Non pas au plan économique, lorsqu'ils attendent de lui qu'il règle d'un coup de bagette magique
leurs préoccupations matérielles quotidiennes.
Pas non plus aux plans migratoire et sécuritaire, les deux n'en faisant qu'un aux yeux du RN,
puisque, une fois au pouvoir, il mettra immédiatement en oeuvre sa politique répressive à l'égard
des étrangers et des voix sociétales discordantes.
Mais aux plans de la xénophobie et du racisme, au sujet desquels le RN prétend avoir changé, il
en est autrement.
Car ce n'est pas parce que le RN est en quête de respectabilité, l'une des portes d'entrée menant au
le pouvoir, qu'il a pour autant délaissé sa réthorique historique rance, sa véritable marque de fabrique.
Cette vision étriquée du monde, il ne l'a jamais abandonnée et ne l'abandonnera jamais.
Elle est la traduction de son fantasme d'une société blanche, débarrassée de ses anomalies religieuses
et/ou raciales.
Et cela, bien qu'il déclame officiellement l'inverse, partout et toujours.
Si les frontistes de la première heure savent pertinemment que cet aspect de l'idéologie du RN est
resté intacte, les nouveaux venus trouvent sans doute plus confortable de croire à cette mue, déni
indispensable à leur adhésion au reste de son programme.
Beaucoup plus surprenant est cette posture depuis peu adoptée par des personnalités de premier
plan, à l'instar de Serge Klarsfeld, avocat très connu pour avoir passé la majeure partie de sa
vie à traquer à travers le monde les dignitaires nazis ayant échappé aux tribunaux d'après-guerre.
Car, les concernant, absolument rien ne justifie un tel revirement qui pourrait expliquer qu'ils
se soient convertis à cette mascarade.
Et qu'à l'inverse, ils soient persuadés que la gauche de La France Insoumise, bien qu'imparfaite,
soit devenue le parti politique antisémite par excellence, en substitution du feu Front National
xénophobe et raciste, un peu à l'image du roque, permutation stratégique de deux pièces importantes
dans le jeu d'échec.
Comment les qualités d'analyse, de lucidité, de culture et de sagesse peuvent-elles à ce point
se dérober à de tels esprits, qui ont fait de leur vie un condensé d'engagement et d'humanité ?
Comment Serge Klarsfeld, devenu un expert des comportements humains les plus sordides et les plus
cruels, peut-il décider un jour de passer de l'autre côté du miroir, dans ce "no man's land" où règne
la duperie, la duplicité, la manipulation et la violence ?
Cette extrême confusion laisse tout simplement aphone.