste dans chaque lieu à prendre des initiatives et à disposer de marges de manœuvres quant aux moyens qui seront mis en œuvre, cela à travers des rapports de force complexes, à partir aussi des liens entre les  divers ordres  juridiques.

3-La troisième idée politique est relative aux prises en compte, certes variables, philosophique, sociologique, économique, juridique et écologique  du « commun. »

Demandons-nous d’abord  si  le destin commun n’en appelle pas  à la fraternité ? Dans  l’immensité du temps la planète Terre, nous disent des scientifiques, disparaitra brûlée par le soleil  qui, avant de s’éteindre, détruira l’ensemble des planètes du système solaire. Une espèce s’éteint en moyenne en 5 à 10 millions d’années, le genre homo a deux millions d’années, l’homo sapiens 200.000 ans, mais  nous avons très certainement utilisé  la plus grande partie de nos réserves environnementales, d’aucuns  pensent même que l’humanité s’éteindra un peu avant ou un peu après 2100.Une certitude : les situations écologiques apocalyptiques vont se multiplier à moins d’une remise en cause gigantesque que, à ce jour, on ne voit pas arriver. Notre destin commun est donc de faire face à des catastrophes qui vont s’étendre et en rapidité et en diversité  et en profondeur et en nombre sur la planète. Elles toucheront l’ensemble du vivant, humain et non humain. Faire face signifie essayer de prévenir d’éviter des souffrances et essayer d’en soulager d’autres. Eviter tout ou partie de telle ou telle catastrophe, soulager tout ou partie de telle ou telle autre.

-Demandons-nous encore si   les périls communs n’en appellent pas  à la fraternité ?

Etre frères n’est-ce pas  se rassembler contre des périls communs. Ils s’appellent  et s’appelleront très certainement débâcle écologique, armes de destruction massive, inégalités criantes, toute-puissance de la techno science et des marchés financiers. C’est être frères contre les périls communs eux-mêmes, c’est l’attitude non violente fondée sur le  respect des personnes et  les remises en cause de mécanismes anti fraternels. 

-Et  les fragilités communes n’en appellent-elles pas elles aussi à la fraternité ?

 Ce sont aussi les douleurs de la vie, une sorte de fraternité de la douleur, qui peuvent nous relier en étant à l'écoute des fragilités, celles des autres et les nôtres. Vont dans ce sens des religions, des cultures, des œuvres d’art, qui nous disent «  çà n’est pas un fardeau que tu portes c’est ton frère. »  Enfants en détresse et/ou en danger sur notre terre : un sur deux aujourd’hui et combien demain ?

-Sans oublier enfin   les projets communs qui en  appellent  à la fraternité.

 Etre frères c’est se rassembler à travers le temps pour préserver le bien commun et pour construire du commun  c'est-à-dire penser et mettre en œuvre les biens communs  dans un accès universel, et  relier, dans l’espace et dans le temps, le proche et le lointain ?

Ces projets ne  sont-ils pas témoignages de fraternités s’ils répondent aux urgences, s’ils construisent des politiques à long terme et si les moyens mis en œuvre sont conformes aux fins proposées ?

 Un des grands défis n’est-il pas de  construire un monde viable   dans nos terroirs, le village, la ville, la  région, dans notre patrie,  le  pays, dans notre  matrie , le  continent, dans notre  foyer d’humanité et  du  vivant ,  la  Terre. -Quant aux   éléments communs de l’environnement les voilà ,  eux aussi ,proches de la fraternité.

Des théories et des pratiques ,  celle de Patrimoine commun de l’humanité, celle de biens communs, au-delà de leurs différences(conceptions de la propriété et de la responsabilité, des acteurs les mettant en œuvre, de leur étendue, de leur gestion…), ont probablement des points communs :

 mettre en avant des éléments qui,

 en dépassant le quadrillage étatique,

 en mettant des limites à la marchandisation du monde,

 en étant pensés sur le long terme,

 voudraient   contribuer à préserver ce que l’humanité et la nature peuvent avoir d’essentiel.

4-La quatrième  idée politique est celle de limites au sein des activités humaines .

Les limites au sein des activités humaines constitue   un concept   porteur de principes

Ce concept de limites ne se traduit-il pas par au moins quatre principes que l’on retrouve par exemple en droit international de l’environnement(DIE)? (Voir notre ouvrage de DIE, éditions Ellipses).

De façon plus globale on retrouve les trois premiers principes dans la remarquable « Plate-forme pour un monde responsable et solidaire », publiée par le Monde diplomatique d’avril 1994, qui est à la fois « un état des lieux des dysfonctionnements de la planète et une mise en avant de principes d’action pour garantir un avenir digne au genre humain », plate-forme portée par la Fondation pour le progrès de l’homme, plate-forme qui devrait être symboliquement affichée sur beaucoup de portes de beaucoup d’universités dans le monde,   étudiée et débattue  dans de nombreux cours.

 1-Le principe de précaution selon lequel les sociétés humaines ne doivent mettre en œuvre de nouveaux projets, produits et techniques, comportant des risques graves ou irréversibles, qu’une fois acquise la capacité de maitriser ou d’éliminer  ces risques pour le présent et le futur.

  2-Le principe de modération de ceux et celles qui, pris dans la fuite en avant des gaspillages, seront amenés à remettre en cause leur surconsommation, leur mode de vie, à bruler moins d’énergie, à maitriser leurs besoins pour adopter des pratiques de frugalité, de simplicité, de décroissance. Andre Gorz écrivait : «  Il est impossible d’éviter la catastrophe climatique sans rompre radicalement avec les logiques qui y conduisent depuis cent cinquante ans. »

  3- Le principe de sauvegarde : les sociétés humaines doivent aller vers des modes de production et de consommation sans prélèvements, sans déchets et sans rejets susceptibles de porter atteinte à l’environnement. D’où l’existence de ces luttes pour développer des technologies propres, des énergies renouvelables et pour consacrer des éléments de l’environnement, comme par exemple l’eau, comme biens publics mondiaux (BPM) ou comme  éléments du patrimoine commun de l’humanité(PCH).

   4-Enfin on peut ajouter le principe de non-régression. Sauvegarde signifie aussi que lorsqu’une avancée décisive, sur un point de protection importante, a été acquise, un verrou juridique doit être alors posé. Un des exemples significatifs  est celui du Protocole de Madrid sur l’Antarctique (1991) qui interdit les recherches minérales pour cinquante ans. On ne doit pas revenir en arrière dans la protection.  C’est donc ce que l’on nomme le principe de non-régression. La nécessité vitale de réduire les atteintes à l’environnement ne peut que contribuer à convaincre les législateurs, les juges et la société civile d’agir en vue de renforcer la protection des acquis environnementaux au moyen de la consécration de ce principe de non-régression. ( Voir sous la direction de Michel Prieur et Gonzalo Sozzo, « La non-régression en droit de l’environnement », Bruylant , 2012).

5-Prendre en compte des théories et des pratiques de décroissance et de post-croissance à travers une économie  soutenable (s’éloignant du culte de la croissance, s’attaquant aux inégalités criantes à tous les niveaux géographiques, et désarmant le pouvoir financier ainsi que… la course aux armements), à travers le principe de modération de ceux et celles qui, pris dans la fuite en avant des gaspillages, seront amenés à remettre en cause leur consommation, leur mode de vie, à bruler moins d’énergie pour adopter des pratiques de frugalité, de simplicité. Essentielles sont aussi des relocalisations d’activités, des circuits courts, des richesses redistribuées. Essentielle également cette ennemi redoutable : la compétition, remise en cause par la consécration de biens communs (eau, forêts…), par des coopérations, des solidarités  ,  par l’appartenance   à notre commune humanité , par des périls communs qui devraient nous fraterniser.

34-Que répondez-vous quand on vous qualifie  d’utopiste ?

Oui ,je suis un défenseur de l’utopie mais  de l’utopie créatrice.

René Dumont avait appelé son grand ouvrage « L’utopie ou la mort ! »(Seuil, 1973.) Il ne pouvait mieux dire. Si le productivisme n’est pas remis en cause ses logiques terricides et humanicides ne s’arrêteront qu’avec la disparition de l’humanité et d’une large partie du vivant. Il faut donc un bouleversement gigantesque et radical .

Ces articles  relèvent d’un projet de transformation radicale du système mondial dans lequel s’est embarquée et se trouve embarquée l’humanité. Cette transformation se situe dans une analyse prospective en rupture profonde avec la société mondiale existante.

Mais il ne s’agit pas d’une utopie abstraite, celle de vœux pieux, celle des nuages.  On rêve, et on en a heureusement le droit,  mais rien ne change.

Il s’agit ici d’une utopie concrète, créatrice,  c'est-à-dire qui propose de prendre  les moyens de se réaliser.

Cette utopie créatrice veut penser des moyens conformes aux finalités avancées, celles de la démocratie, de la paix, de l’environnement et de la justice.

35-Pourquoi  faites-vous souvent l’éloge de  la non-violence ?

.La violence ne mérite pas seulement une condamnation, elle appelle à donner le jour à une alternative :  la non-violence.

De façon à la fois plus globale et plus spécifique se situent ici la chance et la force de la non-violence.

 L’histoire de la non-violence, en partie méconnue, révèle l’efficacité de ces méthodes d’action qui, comme le disait Jacques de Bollardière , «  mobilisent par delà le mépris, la violence et la haine. »(Voir à ce sujet la revue opérationnelle « Non-violence Actualité », et la  remarquable revue « Alternatives non-violentes », directeur F Vaillant, ainsi que les travaux, eux aussi remarquables,  de l’Institut de recherche sur la résolution non-violente des conflits-IRNC, créé par F. Marchand , JM Muller, C Mellon, J Sémelin, C Delorme.)

Les grandes résistances non-violentes contemporaines s’appellent  principalement

celles pour l’indépendance de l’Inde , par exemple la marche du sel avec Gandhi en 1930,

celles contre le racisme aux Etats-Unis , par exemple le discours de Martin Luther King en 1963,

celles contre les régimes autoritaires de pays de l’Est, par exemple les grands rassemblements en 1989,

celle contre les régimes autoritaires de pays arabes, par exemple sur de grandes places en 2011,

celle contre les graves insuffisances des politiques des  Etats contre le réchauffement climatique, par exemple de foules de jeunes en grève et en marche en 2019…

Ces moyens reposent sur un cadre non-violent c'est-à-dire un respect de la dignité  humaine, une exigence de justice, une combativité positive (et non une agressivité)  face au conflit. (J Sémelin, La non-violence expliquée à mes filles, Seuil, 2000). Cette méthode de règlement des conflits refuse la violence d’oppression dans laquelle on impose sa loi, elle refuse la violence de soumission dans laquelle on renonce à ce que l’on pense être essentiel. On cherche ensemble, dans le respect des personnes et la confrontation, des solutions justes. (JM Muller, Lexique de la non-violence, ANV,1998). Jacques  Sémelin insiste sur « trois principes majeurs : l’affirmation de l’identité du sujet résistant (…), la non coopération collective(…), la médiatisation du conflit c’est à dire susciter la constitution de « tiers » qui appuient sa cause. » (Jacques Sémelin, « Du combat non-violent » dans l’ouvrage « Résister. Le prix du refus », sous la direction de Gérald Cahen,  éditions Autrement, Série Morales n°15,1994)

 -Ces moyens, énumérés à titre indicatif, font partie des pratiques essentielles de l’action non-violente. Il s’agit , de façon non exhaustive, de la non-coopération, la  désobéissance civile (Alain Refalo, Les sources historiques de la désobéissance civile, colloque Lyon  2006), l’obstruction non-violente, l’objection de conscience, la grève de la faim, la grève, le sit in (s’asseoir sur la voie publique en particulier des places), le boycott, le refus de l’impôt sur les armements, les pétitions…(JM Muller, Stratégie de l’action non-violente, Seuil,1981).

Les non-violents ont  aussi des pratiques d’éducation à la paix, ainsi par exemple « Non-violence Actualité » et son Centre de ressources  pour la gestion non-violente des relations et des conflits, avec ses outils pédagogiques, ses jeux coopératifs, ses formations. Des expositions comme « Ni hérisson, ni paillasson » du Centre pour l’action non-violente ont été et sont porteuses pour des jeunes.( Voir aussi JM Muller, De la non-violence en éducation, UNESCO et IRNC, 2002), des pratiques d’interventions civiles de paix où des  volontaires, après une formation, ont été envoyés sur des zones de conflits, par exemple  au Kosovo, en Palestine, au Guatemala (formation ICP assurée par le Mouvement pour une alternative non violente, MAN).Les non-violents ont également pensé « La dissuasion civile : les principes et les méthodes de la résistance non-violente dans la stratégie française. » (C Mellon, JM Muller, J Sémelin, La dissuasion civile, éditions FEDN, 1985)


Nous soulignerons ici l’un des écrits les plus éclairants, celui de Jacques de Bollardière, général devenu militant de la non-violence après avoir dénoncé la torture pendant la guerre d’Algérie et condamné ensuite les armes nucléaires :


« L’homme, dans ce monde de conflits et de tensions, n’a-t-il le choix qu’entre une passivité résignée, un lâche renoncement à l’exigence impérieuse de libération qui constitue son être ou la dégradation de son agressivité en une violence meurtrière qui détruit ce qu’il a d’humain en lui ?
La non-violence est une idée neuve qui perce une terre aride et pousse à travers les décombres des espoirs ruinés avec l’indomptable puissance de vie des jeunes plantes qui cherchent la lumière. Elle s’enracine dans l’espérance, se nourrit de la force de la justice. Son passé trop court et méprisé révèle l’efficacité des méthodes d’action qui mobilisent par delà la violence, le mépris et la haine. Dans ce monde bouleversé, elle reste compatible avec une vision humaine du destin des hommes et avec l’amour qui, inlassablement, s’offre à nous au plus secret de notre être. »

36-Pour vous qu’est-ce que la radicalité écologique  très présente dans vos écrits ?

Introduction

Hélas, hélas, hélas, voilà un triple aveuglement de ceux et celles, des personnes et des collectivités ,  qui refusent cette remise en cause gigantesque.

 -Certains  dénoncent « la mondialisation qui piétine la souveraineté du peuple et celle de la nation. »Et on s’arrête là sans vouloir comprendre qu’il y a deux mondialisations, celle qui existe, autodestructrice non seulement de la souveraineté des peuples et des Etats mais des peuples eux-mêmes et de l’ensemble du vivant, et d’autre part une mondialisation radicalement différente, à construire de toute urgence.

D’autres, au contraire,  comprennent que la débâcle écologique a depuis longtemps traversé les frontières et que, si les luttes nationales sont essentielles,  le sont aussi les luttes locales, régionales,  continentales  et mondiales. Et  puis , par exemple, dans les conventions internationales et régionales de protection de l’environnement chaque  Etat partie s’engage au nom de son  peuple. Et surtout , plus globalement, des écologistes dénoncent la mondialisation compétitive et irresponsable et se prononcent en faveur d’une mondialisation solidaire et responsable qui remet en cause le système existant.

-D’autres  dénoncent le « gauchisme » de la radicalité.

Il convient au contraire  d' ouvrir les yeux en comprenant  que les causes de la débâcle écologique sont celles de tout un système de mondialisation productiviste, compétitive et irresponsable et qu’il est vital de mettre en œuvre un système viable, solidaire et responsable.

-Certains  enfin  dénoncent de façon absurde  les « khmers verts » (en référence au génocide  des khmers rouges au Cambodge) et  aussi « l’étouffement de la compétitivité par les règles environnementales ».

On peut au contraire affirmer que la   radicalité écologique doit être synonyme de démocratie  participative et de justice écologique. Cette radicalité remet en cause la compétition, processus social ,   économique, écologique et culturel  mortifère.

Les ruisseaux de résistances et d’alternatives qui voient le jour peuvent-ils contenir les fleuves de destruction environnementale  en route ?   Oui ,    si le temps qui reste  le  permet…

Petites  avancées,  gouttes d’eau,  demi-mesures, solutions partielles, améliorations,  réformes environnementales peuvent avoir leurs sens ,   leurs utilités, leurs forces. Elles sont nécessaires.

Actions locales, régionales, nationales, continentales peuvent avoir leurs sens, leurs  utilités, leurs forces. Elles sont nécessaires.

Il faut pourtant avoir une cruelle lucidité, celle d’ouvrir les yeux.  Tagore écrivait  « Penser est difficile, agir est très difficile, agir selon la pensée est extrêmement difficile. ».

 Si l’on sait que ces actes et ces niveaux géographiques   sont nécessaires on sait aussi qu’ils sont  insuffisants.   Mais  n’ont-ils pas aussi, aujourd’hui, quelque chose de dérisoire  face à la rapidité et à la puissance de la débâcle écologique? Pourquoi ?

Parce que le temps est compté,

 Et, autre élément souvent passé sous silence, parce que les marges de manœuvres diminuent.

Dans un schéma urgentissime ne faudrait-il pas que les dimensions radicales et mondiales se mettent massivement en route, portées aussi  par les acteurs à tous les niveaux géographiques ?

Face à la puissance  du système mondial autodestructeur, fondé sur ses trois piliers, le capitalisme le productivisme et l’ anthropocène, la radicalité écologique mondiale n’ est-elle pas devenue un impératif vital qui saute aux yeux pourvu qu’on les ouvre ?(I) N’est-elle pas  synonyme d’une remise en cause systémique ?(II) Est-ce qu’elle n’en appelle pas à la mise en œuvre rapide de moyens gigantesques ?(III)

I-Radicalité écologique mondiale : un impératif vital .

Nous proposons de poser ici quatre questions :

La débâcle écologique, sans remises en cause gigantesques, ne  va-t-elle pas se transformer bientôt en  apocalypses écologiques ?(A)

Cette situation pré apocalyptique ne fait-elle pas encore,  pour  une  large part, l’objet d’un déni ?(B)

Quelles volontés peuvent et doivent exister pour un monde viable? (C)

Les marges de manœuvres pour construire ce monde viable ne se réduisent-elles pas  particulièrement dans le domaine de l’environnement ?(D)

Quelles marges de manœuvres ont eu, ont et auront les générations  pour un monde viable ?(E)

(Pour une réflexion globale voir les actes du colloque international de Limoges. Ces catastrophes occupent une place centrale dans les problèmes, les menaces et les drames environnementaux. Pourtant sur ces réalités qui  prennent de plus en plus d’ampleur, il a fallu attendre le colloque international de Limoges des 11,12, et 13 mars 2009, organisé par le CRIDEAU(laboratoire de droit de l’environnement) et le CIDCE,(Centre international de droit comparé de l’environnement) pour avoir enfin une vue globale, critique et créatrice  des rapports entre le droit et les catastrophes écologiques. Cet ouvrage rapporte trente sept communications. Nous avions organisé  tous les trois ce colloque et  nous avons assuré la direction de la publication : « Les catastrophes écologiques et le droit : échecs du droit, appels au droit », sous la direction de Jean-Marc Lavieille, Julien Bétaille, Michel Prieur, éditions Bruylant, 2011.)

A-La débâcle écologique, sans remises en cause gigantesques, va se transformer bientôt en  apocalypses écologiques.

Les personnes survivantes d’inondations, d’incendies, de cyclones, de tremblements de terre, de tsunamis affirment très souvent « C’était l’apocalypse ! » Or l’ampleur, la violence, le nombre, la rapidité, le cumul des catastrophes à venir sont en route pour des apocalypses écologiques que l’humanité n’a très probablement jamais vécues.

De nombreux rapports internationaux relatifs au réchauffement climatique, à l’effondrement de la biodiversité et à une multitude de pollutions montrent très clairement que, au mieux, quelques décennies ( jusque vers 2050 ?) sont là devant nous pour inverser cette course à l’abîme, au pire nous n’avons qu’une dizaine d’années(2030).

Le 7 juin 2012  deux études nous ont particulièrement marqué, elles ont été  publiées  dans la Revue Nature, cosignées chacune par une vingtaine de chercheurs de différentes disciplines, chercheurs travaillant dans une quinzaine d’institutions scientifiques. Ils  tirent la sonnette d’alarme : «La biosphère est à la veille d’un basculement abrupte et irréversible »(…) Ces études mettent en avant « l’imminence d’ici à quelques générations d’une transition brutale vers un état de la biosphère inconnu depuis l’émergence d’homo sapiens c’est-à-dire 200.000 ans. »C’est même plus qu’une sonnette d’alarme, c’est une forme de glas apocalyptique.

B-Cette situation pré apocalyptique fait encore,   pour  une  large part, l’objet d’un déni.

Le fait de se faire qualifier  de  prophètes de malheur  est significatif. François Partant au contraire écrivait « Les catastrophistes sont ceux et celles qui ferment les yeux sur les causes des catastrophes et non pas ceux et celles qui avertissent, dénoncent et proposent. »

1-Il y a aujourd’hui au moins au moins une dizaine de   causes   de ce déni :

 une réalité scientifique dont on n’a pas connaissance,

une réalité scientifique que  l’on nie,

une attente du grand remède miracle qui mettra la Terre à l’ombre,

 des intérêts à défendre que l’on veut protéger quoiqu’il arrive,

 une  incapacité abyssale pour penser et mettre en œuvre des remises en cause,

 des habitudes que l’on ne peut ni ne veut  changer, on ne bouge pas, on est rangé alors que c’est déranger qui fait venir au monde,

un avenir dans lequel on ne croit plus et  des générations futures qui « n’auront qu’à faire face comme elles le pourront » et « qui finiront bien par s’adapter »(une des affirmations les plus écœurantes humainement ,irresponsables écologiquement  et nullissimes intellectuellement.)

et bien sûr des « fins de mois » dramatiques ou difficiles qui empêchent de voir « des fins du monde » et d’établir des liens entre les deux.

2-Les deux autres  causes du déni sont   très puissantes, liées au système mondial autodestructeur, c’est ce que l’on pourrait appeler les triomphes ( mythologie grecque) de  Midas et de  Prométhée  dans  notre monde d’aujourd’hui.

 Le roi Midas voulait pouvoir tout transformer en or, son vœu fut exhaussé. Mais  la nourriture et l’eau deviennent aussi de l’or et  le roi dépérit peu à peu. En se trempant dans le fleuve il est libéré de son malheur. Qu’est-ce qu’une société pour laquelle tout vaut tant ? 

L’exemple de la marchandisation du monde se manifeste en particulier par les stratégies de  marchandisation de la nature. La course au profit et la marchandisation de la nature ne sont-elles  pas  entrées dans une course incontrôlée, irrépressible, irrésistible qui en appelle aux crans d’arrêt ? Contrairement à ce que croyaient certains, le mouvement de marchandisation   n’a pas réduit  les  risques environnementaux et la pénurie des   ressources .

 La première voie utilisée par le productivisme est une exploitation tous azimuts de ressources "déjà trouvées" dans la nature.  Ce que le productivisme a emballé  il l’achète et  il le vend  jusqu’à extinction des stocks.

 La seconde voie utilisée par le productivisme est une exploitation tous azimuts de ressources "à  trouver" dans la nature.  Ce que le productivisme découvre  il le touche, il l’emballe, puis il le vend et l’achète.

 La troisième voie utilisée par le productivisme est un marché tous azimuts des  "services" de la nature. Ce que le productivisme, en affirmant faire œuvre de protection, déclare « services » il va le découper et le monnayer. 

La quatrième  voie utilisée par le productivisme est une "artificialisation" tous azimuts de la nature. Ce que le productivisme commence à voir  il va   essayer de le modifier, de le transformer, puis il le vend et l’achète.

Le cinquième mécanisme utilisé par le productivisme est une géo-ingénierie conçue comme « Le grand remède  miracle. »Il s’agit  de techniques qui visent à manipuler et modifier le climat et l’environnement de la  Terre et qui deviendraient une sorte de plan B pour arrêter le réchauffement et mettre la Terre à l’ombre. Ce que le productivisme a détruit  il prétend   le sauver en utilisant des  moyens  productivistes .

 Ainsi à grande allure, sous de multiples formes,  la pente est prise : tout vaut tant. Voilà que le trio infernal, productivisme, capitalisme,  anthropocène,  réalise le vœu du roi Midas : transformer en or tout ce qu’il touche. Ainsi  la logique a été implacable : notre foyer d’humanité ,    la nature, meurt , nous avec, et de même l’ensemble du vivant.

Le titan Prométhée est allé dérober le feu aux dieux. Le châtiment de Zeus sera terrible. Qu’est-ce qu’une société qui ne se donne plus de limites ? Les pionniers de l’écologie politique et de la décroissance posaient depuis longtemps cette question  vitale :  « Qu’est-ce qu’une société qui ne se donne pas de limites ? »

Dans la ville de Pripyat, près de Tchernobyl, une statue en bronze devant le cinéma représentait Prométhée levant les bras au ciel pour prendre le feu des dieux. Il était dans la toute-puissance. Après le drame du 26 avril  1986 la statue du Titan  a été enlevée de la 9ville fantôme et placée devant la centrale nucléaire  pour rendre hommage aux « liquidateurs. » (Voir  Prométhée à Tchernobyl , François Flahault, Le Monde diplomatique, septembre 2009.)

Dès lors, il n’est pas étonnant que cette fuite en avant s’accompagne de nombreux dénis personnels et collectifs de la réalité : on pense que la catastrophe ne se produira pas ou qu’on y échappera. Il n’est pas étonnant, non plus, que cette fuite en avant s’accompagne de silences et de mensonges sur les effets, sur les causes de telle ou telle catastrophe écologique, ou même sur l’existence de certaines d’entre elles que l’on espère garder dans les secrets de la planète et qui peuvent constituer autant de bombes à retardement.

(Voir aussi Jean-Pierre Dupuy, Pour un catastrophisme éclairé, Quand l'impossible est certain, Paris : Seuil, 2002, 216 pages. La problématique est ainsi résumée :

« Le temps est venu de mener une réflexion sur le destin apocalyptique de l’humanité : nous avons en effet acquis la certitude que l’humanité était devenue capable de s’anéantir elle-même, soit directement par les armes de destruction massive, soit indirectement par l’altération des conditions nécessaires à sa survie. Le pire n’est plus à venir mais déjà advenu, et ce que nous considérions comme impossible est désormais certain. Et pourtant nous refusons de croire à la réalité du danger, même si nous en constatons tous les jours la présence. Face à cette situation inédite, la théorie du risque ne suffit plus : c’est à l'inévitabilité de la catastrophe et non à sa simple possibilité que nous devons désormais nous confronter. »)

C-Quelles volontés pour un monde viable?

 1-La mise en œuvre des volontés est complexe entre autres parce que  chaque acteur, personne et collectivité, comme le dieu Janus, a deux faces, d’un côté  des parts de reproductions d’injustices, de pratiques non démocratiques, de violences, de dégradations de l’environnement  , d’un autre côté des parts de remises en cause dans ces différents domaines d’activités. Ces parts sont très variables et pour chaque acteur et entre les acteurs, et cela parfois même aux cours des vies, ainsi  celles d’un.e citoyen.ne, d’une association, d’une juridiction, d’une ville, d’une firme multinationale...

2 -Comment passer de volontés souvent étouffées, dépassées, essoufflées, à des volontés de plus en plus naissantes, résistantes, à la recherche de nouveaux souffles ? Le schéma général de mise en œuvre,   déjà en route et à  venir ,   de moyens pour un monde viable est et serait vraisemblablement  le suivant :

- Des résistances et des pratiques alternatives de plus en plus nombreuses « à la base », par des personnes, des associations, des mouvements, des collectivités locales, d’autres  acteurs de toutes  sortes,  cela sous les pressions et des catastrophes et  des  logiques d’un système en route vers l’humanicide et le terricide .

-Des discours et des remises en cause, d’importances très variables, aux « sommets » des différents niveaux géographiques, locaux, régionaux, nationaux, continentaux ,internationaux, cela sous les pressions et des catastrophes  et de « la base »…

-Des  fissures « au cœur » des mécanismes du système mondial,  autrement dit dans l’intérêt commun de l’humanité   la détermination de limites radicales et contrôlées des acteurs les plus puissants que sont  les marchés financiers, le marché mondial,  la techno science ,  cela  sous les pressions et des catastrophes  et  de « la base » et des « sommets » et de l’intérieur de ce « cœur » des mécanismes su système mondial.

D-Les marges de manœuvres pour construire un monde viable se réduisent particulièrement dans le domaine de l’environnement.

Quatre mécanismes ressemblent à une machine infernale.

1-Premier mécanisme : le système international s’accélère. Voilà une techno-science omniprésente et toujours en mouvement, un règne de la marchandise toujours à renouveler, une circulation rapide de capitaux, de produits, de services, d’informations qui font de la planète une sorte de grand village, les déplacements nombreux et rapides des êtres humains, l’explosion démographique mondiale, l’urbanisation accélérée du monde, la sacro-sainte croissance , les discours sur la compétition « naturelle » en particulier  économique et militaire, la prise de conscience d’une fragilité écologique de la planète provoquée par des activités humaines souvent sans limites. Qu’est-ce qu’une société qui ne se donne pas de limites ?

2-Second mécanisme : les réformes et les remises en cause pour protéger l’environnement sont souvent lentes : complexité des rapports de force et des négociations,  retards dans les engagements, obstacles dans les applications, inertie des systèmes économiques et techniques sans oublier la lenteur de l’évolution des écosystèmes.


3-Troisième mécanisme : l’aggravation des problèmes, des menaces et des drames fait que l’on agit  pour une large part dans l’urgence qui  tend à occuper une place centrale du politique.


4-Quatrième mécanisme : s’il est nécessaire de soulager des souffrances immédiates, il est aussi non moins nécessaire de lutter contre leurs causes par des politiques à long terme ce qui demande du temps,…or le système s’accélère.

 Autrement dit : il n’est pas sûr que les prochaines générations  aient beaucoup de temps devant elles pour mettre en œuvre des contre-mécanismes nombreux, radicaux et massifs.

E-Quelles marges de manœuvres des générations  pour un monde viable ?

 1-Les marges de manœuvres se réduisent  à travers les générations. Nous avons reçu de trois générations passées ( 1850 à 1945 environ), un environnement pour une part atteint et faisant l’objet de destructions en marche sous les logiques du productivisme en route en fait depuis le XVème siècle et de l’anthropocène en route voilà donc plus  de 170 ans à travers les explosions des énergies fossiles et de la démographie.

Nos trois générations présentes (1945 -2030 environ),  ont produit un environnement pour une large part détruit et plongeant dans des apocalypses écologiques multiformes, en interactions et rapides, ainsi à travers le réchauffement climatique et les atteintes à la diversité biologique.

Les trois générations qui ont commencé à voir le jour et qui viennent (2030 à 2110 environ) se trouveront  donc devant une question vitale : cette forme de « veille de fin des temps », faite en particulier de nombreuses catastrophes écologiques, peut-elle encore se transformer sinon en une forme d’aube d’humanité en tout cas en un monde viable ?

- Les marges de manœuvres se compliquent  dans la prise en compte d’un grand nombre d’acteurs : Etats, organisations internationales et régionales, organisations non gouvernementales, collectivités territoriales, entreprises, firmes multinationales, banques, réseaux scientifiques, juridictions, associations, générations présentes, peuples, personnes,  générations futures…Quant aux acteurs au cœur du système mondial ( techno science, marchés financiers , marché mondial) ils  jouent un rôle essentiel dans la reproduction de cette  autodestruction et donc  dans la construction possible d’un contre- système viable.

 2-Ainsi des éléments de réponses aux trois questions posées pourraient être les suivants :

-Les volontés ? Différents acteurs, des plus petits aux plus grands, dans de multiples lieux,  peuvent les construire, entre autres à travers des rapports de force et des pédagogies radicales  des catastrophes. Les puissants ne partagent pratiquement jamais d'eux-mêmes, ils ne le font qu'à travers des rapports de forces portés par des volontés qui les y contraignent  ou exceptionnellement si des catastrophes les poussent  à des remises en cause, mais la catastrophe loin de là  n'est pas vertueuse en elle-même.

-Les marges de manœuvres ? Les quelques générations qui arrivent en auront-elles suffisamment pour qu’à travers de multiples volontés ces moyens viables voient le jour ? « Elles  ne savaient pas que c’était impossible alors elles l’ont fait. »

 -Les moyens ? Ils sont parfois pensés, trop rarement mis en œuvre, il faut donc s’en emparer, à chaque mécanisme d’autodestruction doit répondre un contre-mécanisme pour un monde viable.

Préalablement nous allons  nous demander quels sont les rapports entre cette radicalité environnementale et ses dimensions mondiales ?(II)

II-Radicalité écologique : une remise en cause systémique et mondiale

Ne faut-il pas arriver à comprendre et à choisir une conception de l’écologie ? 

 Qui veut penser et mettre en œuvre de tels moyens écologiques  doit arriver à comprendre et  arriver  à accepter qu’il faut remettre en cause  deux  conceptions de l’écologie. Et en découvrir, si çà n’est déjà fait ,et en  partager, si c’est possible,  une troisième.

Dès lors comment articuler la dimension mondiale aux autres dimensions ?

Nous proposons donc d’envisager tour à tour ces trois conceptions

 La première conception  est la plus dure, elle prend de face l’écologie, elle la nie comme  étant incompatible avec le marché.(A)

 La seconde conception se veut la plus compréhensive, elle prétend respecter l’écologie. Elle est en fait soit incohérente parce que ne s’attaquant pas aux racines de la débâcle écologique soit  mensongère parce que l’on veut préserver des intérêts. On met de  la peinture verte sur des logiques mortifères inchangées.(B) 

La troisième conception se veut la plus porteuse et la plus radicale. Elle veut aller jusqu’aux causes de la débâcle environnementale.(C)

 La dimension mondiale, en liens avec tous les autres niveaux géographiques du local à l’international, ne doit-elle pas  être le catalyseur des moyens gigantesques en particulier financiers ?(D)

A-La première conception  est la plus dure, elle prend de face l’écologie, elle la nie comme  étant incompatible avec le marché.

 L’écologie est alors synonyme de  « repoussoir » .On pense et on agit contre l’écologie, on la combat parce qu’elle représente  un ensemble d’obstacles à la bonne marche des affaires. L’écologie est perçue avant tout comme un obstacle à la compétition qui ne peut s’entraver de telles règles.

L’écologique et l’économique sont incompatibles. L’écologie est contraire à la bonne marche des affaires laquelle doit l’emporter sur tout le reste.

Ces théories et ces pratiques sont souvent celles des puissances du productivisme que sont les marchés financiers, des firmes multinationales et des complexes scientifico-industriels.  Des hommes politiques  courent derrière ces théories et ces pratiques, laissant de côté leurs consciences et se soumettent à  ces  dominations.

 B-La seconde conception se veut  plus compréhensive, elle prétend respecter l’écologie.

Elle est en fait soit incohérente parce que ne s’attaquant pas aux racines de la débâcle écologique soit  mensongère parce que l’on veut préserver des intérêts. On met plus ou moins de  peinture verte sur des logiques mortifères inchangées. 

 L’écologie est alors synonyme « d’économie verte » permettant au système de se ressourcer et de dégager de nouveaux bénéfices, une écologie conçue comme  étant « au cœur de la croissance. » L’économie verte c’est  l’investissement  dans les principales ressources et le capital naturel  qui  doivent devenir les moteurs de la croissance économique et des marchés mondiaux. Comme pour « le développement durable » on a compris que ce qui devait durer c’est le développement en marche, pour l’économie verte on a compris  que  ce qui doit durer c’est l’économie en marche.

Ce qui compte c’est une écologie qui a pour fonction de faciliter la bonne marche des affaires, on ne se demande pas si telle ou telle affaire est compatible avec la protection de l’environnement.

On parle de "croissance écologique", de "croissance verte", en fait on est toujours « accro. » à un système terricide et humanicide .

Accro. ou par calcul ou par  inconscience ou par l'impardonnable complicité de la peur de déranger. Or les remises en cause de la machine infernale de la débâcle écologique ne peuvent que déranger de multiples dominations et de multiples  habitudes.

 On pourrait toujours se consoler en pensant "L'économie verte çà n'est pas suffisant mais c'est mieux que rien."En soi cette pensée n'est pas fausse .  Mais elle ne résiste pas à l'analyse  si on la rapporte au productivisme. Pourquoi ?

 D'une part il  n'y a probablement plus beaucoup de temps pour éviter de plus en plus d’ irréversibilités   écologiques, d'autre part  l'aggravation de la débâcle écologique appelle à la radicalité des remises en cause du système.

De la  peinture verte si on y tient  mais il faut ne pas se méprendre sur ses limites et sur son aspect communication  ,   et surtout il faut aussi  aller beaucoup  beaucoup  plus loin.

C-La troisième conception se veut la plus porteuse et la plus radicale. Elle veut aller jusqu’aux causes de la débâcle environnementale.

Se vouloir radical signifie penser et mettre en œuvre des remises en cause, penser et mettre en œuvre des contre-mécanismes viables face aux mécanismes autodestructeurs du vivant.

 L’écologie est alors synonyme d’ « un ensemble de remises en cause  des mécanismes  terricides et humanicides du système productiviste. » Ces moyens écologiques doivent être en liens avec des moyens justes, démocratiques et pacifiques.

 Consommer  moins pour une partie des habitants de la planète, brûler moins d’énergie, économiser les ressources, développer les énergies renouvelables, produire et consommer autrement, se  déplacer autrement, développer des technologies propres, recycler les déchets, organiser une fiscalité écologique  re distributive  et juste, fondée en particulier  sur les écotaxes, créer des fonds internationaux (taxes sur les énergies polluantes, sur les transactions financières),remettre en cause des financements publics pour les énergies fossiles, étendre et protéger le patrimoine commun de l’humanité. 

Des auteurs, des citoyen(ne)s et des  mouvements sont favorables à  une« décroissance » fondée entre autres  sur une remise en cause des surconsommations et sur une relocalisation des activités…

  L’urgence écologique est là, elle appelle  des prises de conscience, des partages de contrainte, des règles générales et spécifiques. Ces règles sont vécues parfois comme liberticides, alors qu’elles sont synonymes de limites à organiser pour ne pas détruire encore plus. Des interdictions, des taxes peuvent être légitimes pour la protection de l’environnement.

 Il faut arriver à ce  que l’écologie de combat  ait ces deux dimensions, d’une part des incitations, des préventions, d’autre part des interdictions, des  sanctions. Dans cette perspective une partie des populations parle de l’écologie perçue comme « punitive», de règles liberticides.

Une question clef doit ainsi  accompagner cette panoplie de mesures : faire en sorte que  le partage de ces  responsabilités soit équitable et que les inégalités économiques et sociales soient prises en compte. Le productivisme ne peut pas être remis en cause …sans remises en cause, cela des plus petites aux plus grandes.

 D-La dimension mondiale doit être le catalyseur des moyens gigantesques


D’abord nous rappellerons la multitude d’acteurs aux différents niveaux géographiques (1),  les liens entre ces acteurs (2), leurs modes de fonctionnement (3) Enfin nous nous interrogerons sur  une instance  mondiale de remise en cause financière gigantesque.(4)


1-Un rappel des niveaux géographiques des acteurs


Un des raisonnements probablement le plus globalisant et le plus opérationnel est celui des dimensions des acteurs. On trouve alors des acteurs qui vont du plus petit niveau géographique jusqu’ au niveau géographique le plus gigantesque et réciproquement. A chaque niveau interviennent différents acteurs.


Ainsi au niveau international interviennent les organisations internationales , les firmes multinationales, les organisations non gouvernementales, les réseaux scientifiques mondiaux, les marchés financiers, les complexes scientifico-militaro-industriels…et les Etats.


Au niveau continental les acteurs internationaux précédents et, de façon plus spécifique, les organisations régionales ou sous-régionales.


Au niveau national ce sont bien sûr les Etats qui sont amenés, de façons variables, à accepter un démantèlement par le haut à travers la mondialisation et par le bas à travers des revendications autonomes voire séparatistes. L’Etat est amené à n’être qu’un des niveaux relié à d’autres soit plus petits que lui, soit plus vastes (organisations régionales ou sous-régionales).


Au niveau géographique plus petit on trouve des citoyens, des familles, des associations, des entreprises, des syndicats, des municipalités, des collectivités territoriales et de façon plus informelle , des mouvements sociaux locaux …

2- Les liens essentiels entre ces acteurs


-Face aux enjeux majeurs ce sont tous les niveaux qui doivent  agir .


Tous les acteurs, aux différents niveaux géographiques, à travers des responsabilités très variables, ont des remises en cause à entreprendre, des alternatives auxquelles participer.
Ce sont les périls communs qui doivent contribuer à nous fraterniser.

Il est clair aussi que plus l’acteur est puissant et se trouve au cœur du système productiviste plus la remise en cause sera difficile.


-Si l'on pense que le village, la ville, la région c'est notre terroir-le pays c'est notre patrie , le continent c'est notre matrie, la terre c'est notre foyer d'humanité alors le principe de subsidiarité active s’applique de proche en proche, du monde entier à la communauté de base.


Il faut enfin souligner le principe de subsidiarité qui consiste, pour chaque collectivité, à respecter des principes. Le principe d’humanité c’est-à-dire la possibilité d’avoir une vie digne répondant aux besoins essentiels, le principe de responsabilité des divers acteurs dans la construction des sociétés, le principe de diversité par exemple des cultures, le principe de précaution qui consiste à ne mettre en œuvre de nouveaux produits et de nouvelles techniques que si des risques graves ou irréversibles n’existent pas, le principe de modération qui consiste pour les plus aisés à limiter leur consommation, à apprendre la frugalité.
Des individus à la planète les communautés humaines sont ainsi liées aux différentes générations : aux générations passées par la protection du patrimoine culturel , aux générations présentes par les solidarités et aux générations futures par un horizon de responsabilité. .

3- Les fonctionnements des acteurs pour un monde viable

 Du local au mondial serait probablement un schéma démocratiquement  idéal.

-Ces niveaux géographiques n’ont-ils pas au moins quatre schémas de fonctionnements possibles?


Soit on pense et on agit dans le sens de systèmes centralisés dans lesquels les volontés vont du haut vers le bas, la démocratie est peu présente ou absente de tel ou tel lieu .
Soit on pense et on agit dans le sens d’un va et vient entre le haut et le bas, en corrections réciproques, reste à savoir comment se déroulent ces rapports de forces et ce qu’ils produisent dans tel ou tel lieu .
Soit on pense et on agit du bas vers le haut, on veut faire remonter des micro expériences, des actions à la base, une certaine démocratie participative existe à des échelles variables.
Soit on veut aller dans le sens de volontés qui, partant de la base, vont essayer de s’étendre, c’est un schéma proche d’une démocratie participative à des échelles variables.
Sur le terrain les circuits peuvent être compliqués puisque plusieurs schémas, par exemple dans un pays donné, peuvent fonctionner ensemble avec des ampleurs et des conflits variables.


-De quel système s’inspirer ?


Une conscience planétaire est le produit en particulier de catastrophes et de luttes.

Les luttes de terrain à travers  manifestations ,  par exemple des jeunes pour le mouvement climatique ,et à travers des alternatives, par exemple venant d’associations, ces luttes sont essentielles.

 Les premières sont souvent marquées par l’impatience, les secondes par une certaine patience. Mais les unes et les autres font à la fois pression sur le pouvoir politique et ont compris que les tergiversations, les compromissions, les effets d’annonces, les mensonges de pouvoirs politiques sont ou peuvent être plus ou moins nombreux.
Si l’on met de côté des systèmes   centralisés ,
soit on pense et on agit dans le sens d’un va et vient entre le haut et le bas,
soit on pense et on agit du bas vers le haut,
soit on veut aller dans le sens de volontés qui, partant de la base, vont essayer de s’étendre.
Dans ces trois façons de fonctionner on emploie alors des moyens démocratiques pour des fins démocratiques.

4-Pour une instance  mondiale de remise en cause financière gigantesque.

 Si l’on imagine une forme d’autorité mondiale  encore faut-il qu’elle soit démocratique et qu’existe une séparation des pouvoirs. Un pouvoir omnipuissant serait le contraire d’une démocratie mondiale fondée sur des moyens démocratiques.

Une assemblée mondiale des citoyens qui a vu le jour en 2021 peut avoir son utilité.

Nous pensons cependant qu’un élément qui pourrait être déterminant est celui d’une reconversion financière gigantesque, il faut donc créer un moyen institutionnel qui puisse la décider et la mettre en route.

Le processus de départ pourrait être celui de l’initiative de quelques Etats, d’organisations internationales et régionales, d’ONG, de mouvements  sociaux ,  d’entreprises  et d’acteurs financiers…

 Au niveau mondial  les instances de décision relatives aux changements climatiques et à la diversité biologique sont interétatiques à travers les conférences des parties.

 Leur atout majeur est de réunir l’ensemble des Etats, leurs faiblesses sont celles de leur lenteur et de  leur absence de radicalité et de globalité. Au niveau financier elles renvoient aux Etats ce qui est très loin de constituer une réponse globale et puissante.

La création en décembre 2017 de « Fonds souverains One Planet » est une pâle ébauche de ce qu’il convient de faire. Se réunissant une fois par an en séance plénière  cette coalition  rassemble 43 fonds souverains d’Etats et gestionnaires d’actifs ainsi que des fonds d’investissement représentant  36000 milliards de dollars (Voir article Le Monde, Isabelle Chaperon, « Climat : une coalition financière à l’Elysée,5 octobre  2021.)

La composition devrait être immensément plus large au niveau des Etats, de ces acteurs mais aussi d’autres catégories de participants. D’autres instances  sont essentielles, celles  relatives ainsi aux finances internationales, elles doivent participer à cette  reconversion financière radicale. Des entreprises, des grandes fortunes, de grandes ONG,d’autres acteurs peuvent être parties prenantes dans  ce tournant vital.

Mais surtout les objectifs radicalement reconvertis. Il ne s’agit pas « d’accélérer la mise en place de politiques de gestion de l’Accord de Paris sur le climat. » . Il s’agit  d’organiser , bien au-delà de l’Accord de Paris, une reconversion financière gigantesque vers l’environnement et la santé. L’éradication de la faim qui s’aggrave et le droit à l’assainissement et à l’accès à l’eau potable sont deux des grandes urgences.

Nous avions   imaginé ,  il y a une vingtaine d’années avec les étudiants de master de droit de l’environnement, la conclusion d’un traité de reconversion vers les énergies renouvelables reposant sur un fonds gigantesque de reconversion. La possibilité en est toujours ouverte.

Bien entendu les complexes scientifico-militaro-industriels  devront participer à cette grande reconversion financière vitale.

Radicalité écologique : des moyens  gigantesques(III)

III-Radicalité écologique : des moyens  gigantesques(III)

Ainsi qui veut la protection de l’environnement doit  penser et mettre en œuvre des moyens écologiques :

Quels  moyens pour un monde viable ?(A)

Enumérons  huit séries de   moyens  écologiques. (B)

Enumérons  huit séries de   moyens pacifiques. (C)

 Ici il s’agit de ce que  l’on pourrait appeler  une « gigantesque reconversion   financière » qui est liée au désarmement financier.(D)

Il y a 26 ans avait vu le jour la « Plate-forme pour un monde responsable et solidaire », publiée par le Monde diplomatique d’avril 1994, qui est à la fois « un état des lieux des dysfonctionnements de la planète et une mise en avant de principes d’action pour garantir un avenir digne au genre humain », plate-forme portée par la Fondation pour le progrès de l’homme.

Nous voulons ensuite souligner des  moyens de protection de l’environnement  selon des alternatives globales  possibles.

Le texte à ce jour le plus global et le plus remarquable est très certainement celui de la Fondation pour le progrès de l’homme intitulé « Bâtir ensemble l’avenir de la planète. Plate-forme pour un  monde responsable et solidaire. »(Le Monde diplomatique, avril 1994.)

Mais une énumération, plus spécifique à l’environnement, globale et  plus récente  d’ONG, nous l’avons trouvée, au milieu de nombreux textes,  dans l’appel d’octobre 2013 ci-dessous. A notre connaissance c’est l’un des plus globaux, critiques et  créateurs.

Quatre vingt dix organisations  dans le cadre d’Alternatiba, (en octobre 2013, à Bayonne), ont dressé une liste indicative d’alternatives écologiques et anti productivistes .Cet appel du 29 août 2013  s’intitule « Ensemble construisons un monde meilleur en relevant le défi climatique »:

« Loin des fausses solutions-injustes dangereuses et inefficaces-prônées par certains (géo-ingénierie , OGM, agro-carburants, marchés carbone, mécanismes de compensation, nucléaire etc…),des milliers d’alternatives aux causes du changement climatique sont en effet mises en pratique tous les jours par des millions d’individus, d’organisations, de collectivités locales dans les domaines les plus divers. »

On casse ce que l’on disait ou pensait être des fatalités, on lance des laboratoires on imagine des solutions , on ouvre ou  on rejoint des chantiers :

« Agriculture paysanne, consommation responsable, circuits courts, relocalisation de l’économie, partage du travail et des richesses, conversion sociale et écologique de la production, finance éthique, défense des biens communs(eau, terre, forêts),souveraineté alimentaire, solidarité et partage, réparation et recyclage, réduction des déchets, transports doux et mobilité soutenable, éco rénovation, lutte contre l’étalement urbain, lutte contre l’artificialisation des sols, aménagement du territoire soutenable, démarches de préservation du foncier agricole, défense de la biodiversité, sobriété et efficience énergétiques, énergies renouvelables, plans virage énergie climat, villes en transition, sensibilisation à l’environnement…etc. : les alternatives existent, elles ne demandent qu’à être renforcées, développées, multipliées ! » 

L’Appel se termine comme suit :

« Nous pouvons ainsi continuer à changer concrètement les choses chacun chacune à notre niveau, et également renforcer la dynamique, la prise de conscience, le rapport de force permettant d’avancer vers les bonnes prises de décisions tant au niveau local qu’au niveau global. »

 Ainsi ces prises de consciences et ces pratiques  tracent des chemins alternatifs qui se veulent porteurs de protection de l’environnement. Nous retrouverons dans les propositions qui suivent la plupart de ces chemins et beaucoup d’autres encore.

 A-Quels  moyens pour un monde viable ?

-D’une part ces moyens doivent être conformes aux finalités que l’on met en avant. Si l’on veut la démocratie il faut des moyens démocratiques, si l’on veut la justice il faut des moyens justes, si l’on veut la protection de l’environnement il faut des moyens écologiques, si l’on veut la paix il faut des moyens pacifiques. Cette pensée lumineuse de Gandhi n’est-elle pas incontournable   « Les fins sont dans les moyens comme l’arbre est dans la semence.» ?

-D’autre part, même si des moyens réformateurs  démocratiques, justes, écologiques et pacifiques peuvent être porteurs,  il faut avant tout penser et mettre en œuvre des moyens radicaux, c'est-à-dire remettant en cause chaque  mécanisme  par un contre-mécanisme aussi profond.  Parce que  la puissance  de l’autodestruction devient   telle qu’elle emporte et emportera de plus en plus vite   les êtres humains  et la plus grande partie du vivant.

B-Enumérons  huit séries de   moyens  écologiques.

(Pour plus de données voir sur ce blog notre article : Quels moyens écologiques ?)

Supprimer enfin l’un des plus grands drames du monde, celui de l’absence d’accès à l’eau potable et à l’assainissement,

Mettre en œuvre  des transitions énergétiques massives,

 Réduire et éliminer  les modes de production, de consommation et de transport écologiquement non viables ,

 Lutter contre l’effondrement de la biodiversité,

Réparer les dégradations de régions  dans le monde ,

Conclure de nouvelles conventions et s’emparer des principes de droit de l’environnement,

Créer massivement des emplois  écologiques et relocaliser des activités,

Créer et développer des moyens juridiques et des moyens généraux de protection,

 Ralentir l’explosion démographique…

C-  Enumérons   huit séries de moyens pacifiques 

 les  interdictions des recherches sur les armes de destruction massive,

 l'application des traités existants et de leurs protocoles et les  conclusions de nouveaux traités radicaux de  désarmement,

les remises en cause  des ventes d’armes, 

 la création  d’une véritable  sécurité collective mondiale enfin pensée et mise en œuvre,

l’avènement   de  ministères du désarmement,

 la consécration du droit à la paix ,  dont le droit à la sécurité et le droit au désarmement,

 la protection de l’environnement dans  les   conflits armés,

 le développement tous azimuts  d’une  éducation à la paix entre autres à travers l’apprentissage du règlement des conflits personnels et collectifs  et d’une éducation  aux droits de l’homme et à l’environnement.(Voir notre article sur ce blog :Quels moyens pacifiques ?)

 A cela s’ajoutent bien sûr deux autres séries  de moyens justes et de moyens démocratiques.(Voir nos articles sur ce blog :Quels moyens justes ?Quels moyens démocratiques ?)

D- Ici il s’agit de ce que  l’on pourrait appeler  une « gigantesque reconversion   financière » qui est liée au désarmement financier.

« Désarmement » et « reconversion » marchent tous deux côte à côte, ils se protègent, se complètent, s’inclinent l’un vers l’autre. 

Le désarmement financier  doit contribuer à remettre à leur  place les marchés financiers  qui dirigent le système mondial au détriment des Etats et des peuples.

La reconversion financière doit  orienter ces gigantesques richesses vers l’ensemble des besoins criants et d’abord ceux de l’environnement et de la santé. 

Nous entendons ainsi  par  gigantesque  reconversion financière  la mise en œuvre  de trois éléments :

-Premier élément :

Une reconversion d’une  ampleur financière inconnue jusque là, de l’ordre de plusieurs dizaines de milliers de milliards de dollars.

 On est quelquefois impressionné  devant des  plans  de  l’UE de quelques centaines  de milliards d’euros   et  devant ceux des   Etats-Unis  de quelques milliers de milliards de dollars.

 Il s’agirait donc  ici de l’ordre de 10, 20,30  fois plus que ces derniers  ou beaucoup plus encore, soit 10.000 à 20.000, 30.000 milliards de dollars  ou  beaucoup plus encore.

 -Deuxième élément :

Une reconversion par la création de nouveaux moyens c'est-à-dire de ressources gigantesques nouvelles. Si  de nombreuses anciennes ressources subsisteront  il faudra donner le jour à de nouvelles  et donc   aller chercher ces sommes colossales  où elles se trouvent et  changer leur   destination .

Beaucoup de terrien.ne.s  n’ont aucune idée de leur ampleur réelle. Il faut ajouter  que les camouflages de certaines d’entre elles  les recouvrent d’un linceul de silence difficile à remettre en cause.

-Troisième élément :

Une reconversion par la priorité donnée aux  besoins vitaux   c'est-à-dire avant tout ceux  de l’environnement et de la santé ,  mais aussi ceux  de  l’alimentation, de la protection sociale, de l’accès à l’emploi, du logement, de l’éducation, cela par des remises en cause allant dans le sens d’un monde viable.

 Or on constate le plus souvent le  contraire , un seul exemple parmi beaucoup d’autres :  en juillet 2021, selon l’Agence internationale de l’énergie, l’ensemble des plans de relance post-Covid, de l’ordre de 2300 milliards de dollars, consacrent seulement 46 milliards soit 2% aux énergies propres ce qui est dramatiquement dérisoire , c’est donc l’inverse qui verrait le jour , une reconversion massive vers des besoins environnementaux et sanitaires vitaux.

Cette reconversion ne  contribuerait-elle pas à l’hypothétique  passage de ce  monde autodestructeur à un monde viable ?

-Ce ne serait pas  « Le » grand remède miracle, il n’y en a pas. Ce serait un moyen parmi d’autres mais  très important par le montant des sommes et leurs  destinations multiples vers des besoins criants.

 -Ce ne serait pas une forme d’atteinte aux autres  contre-mécanismes face au productivisme autodestructeur    mais,  au contraire, pour eux un puissant soutien, un côte à côte  avec ces autres  nombreux moyens viables.

-Ce ne serait pas une utopie abstraite, détachée des conditions de sa réalisation. Nous croyons à l’utopie concrète ,  celle  qui prend les moyens de se réaliser. Et  de toute façon ,  écrivait René Dumont, le choix est on ne peut plus clair : c’est « L’utopie ou la mort »(titre de son ouvrage lumineux publié en 1973) .

-Certains  diront que c’est supposer la question résolue : on remettrait en cause le système mondial autodestructeur dans un de ses piliers centraux particulièrement puissant ,    le domaine financier.

Mais  la question reste entière puisque   la réponse dépend des volontés, des moyens et des marges de manœuvres  pour la réaliser.

-D’autres diront qu’on ne peut pas par les finances changer le système productiviste puisque ce sont elles qui représentent  un des piliers de l’autodestruction. Il serait au contraire impératif de  mettre fin à l’argent, point final.

Si nous laissons la question des alternatives à venir ouvertes en ce domaine,

 nous pensons que  la reconversion est exigée  par les  drames et les menaces  ,  qu’elle est faisable  , qu’elle doit être la plus rapide possible et qu’elle peut contribuer à changer un des fondements du productivisme, son autoreproduction, en cassant certaines logiques.

Remarques terminales

 1 -Fondé sur les liens entre  productivisme , capitalisme et  anthropocène ,  le système mondial n’est-il pas condamnable du seul fait qu’il y ait  un enfant sur deux dans le monde en situation de détresse et/ou de danger ( maladies, misère, pauvreté, guerres…) et du seul fait que les marchés financiers ont pris, depuis 1971 (fin de la convertibilité du dollar en or), une large partie de la place des conducteurs  qu’étaient  les Etats et les entreprises, autrement dit une large partie de la place du politique et de l’économique ?

2 -Le système mondial n’est-il pas condamné du seul fait  que plus de 5,4 milliards de dollars partent  chaque jour en 2020 vers les dépenses militaires mondiales, et du seul fait que des activités humaines entraînent un réchauffement climatique  qui menace l’ensemble du vivant , 3°C à 6°C -ou plus- d’élévation de la température moyenne du globe vers 2100 et à cette même date un  mètre  -ou plus-  d’élévation du niveau des mers ?

3-La radicalité écologique mondiale est devenue un impératif vital qui saute aux yeux pourvu qu’on les ouvre. Elle est synonyme d’une remise en cause systémique. Elle en appelle  à la mise en œuvre rapide de moyens gigantesques parmi lesquels une reconversion financière tournée prioritairement vers l’environnement et la santé.

4-Un des signes des choix de mort ou de vie a été à ce jour  celui de l’engagement financier des Etats parties à la COP 26 de Glasgow sur les changements climatiques (31 octobre au 12 novembre 2021.).

Ou bien les populations vulnérables des pays en développement n’auront pas véritablement les aides prévues, ce seront des inconsciences mortifères des pays riches et la course vers l’abîme s’accélèrera.C'est ce qui s'est passé,une récession des volontés.

Ou bien ces populations seront aidées  à hauteur des sommes prévues, les prises de conscience seront encore dramatiquement insuffisantes, la course vers l’abîme continuera.

Ou bien les sommes prévues dans l’Accord de Paris seront radicalement revues à la hausse et la course à l’abîme sera encore là.

Ou bien une prise de conscience des intérêts vitaux communs préparera de façon urgente de grandes reconversions financières mises en œuvre rapidement ,   fondées en particulier sur de nouvelles ressources gigantesques, ce sera  alors une chance (une des dernières ?)  pour l’humanité.

« Ils ne savaient pas que c’était impossible alors ils l’ont fait. » (Mark Twain)

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