Les biens acquis au régime Moubarak. Le monde arabe est dans la tempête mais les gestionnaires de l'ancien régime sont toujours en place. Pour preuve, face au Parc Monceau, un immeuble avait été laissé vide pendant plus de 10 ans. Un cas classique qui ne semble pas émouvoir le ministre Benoist Apparu. Plus de 2500m² haussmanniens, face au Parc Monceau. La propriété de qui. Rien de bien sorcier. La puissance tentaculaire d'un despote égyptien qui gardait fidèlement son tas d'or en instrumentalisant la peur pour des frères musulmans. Frères qu'il a toujours aidé à perdurer. Certes, évidemment, la propriété n'est pas directement liée à Moubarak mais c'est pas si éloigné : l'immeuble du 1 place Rio de Janeiro dépend d'une compagnie d'assurance égyptienne proche du régime.
Jeudi Noir dans l'arène. L'immeuble de plusieurs étages avec escaliers monumentaux, pavés de marbres et de raretés, était occupé depuis deux semaines par des jeunes précaires, artistes, mal logés. Des anciens du squat Jeudi Noir de l'avenue Matignon. Oui, ceux qui sont précarisés dans leurs études, dans leur vie et dans leur travail. Depuis donc plus de dix jours avec l'ensemble des éléments prouvant cette occupation devenu légale... Cela aurait du faire l'objet d'un procès ou d'une mesure de constatation par un huissier mandaté. Oui, c'est la légalité, mais Benoist Apparu ne semble pas au courant de cette forme de légalité. La légalité qui est censé permettre d'occuper une propriété dont on ne fait rien. Cette légalité démarre à partir d'une présence de squatters de plus de 48h00. Certes, Jeudi-Noir était la depuis 10 jours.
La préfecture oublie son droit. L'avant-garde des forces de l'ordre a fait un passage hier. Elle savait que le bâtiment était en possession de Jeudi-Noir depuis plusieurs jours et pourtant... les hautes sphères ont choisi de passer outre la loi. Alors que Benoist Apparu trépigne pour ne pas recevoir le collectif trublion pour la seule raison que ces « militants ne respectent pas la loi »... On sent toute l'ambigüité de ce ministre. Oui, c'est ainsi. Le ministre a déjà oublié des pans entiers de la légalité de squatter un bâtiment vide et des droits obtenus sur ce sujet. C'est si technique que ces dispositifs concernant les squats occupés depuis plusieurs jours?
Le cynisme pour des biens acquis. Le bâtiment restera vide. Il en est ainsi. Ce matin, une alerte d'un militant est envoyée par sms : « Jeudi Noir et 20 précaires se font expulser en ce moment, du 1 place Rio de Janeiro, Paris 8, qu'ils occupent depuis 10 jrs. L'immeuble est propriété des proches de Moubarak ». Fin de citation laconique. Pour la petite histoire locale, cet immeuble avait été occupé pendant deux ans de 2007 à 2009. Il était vide depuis des années et le restera visiblement encore longtemps. Pour l'histoire, il y avait eu une retransmission sur place d'un film engagé « les nouveaux militants » à l'occasion de sa sortie et cela montrait que la vie associative avait pu prendre très vite dans cet espace si grand et désormais si vide. Mais le cynisme est de rigueur. Un petit ministre apparu comme « trépigneux » ne supporte pas qu'on l'irrite avec la réalité de son ministère. La préfecture se sent sur un siège éjectable et donc pratique des modifications de droit.
Bilan. Il a été décidé d'expulser illégalement, en pleine trêve hivernale. 30 personnes sont à la rue, sans décision de justice, sans enquête sociale, sans solution de relogement. Triste histoire, banalisée par l'exécutif. Oui, le dogme de la France propriétaire ne vaut que pour ceux qui le sont déjà. Les autres doivent se contenter d'avoir faim ou d'avoir froid...
Le mot de la fin. « Pas d'huissier mais l'avocat du proprio. Et on n'était pas déclaré jeudi noir. On est dans le panier à salade à l'intérieur du commissariat du 8e » 10h56, un membre du collectif.